Juste entre toi et moi - Anne Dorval
Episode Date: March 7, 2024« Tant qu’à se dépasser, commençons maintenant », lance une Anne Dorval à la fois intransigeante avec elle-même et empathique envers les autres. De ses débuts au théâtre à la consécratio...n internationale des films de Xavier Dolan, l'actrice raconte sa carrière sans pareil dans cet entretien aussi flamboyant qu’introspectif.
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Sous-titres par Dominique Tardif Au deuxième épisode de la troisième saison de Juste entre toi et moi, je prends quelques instants pour saluer tous ceux et toutes celles qui m'ont écrit à la fin de l'année dernière pour me proposer leurs suggestions d'invités.
Suggestions très éclairées, très intéressantes. Je vous certaines personnes d'accepter de s'asseoir devant moi.
Mais mon invité d'aujourd'hui, elle a tout de suite répondu oui.
Mon invité d'aujourd'hui, c'est Anne Dorval.
Anne joue dans un film qui prend l'affiche le 8 mars et qui s'intitule « Quitter la nuit ».
C'est un film de la cinéaste belge Delphine Gérard.
Comme je l'ai dit à Anne, c'est un film qu'on regarde sur le bout de son siège, un film qui soulève en nous plusieurs réflexions.
Il en sera question dans l'entretien qui suit, mais il sera aussi question d'à peu près tous les autres sujets au monde.
Je vous rappelle que vous pouvez lire l'article que j'ai tiré de cette rencontre dans La Presse Plus, sur lapresse.ca ou sur La Presse mobile.
Vous pouvez aussi nous laisser une bonne note ou un commentaire
sur Apple Podcasts ou sur Spotify.
Au début de ma conversation avec Anne, on discutait du trac fou
qu'il habitait encore lorsqu'elle est montée sur scène
en janvier 2023
au TNM dans la pièce
« Je t'écris au milieu d'un bel orage ».
Voici mon entretien
avec l'iconique
Anne Dorval.
Juste entre
toi et moi
ça restera entre toi et moi Ça restera entre toi et moi
Pour une fois
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi
Ça reste entre toi et moi Ça reste entre toi et moi Ça reste entre toi et moi Ça reste entre toi et moi Ça reste toi et moi Ça reste toi et moi Ça reste toi et moi Mais ça veut dire qu'avec les années, ton trac se calme pas du tout.
Ah ben non, c'est pire.
Ça pèse pas. C'est pire.
C'est pire, oui, oui, bien sûr.
Comment on explique ça, que ça devienne pire avec les années?
Ben déjà, l'énergie est pas la même en vieillissant que quand on est jeune.
Puis quand tu sors d'une école, tu veux avoir une tribune, tu veux avoir l'occasion de...
Conquérir le monde. Pas de conquérir le monde, mais
au moins avoir la chance
de montrer ce que
tu es capable de faire.
Et ça,
c'est quand même
un moteur important
et c'est...
On dirait que notre
façon d'être, notre façon
de voir les choses est différente aussi.
On le sait qu'on a le trac,
mais c'est pour ça qu'on se bat.
C'est pour jouer.
C'est pour avoir la chance de peut-être un jour
laisser une trace dans ce métier-là
ou au moins de s'améliorer, de travailler.
Ça fait qu'on le voit moins.
Puis moi, je me souviens, les premiers temps, parce que j'ai surtout joué au théâtre en sortant de l'améliorer, de travailler. Ça fait qu'on le voit moins. Puis moi, je me souviens, les premiers temps,
parce que j'ai surtout joué au théâtre
en sortant de l'école,
et je me souviens, je regardais même au TNM.
Écoute, je faisais l'école des femmes.
C'était mon premier gros, gros rôle.
C'était au TNM en plus.
Et j'avais un trac incroyable.
Mais je regardais quand même dans le crac du rideau
pour voir s'il y avait du monde que je connaissais.
C'est se faire violence.
Ce qui me semble totalement,
non seulement impossible, mais absurde aujourd'hui.
C'est pas possible.
Ça peut pas faire partie de ma vie d'en faire de même.
Je peux même pas imaginer que je puisse regarder
dans un petit trou pour voir si je reconnais quelqu'un.
C'est impossible. J'ai envie de me sauver en courant.
Donc, ça, ça change.
La mémoire aussi. La mémoire n'est plus la même.
Physiquement, on n'est plus...
Je suis très en forme,
mais ce n'est pas comparable avec la forme que j'avais
quand j'avais 25 ans.
Puis, est-ce que les compliments, les bonnes critiques,
ça finit par créer une pression sur tes épaules?
Je sais pas trop penser à ça.
En fait, la plus grosse pression,
c'est bien cliché, il y a bien des gens qui disent ça,
mais c'est vrai, c'est moi qui me la mets, la pression.
Parce que je veux pas me décevoir, moi,
je veux apprendre quelque chose, je veux pas reculer,
je veux avancer, je veux m'améliorer.
C'est ça qui est bien au théâtre, en fait.
C'est quelque chose que je réalisais
déjà avant,
mais ça me l'a rappelé avec ce show
que
tous les soirs, on peut se rattraper
parce que c'est un public différent.
On a encore une chance d'être
meilleur que la veille ou de pas faire
les gaffes, en tout cas qu'on a fait la veille,
ou de jouer les choses différemment
parce que notre état d'esprit est différent aussi.
En 24 heures, il y a des choses qui changent.
La base est
la même. On va pas tout changer.
On va pas changer la mise en place.
On va se mettre à improviser. Mais notre état
d'esprit est autre. Et on joue
avec les gens qui sont dans la salle aussi,
et surtout, on se voit pas, ce qui est
un grand avantage. Pour s'abandonner,
je pense qu'il faut pas
se voir. Et souvent, quand on est jeune,
on a beau se dire ça, mais
ça arrive
des fois qu'on se regarde jouer.
Qu'est-ce que ça veut dire, se regarder jouer?
Faire des effets, des fois,
on passe tous par là, on a tous fait ça à l'école de théâtre, Qu'est-ce que ça veut dire, se regarder jouer? Faire des effets, des fois.
On passe tous par là.
On a tous fait ça à l'école de théâtre ou en sortant, où on a observé des gens
qui faisaient ça et ça nous a énervés.
Je me souviens même au conservatoire,
on avait des exercices publics,
on avait...
Puis on se disait des soirs,
ce soir, on les a eus, on les a...
Puis...
Parfois, on avait des captations.
Dans ce temps-là, ça me dérangeait moins de me voir,
même si ça me dérangeait quand même.
Et je me disais, oh mon Dieu, je pensais que j'étais dedans,
mais c'est donc bien mauvais.
C'est donc bien insupportable, ce que je suis en train de regarder.
Puis on dirait que tout ça, en travaillant puis en vieillissant,
ça se dépose.
Puis à un moment donné, t'as envie juste de... de t'approcher de la vérité le plus possible.
Puis pour ça, il faut s'abandonner,
puis il faut arrêter de s'écouter,
il faut jamais se regarder, il faut être dans le moment présent,
puis il faut être dans l'œil de la personne à qui on s'adresse,
de l'acteur ou de l'actrice à qui on s'adresse.
Est-ce que c'est déjà arrivé que le scénario catastrophe
dans lequel tu te projetais avant de monter sur scène
se produit, se concrétise une fois monté sur scène?
Bien, le scénario catastrophe.
La catastrophe absolue, non.
Mais il y a quand même...
Oui, il y a des mini-catastrophes, oui.
Quand tu oublies ton texte,
tu es tellement traqué par le fait
que tu vas devoir dire des alexandrins
qu'à un moment donné, ça arrive.
Tu répètes ton texte, tu répètes, tu répètes,
tu te fais des italiennes.
Et malgré tout,
tu commences un monologue,
puis tu ne sais plus.
Et là... Qu'est-ce qu'on fait dans ce temps-là?
Bien, moi, ça m'est arrivé un soir.
C'était terrible.
Je faisais Hermione d'Andromaque, puis...
Ce n'est pas un petit rôle.
Non.
Mais tous les rôles dans Racine,
tous les rôles sont complexes.
Il n'y a rien de simple.
Non.
Mais...
Je me souvenais quand même
de la musique. Je me souvenais
de la sonorité de certains vers.
Je viens pour ouvrir la bouche, rien ne me vient.
Et ça a l'air que j'ai dit
ta-ra-ta-ta-ta
gna-gna-gna.
Pour que ça rime.
Je n'ai pas fait ça exactement,
mais j'ai fait des syllabes comme ça.
Et là, en le disant,
j'ai fait, oh,
est-ce que les gens se sont rendus compte de ce qui vient de se passer?
Probablement pas. Alors, je vais continuer.
Puis là, je suis retombée sur mes pattes avec mon texte.
J'ai fini.
Puis la régisseuse, à la fin de la soirée,
elle me dit, mais tu es consciente de ce qui s'est passé?
Je dis, bien, c'est nébuleux. Écoute,
je ne sais pas. Je sais qu'il s'est passé quelque chose,
mais je ne sais pas ce que j'ai dit.
Je suis comme dans un...
Oui,
t'as fait gna gna gna,
taratata, pouet pouet.
Je fais, ah!
Donc, tu l'as bien entendu.
Elle fait, oui, oui, t'as fait pouet pouet,
touet touet.
T'as fait rimer des syllabes,
t'as fait des onomatopées
qui avaient aucun sens.
Et là, je fais, quand même, c'est fragile.
Puis après ça, la panique est revenue avant chaque show,
mais je me suis pas trompée.
C'est lequel le premier moment où t'as été grisée
par une pièce de théâtre à laquelle t'as assisté?
À laquelle j'ai assisté?
Le moment où t'es tombée en amour avec cette forme d'art-là.
Je sais pas, je pense que c'était plus enfant
quand je voyais des télétéatres à Radio-Canada,
parce que moi, je suis déménagée souvent dans ma vie.
T'as grandi à Trois-Rivières?
J'ai grandi à Trois-Rivières, mais j'ai habité à Sherbrooke avant.
Avant ça, on était en Abitibi. On déménageait constamment.
Parce que t'es née à Rwanda.
Je suis née à Rwanda, mais je suis partie, j'avais 5-6 ans.
J'étais vraiment... Je me souviens pas de grand-chose.
Ça nous fait un point en commun.
T'es née là?
Je suis née à Rwanda.
Ah, voyons donc!
Je suis partie à 11 ans, oui.
Mais revenons à toi.
Donc, t'as souvent déménagé.
Oui.
Puis, donc, il n'y en avait pas de théâtre tant que ça
en région.
C'était plus compliqué.
Je me souviens, ma mère m'avait amenée voir
la Sagouine à un moment donné quand c'était passé à Trois-Rivières,
mais je pense que j'avais 12 ans
puis j'avais trouvé ça un peu plate. Je l'avais
trouvée bonne, mais ma mère
était complètement pas amée puis elle se pouvait plus.
Puis elle faisait ça pour me faire plaisir aussi
parce qu'elle savait que j'étais passionnée de théâtre.
Déjà à 12 ans, tu étais passionnée de théâtre?
Oui, ça faisait longtemps que je voulais faire du théâtre.
Je voulais faire ce métier-là.
Mais c'est plus...
Quand j'étais enfant,
mes parents regardaient les bouts dimanche
et qu'il y avait des télétérapes.
C'était surtout ça.
Je me souviens quand j'avais vu
Des souris et des hommes.
Ce qui a marqué beaucoup de gens.
Jacques Godin.
Et Hubert Loisel aussi, qui était extraordinaire.
Et Luce Guilbeault, qui n'avait aucun sens.
J'étais jeune et il m'avait tellement impressionnée.
Tellement bouleversante.
C'était bouleversant.
Je me souviens de la musique de Claude Léveillé.
Ça, ça m'avait vraiment marquée.
Oui.
Mais ce n'est pas ça qui m'a donné envie de jouer, en fait.
C'est que je...
Quand j'étais petite,
j'imitais mes profs beaucoup pour faire
rire mes amis et toute la classe.
Et j'ai vu
le pouvoir que...
le petit pouvoir que je pouvais avoir,
en fait, sur les autres. Puis c'est le seul que j'avais
parce que je n'étais pas populaire,
je ne me trouvais pas
particulièrement intéressante, j'étais très, très,
très timide, je n'étais pas capable de poser une timide. J'étais pas capable de poser une question.
J'étais pas capable de faire des oraux
devant la classe. Je
bafouillais. Je paniquais. Je me mettais
à trembler. C'était terrible.
C'était terrible. Puis là, c'est les seules fois
où tout à coup, je me libérais et j'avais vraiment
du plaisir. Je n'avais pas...
Je ne me posais plus ces questions-là.
Est-ce que j'ai ma place quelque part?
Est-ce que... Qu'est place quelque part? Est-ce que...
Qu'est-ce que je fais ici? Pourquoi je suis ici?
Pourquoi on me regarde? Pourquoi...
Là, tout à coup, j'avais juste du plaisir
à imiter mes profs.
Puis c'est les seuls moments où j'étais un peu populaire.
Qu'est-ce qui reste de cet enfant timide
en toi aujourd'hui?
Je suis encore timide,
mais je fais semblant que je le suis pas.
C'est ça qui a changé.
T'as conscience qu'il y a plusieurs personnes
présentement qui entendent ça, qui sont étonnées?
Oui, mais je le suis moins qu'avant.
J'ai travaillé ça beaucoup,
parce que la timidité, à un moment donné,
ça peut devenir une excuse pour bien des affaires.
Puis je trouve que c'est un peu paresseux
de dire qu'on est timide.
Soignons-nous de nos maux.
C'est compliqué, puis ça peut prendre des années,
mais là, à l'âge adulte,
on n'a plus d'excuses. Il faut se soigner
de toutes sortes de choses.
Je le dis, mais ça ne veut pas dire
que je l'applique dans toutes les sphères
de ma vie.
Mais comment ça se manifeste, la timidité?
Mais ça,
quand je rencontre des nouvelles
personnes, j'ai peur de ne pas être
au bon endroit. J'ai peur qu'ils soient trompés à mon sujet, j'ai peur de ne pas être au bon endroit.
J'ai peur qu'ils soient trompés à mon sujet.
J'ai peur que... Parce que c'est ça, on me dit beaucoup de belles choses,
souvent, mais je ne sais pas si c'est justifié.
Il y a beaucoup de gens qui ne me connaissent pas dans la vie,
qui ont une image de moi, qui pensent ça,
mais peut-être que s'ils me connaissaient,
ils seraient bien, bien déçus.
Il y a déjà ça, cette peur de décevoir là.
C'est une peur personnelle.
Ça n'a rien à voir avec mon métier
ou ce que je fais professionnellement.
Ça, c'est un autre dossier.
Mais moi, toute seule, je m'arrange pour que ça ne paraisse pas.
Parce que c'est humiliant aussi,
avouer tout le temps qu'on est gêné,
c'est stupide, puis on a l'air idiot. Ça fait que je ne veux pas que ça ne paraisse pas. Parce que c'est humiliant aussi. Avouer tout le temps qu'on est gêné, c'est stupide, puis on a l'air idiot.
Ça fait que je ne veux pas que ça paraisse.
Ça fait que je m'arrange pour avoir l'air...
Mais là, je vais être démasquée, je viens de dire
tous mes secrets.
Donc tantôt, lorsque tu es arrivée, puis que je t'ai dit
que tu étais une icône, tu as réagi
comme si j'avais dit la pire des balivères.
Mais non, parce que pour moi,
ça ne veut rien dire.
Je serais une icône. Quand je serai morte, peut-être que 50 ans après,
si on se souvient de moi, on pourrait dire ça.
Mais tant qu'on est vivant, on n'est pas des icônes ou personne.
On est vivant et on essaie de faire du mieux qu'on peut.
Des fois, ce n'est pas bon ce qu'on fait.
On est mauvais.
C'est grave sur le coup, mais c'est juste ça.
On va s'améliorer.
T'as su très tôt que tu voulais faire du théâtre,
mais t'as quand même étudié d'abord en arts plastiques?
J'ai travaillé en arts plastiques.
Ça m'intéressait beaucoup, les arts plastiques.
J'aurais aimé ça, être graphiste ou...
J'aurais aimé ça,
dessiner des objets aussi,
être désigne designer industriel.
J'aurais aimé faire de l'architecture.
Mais j'haïssais tellement les maths.
J'étais assez bonne en maths.
C'est sûr qu'en design industriel,
ça se peut qu'il y ait des maths.
Ou architecte.
Il faut être très, très fort en maths.
Il faut aimer les maths.
Moi, j'étais bonne en maths.
J'étais moins bonne que mes frères
et ma soeur
et mon père, qui étaient une bolle
en mathématiques.
Mais j'étais quand même bonne.
Mais j'haïssais ça. J'haïssais trop ça.
Mais j'aurais aimé...
Oui, j'aurais aimé
être graphiste.
Mais je savais que j'avais pas assez...
J'avais pas autant de talent là-dedans
que je pouvais en avoir en art dramatique.
Et j'avais fait mon cégep en art plastique
un peu par dépit, parce que
j'étais en secondaire 5, je venais de passer
mes auditions à l'École nationale.
Ils m'avaient pas acceptée parce que j'étais trop jeune.
T'avais quel âge? J'avais 15 ans.
15 ans! Mais j'étais bien insultée
quand ils m'ont dit,
essaie-toi l'année prochaine.
Là, tu es un petit peu jeune,
mais l'année prochaine, ça se peut qu'on te prenne.
Je l'avais pris personnel, puis j'avais dit,
c'est des idiots, ils me prennent pour une imbécile.
Je ne mets plus jamais les pieds ici.
Mais comment est-ce que c'était possible
que tu passes tes auditions à 15 ans
alors que tu n'avais pas terminé ton secondaire?
Non.
Non?
Mais j'allais le terminer.
Ça s'en venait.
C'était imminent.
Mais comment?
Il disait, on fait des exceptions parfois.
Puis à l'École nationale,
comme c'était privé, le cégep
n'était pas obligatoire.
C'était pas comme au conservatoire,
disons, qui était une institution publique.
Puis bon, il fallait que t'aies fait ton cégep.
Moi, je me suis dit, bon ben,
je suis l'exception. Ils me prennent. C'est sûr., je me suis dit « Bon, bien, je suis l'exception.
Ils me prennent, c'est sûr. Je vois pas... » Mais t'étais pas tout à fait l'exception.
Bien, pas à ce point-là, non.
15 ans, c'était jeune.
Puis il avait raison, voyons.
Mais j'étais insultée.
Et là, j'étais obligée d'attendre
parce que je pouvais pas me présenter au conservatoire.
J'étais vraiment trop jeune.
Puis il aurait même pas accepté ma candidature.
Puis j'ai fait « Bon, les arts plastiques, j'aime ça.
Je vais faire mon cours d'arts plastiques.
J'ai aimé ça pour vrai.
Mais j'ai passé mes auditions au conservatoire
à ma dernière session.
Je n'avais pas fini ma dernière session au cégep.
J'ai su que j'étais acceptée.
J'ai tout lâché.
C'est-tu assez paresseux? C'est terrible.
Je n'ai même pas fini. Je n'ai même pas mon deck.
Je n'ai pas fini ma dernière session. C'est-tu assez paresseux? C'est terrible. J'ai même pas fini, j'ai même pas mon deck, en fait. J'ai pas fini ma dernière session.
Mais quand le destin nous appelle, il faut répondre.
Oui, mais le conservatoire commençait en septembre suivant.
J'aurais dû finir mon cours, mais j'étais trop pressée.
Puis c'était exigeant quand même.
En art, moi, je me souviens d'avoir travaillé
des nuits entières sur des projets.
Sculptures, peintures?
Des projets en trois dimensions,
mais des projets en deux dimensions aussi.
Toutes sortes de projets,
mais les fins de session, c'était compliqué
parce qu'on ne dormait pas, en fait.
Je prenais des petites pilules.
Je me souviens, je ne sais pas si ça existe encore,
des pilules wake-up.
Ça existe encore, hein?
Je pense que oui.
Je prenais ça et je passais la nuit debout.
Et le lendemain matin, j'avais mon cours,
puis il fallait que je fasse ma présentation.
J'ai fait ça beaucoup.
Juste pour m'épargner ça, dans ma dernière session,
j'ai lâché.
Tes parents faisaient quoi dans la vie?
Mon père était comptable.
Ma mère, elle a été institutrice un temps,
mais elle a tout arrêté
parce qu'elle avait quatre enfants.
Elle était un petit peu à bout.
Puis comment est-ce qu'il vivait ton rêve
à toi de devenir comédienne?
Mon père
ne prenait plus rien au sérieux parce que
j'étais intéressée à
toute forme d'art.
J'aimais les arts, j'aimais la musique.
J'étais douée en musique. J'avais pris des cours de piano
quand j'étais plus jeune. Mais là aussi, au bout de trois ans, je me suis découragée parce que je voulais jouer du Chopinais la musique. J'étais douée en musique. J'avais pris des cours de piano quand j'étais plus jeune.
Mais là aussi, au bout de trois ans,
je me suis découragée parce que je voulais jouer du Chopin.
C'était ça, mon rêve.
Je voulais jouer du Chopin à la perfection.
Puis au bout de six mois, j'étudiais chez les religieuses.
J'étais jeune.
J'étais en quatrième année, je pense.
Quatrième, cinquième, sixième.
Je prenais mes cours de piano après l'école.
Puis je leur disais, « Mais quand est-ce que je vais jouer du Chopin?
Puis ils étaient bien rigides, puis ils ont fait
« Tais-toi, fais tes gammes. »
Il faut faire ses gammes avant de passer à Chopin.
Mais je les ai faites, mais
c'est une gamme, que je suis à bout de faire des gammes.
Je trouvais ça plate, puis ça m'aurait motivée
au moins qu'ils me donnent une pièce.
Je m'en fous de la polonaise de Chopin.
Je le sais que c'est compliqué, la polonaise.
Mais je peux-tu l'essayer? Ça va me motiver.
Puis je vous jure, dans six mois,
ça sera pas la perfection, mais vous en viendrez pas
de ce que je vais faire. Juste parce que
c'est ça, ma motivation.
Il s'appelle Chopin. Merci.
Bonsoir. Puis ils n'ont jamais voulu.
Puis là encore, je disais à ma mère, ça ne me tente plus.
Je ne veux plus aller là.
Je ne suis plus des cours de piano, ça ne m'intéresse plus.
Je ne suis plus retournée.
Je me souviens qu'au début du secondaire,
il fallait choisir
des concentrations musiques,
arts plastiques,
machin. Moi, je voulais tout faire.
Je voulais faire la musique,
mais je voulais faire tous les instruments.
Je voulais faire des arts plastiques.
J'ai commencé en musique
et
je les ai toutes essayées.
La trompette, le corps français, le trombone à coulisses,
la flûte traversière, le hautbois,
la clarinette.
Qu'est-ce que j'ai essayé aussi?
Et plus tard, j'ai pris
des cours de batterie.
De batterie? Oui, c'est arrivé plus tard.
C'était mon rêve de jouer de la batterie aussi.
C'est ça, là.
Mais je veux tout faire à la perfection.
Sinon, ça ne m'intéresse pas.
Ça ne m'intéresse pas d'être une ticoune de la batterie.
Ça aussi, j'ai suivi des cours avec un maître.
C'était un grand, grand,
un grand percussionniste,
un grand joueur de batterie, de jazz.
C'était qui?
Un Américain qui s'appelait Pete Magadini,
qui était tombé amoureuse d'une fille de ma classe
au conservatoire.
Il était venu donner un concert avec, je ne sais pas,
une vedette du monde du jazz.
Je ne sais pas si c'était Al Jarreau.
OK.
Quand même.
Oui, il en a fait, puis il en a fait d'autres.
C'était un grand, grand musicien.
Et il est tombé amoureux d'elle.
Il a tout laissé
tomber. Puis il est venu habiter à Montréal.
Mais à Montréal, il n'y avait pas
de contrat comme il y en avait à New York ou à Los Angeles.
Fait qu'il a commencé à donner
des cours. Puis moi, j'avais dit,
c'est ça que tu m'en donnes. Et le pauvre,
le pauvre, il perdait tout son temps avec moi.
Ça allait.
Les deux mains, ça allait. Une jambe,
deux mains, ça va. Mais là jambe, deux mains, ça va.
Mais là, deux jambes, deux mains, tout fout le camp.
Les quatre membres sont sollicités, effectivement.
Là, je fais non.
Parce que je me promenais.
Je parle beaucoup.
Je pensais à ma journée avec des baguettes.
Je pensais à ma journée avec des baguettes.
Puis je faisais... Je jouais avec mes baguettes.
Au bout d'un mois J'étais bonne
Y'avait pas de problème avec la cymbale
Mais c'est ça
Pendant que tu nous racontes ça
Tu mimes la batterie présentement
Puis c'est drôle parce qu'il y en a une dans mon champ de vision
De l'autre côté de la vitre
Tantôt tu pourras nous faire un petit souvenir
Non mais ça fait
Écoute j'avais 20 ans à ce moment-là
Ça fait un bout
Mais pourquoi est-ce qu'il faut que tout soit parfait
dès le départ?
C'est pour mon oreille.
C'est pour me satisfaire, moi.
Puis je vais travailler.
Ça me dérange pas de travailler 10 fois plus
en dehors des heures de cours.
Je vais le faire,
mais donnez-moi la chance d'avoir un instrument. Passez-moi une batter cours, je vais le faire, mais donnez-moi la chance d'avoir un instrument.
Passez-moi une batterie, je vais le faire.
Donnez-moi un piano, je vais le faire.
Mais il faut que la maison soit vide.
Il ne faut pas que je casse les pieds à personne.
C'est ça aussi, je ne veux pas déranger tout le monde.
Je ne veux pas qu'on m'entende.
Je veux le faire toute seule.
Je veux me péter la gueule toute seule.
Probablement parce que je suis orgueilleuse.
Je ne vois pas.
Ça doit être ça. Et pourtant,
il y a ça aussi quand je suis
en répétition, en théâtre. J'aime pas trop
avoir l'air fou
devant les gens, mais
on dirait qu'en vieillissant, c'est
moins présent, cette affaire-là.
Mais tout ne doit pas être parfait à la première lecture d'un texte.
Non, mais le... Non,
non, mais c'est le fun
qu'on soit un petit peu
au-dessus de la base.
Un peu au-dessus
de ce à quoi
on s'attend de nous-mêmes.
Tant qu'à se dépasser,
commençons maintenant. Essayons, au moins.
Sinon, c'est plate, la vie.
Mettez ça sur un T-shirt, s'il vous plaît.
Tant qu'à se dépasser, commençons maintenant. J'aime ça. Non, mais c'est plate, la vie. Mettez ça sur un T-shirt, s'il vous plaît. Non, mais... Tant qu'à se dépasser, commençons maintenant.
J'aime ça. Non, mais c'est beau pour moi.
C'est avec des petits détails, je sais pas.
C'est peut-être...
Ça peut avoir l'air prétentieux, mais c'en est pas.
C'est vraiment pas de la prétention.
C'est...
C'est de l'exigence envers toi-même?
Bien, c'est un passe-temps en même temps.
Tu sais, avoir un résultat,
c'est bien de voir...
Tu sais, comme quand tu t'entraînes
puis tu commences à faire beaucoup d'exercices,
puis c'est le fun de voir ton corps changer.
C'est le fun de voir que le mouvement est plus facile,
que tes épaules sont au bon endroit,
ton bassin est à la bonne place,
tu bouges de la bonne façon.
Moi, j'ai recommencé à faire du pilates
depuis quelques temps, place, tu bouges de la bonne façon. Moi, j'ai recommencé à faire du pilates depuis
quelques temps, puis
je vois que mon corps
ne se place plus de la même façon.
Il y a des maux de dos que j'avais, que j'ai
pu. Je vois une différence.
Mais c'est sûr que
si je commence à voir une différence au bout
de six mois, bien là,
là, non. C'est long. C'est long,
c'est plate, il il se passe rien, je vais
décrocher à un moment donné.
Je veux pas nécessairement qu'il y ait
une amélioration au bout de 24 heures,
mais au bout de 48,
oui, ça me ferait plaisir de voir qu'il y a
une petite amélioration. Puis,
oui, souvent au bout de 48 heures,
elle est peut-être perceptible que pour moi,
mais ça me suffit.
J'ai pas besoin que les autres le remarquent.
Si moi, je le sais, ça va.
J'ai lu une entrevue que t'as accordée en 1990.
Ça fait quelques années.
C'était à l'occasion de la présentation
du spectacle Les lettres de la religieuse portugaise.
C'est un texte du 17e siècle.
Des lettres très, très chargées,
très intenses, d'une religieuse...
Une peine d'amour, en fait.ieuse qui s'adresse à un
officier français qui l'a séduite, mais
qui est parti trop vite.
Qui est parti trop vite, mais lui, il était
de passage, il était à l'armée, il était au
Portugal. Bon, il l'a séduite.
Il s'en fout. Peut-être pas,
mais dans ce temps-là,
elle, elle pense qu'il s'en fout, mais
c'est cinq lettres d'amour, c'est cinq lettres de
radotage, où elle fait semblant d'aller bien, elle... C'est cinq lettres d'amour, c'est cinq lettres de radotage où elle fait semblant
d'aller bien.
Elle a l'air détachée et en une fraction
de seconde, elle l'engueule.
Elle est à terre sur le plancher.
Elle est une loque.
Elle se recompose une espèce de
petite contenance
et elle lui en écrit une autre.
Et
elle commence en l'engueulant.
Après ça, elle lui demande pardon.
C'est toutes les contradictions de l'être humain.
Tout ce qu'on fait quand on est désespéré.
Tu dis dans cette entrevue-là que pendant deux ans,
à chaque jour, tu as lu les lettres de la religieuse portugaise.
Qu'est-ce que ça nous dit, ça, sur la Anne d'Orval
d'une trentaine d'années?
C'est un peu troublant, il me semble, comme avance.
Bien non, mais c'était mon livre de chevet.
C'était...
J'essayais peut-être de trouver d'autres...
Tous les soirs, tu sais,
c'est vrai que je lisais au moins une lettre tous les soirs,
mais des fois, je pouvais laisser niaiser ça
trois, quatre jours, puis le reprendre,
parce que c'est là aussi que le travail se fait.
C'est dans le silence.
Puis c'est quand on laisse un texte de côté
puis qu'il continue à vivre en nous.
Puis qu'il continue à...
Et nous, on se transforme, on s'en rend pas compte.
Mais on n'est plus la même personne
que quatre jours avant.
Il y a des choses qui se passent dans nos vies
qui font qu'on change.
C'est presque imperceptible, mais c'est là quand même.
Et oui, c'est presque imperceptible, mais c'est là quand même. Et oui, c'est un personnage
que...
que je comprenais peut-être
un peu aussi de l'intérieur.
C'est un
personnage
excessif, mais c'est un
comportement que j'ai vu
chez des amis à moi,
que j'ai observé,
que... Ça me fascine jusqu'où vu chez des amis à moi, que j'ai observé.
Et ça me fascine jusqu'où on peut aller dans l'autodestruction aussi
et où on peut aller dans les mensonges
qu'on peut se raconter par survie, parfois,
parce que la réalité est trop difficile.
C'est pour ça que j'aime faire ce métier-là aussi.
Observer, essayer de comprendre la vie des autres.
Peut-être pour mieux comprendre la mienne,
éventuellement, parce qu'il y a toujours
des parallèles à faire avec nos propres vies,
mais ça me fascine, ça.
Déjà que
je trouve ça plate
que notre vie puisse pas être
une répétition, qu'on puisse pas en avoir
plusieurs pour pas recommencer
les gaffes qu'on a déjà faites.
Au moins, en jouant,
ça nous donne
la chance d'observer un petit peu,
pas juste d'observer,
d'avoir
d'autres vies.
Chica, un de tes films préférés, c'est
La nuit américaine, de Truffaut.
Oui, j'ai dit ça en entremets.
Il y en a beaucoup.
J'aurais pu répondre à autre chose.
J'aurais pu répondre à Le Batif.
J'aurais pu répondre à des films d'Hitchcock.
Des films de Bergman.
Mais oui, j'aime ce film.
Dans La Nuit américaine,
Truffaut pose la question d'une certaine manière.
Est-ce que les faux-semblants,
est-ce que les artifices du cinéma
sont plus vrais que la vérité de la vie? Qu'est-ce que les faux semblants, est-ce que les artifices du cinéma sont plus vrais que la vérité de la vie?
Qu'est-ce que tu réponds?
Est-ce que tu vis plus intensément
lorsque tu tournes ou lorsque tu trouves sur scène?
Non?
Non.
C'est un cliché.
Je vis intensément.
Bon, je suis quelqu'un d'intense,
mais je suis capable d'avoir un certain recul aussi sur moi
et je suis capable d'en rire. J'ai un grand, grand, grand sens d'avoir un certain recul aussi sur moi. Je suis capable d'en rire.
J'ai un grand, grand, grand sens de taux d'érision, moi.
Et puis, ça m'a sauvée de bien des choses.
Puis, j'adore les gens qui ont un sens de taux d'érision aussi.
Je n'aime pas trop les gens qui se prennent au sérieux dans ce métier-là.
Est-ce qu'il y en a beaucoup?
Oui.
Oui.
Mais dans la vie, en général, il y a des gens qui se prennent au sérieux. Dans métier-là. Est-ce qu'il y en a beaucoup? Oui. Mais dans la vie en général,
il y a des gens qui se prennent au sérieux.
Des gens qui se regardent jouer,
il y a des gens qui s'écoutent parler,
il y a des gens qui se trouvent bons,
il y a des gens qui se pètent les bretelles.
Puis on a juste envie de les brasser.
On espère que la vie va les humilier à un moment donné, puis ça va arriver.
La vie finit toujours.
On a toujours des moments d'humiliation.
Bon, c'est comme ça.
Tant mieux, dans un sens.
Ça nous ramène
à notre petitesse.
À notre agilité.
On est égaux.
On l'oublie souvent,
mais M. Trump,
il va mourir à un moment donné.
Puis,
ça va être fini pour lui comme pour les autres.
Puis on va...
Peut-être qu'il va se faire
embaumer, puis il y a quelqu'un qui va le voir tout nu.
Puis, c'est pas au bout de suite,
cette affaire-là.
Puis, ça va être ça. Il va avoir son moment
d'humiliation. Je splatte
qui, bon, il n'en sera pas conscient.
Mais, ouais,
on finit tous par être humiliés un jour ou l'autre.
Fait que,
c'était quoi donc la question?
C'était de dire, est-ce que le cinéma...
Tu te demandais si tu vivais plus intensément lorsque tu tournes ou lorsque tu te trouves sur scène
qu'au quotidien?
Non.
Tout est intense.
Puis je pense que la vérité, elle est partout.
C'est pas parce que... Moi, j'ai souvent
entendu ça, ben oui, les acteurs, c'est des mentors professionnels.
Ça, ça me tue.
Moi, j'aurais dit le contraire, que les acteurs,
c'est des êtres de vérité.
Bien oui, c'est des gens qui cherchent la vérité, oui.
Mais...
Tu sais, il y a des gens qui vont être capables
de mentir dans la vie, puis de faire des coups au téléphone.
Puis ça, ça m'a toujours bien, bien impressionné, moi.
Les insolences d'un téléphone.
Bien oui, des affaires de main.
Moi, ça, je serais incapable.
On salue Tex Lecord.
Hé, mon Dieu.
Mais plein d'autres mondes.
Moi, quand j'étais adolescente, on avait des parties des fois.
Puis il y a des gens qui faisaient des coups au téléphone
puis qui faisaient venir une pizza chez le voisin d'à côté.
Puis je me disais, ah, mon Dieu,
j'étais sur le bord de perdre connaissance.
Je ne voulais pas être dans cette pièce-là.
Je ne voulais pas vivre ça.
Je ne voulais pas qu'il fasse ça.
Ça me mettait... Puis ça, faire semblant,
abuser de la confiance de quelqu'un,
j'ai du mal avec ça.
Je peux rire sur le coup,
mais j'ai du mal avec ça.
Et pour moi, la droiture,
elle commence là aussi.
C'est important. La droiture. Ça commence par le... Pas la rigid coup, mais j'ai du mal avec ça. Et pour moi, la droiture, elle commence là aussi. C'est important.
La droiture.
Pas la rigidité, mais la droiture.
Ne pas faire livrer une pizza chez le voisin.
Oui.
Parce qu'il y a quelque chose d'égocentrique,
de trop égocentrique.
J'aime pas ça, les gens
qui sont égocentriques, en fait.
Puis je trouve qu'on a tout à gagner.
Ça veut dire que je le suis pas. J'ai pas ça, les gens qui sont égocentriques, en fait. Puis je trouve qu'on a tout à gagner. Ça veut pas dire que je le suis pas.
J'ai mes moments d'égocentricité aussi,
puis d'égoïsme, puis oui.
Mais je pense que c'est important
de développer notre empathie.
Puis le métier qu'on fait,
c'est un bon exercice pour ça.
Développer notre empathie.
Puis je pense que
si t'apprends pas à être
de plus en plus empathique
en faisant ce métier-là,
tu ne seras jamais
l'acteur ou l'actrice
que tu voudrais être.
Je ne pense pas que tu puisses
penser un jour
toucher à quelque chose de plus grand
que toi. Je pense que ce n'est pas possible.
Ça prend cet abandon-là, ça prend
cette volonté de
vouloir comprendre
comment une autre personne peut se sentir
dans telle situation.
Une personne que tu ne connais
pas du tout et qui n'est pas du tout comme toi.
C'est ça, c'est cette vérité-là
qu'il faut creuser.
C'est vers ça qu'il faut aller.
Quand on joue au cinéma,
au théâtre, n'importe où,
il y a des grands moments
de vérité. Au cinéma,
ce qui est compliqué, c'est qu'on se voit après.
Contrairement au théâtre, on ne se voit pas.
Mais au cinéma, on se voit
et ça peut être dur.
Et ça, ça peut faire
qu'on va changer notre jeu.
On regarde l'éclairage et puis on fait, c'est pas vrai
que je vais avoir cet éclairage-là. Puis en même temps,
si on pense toujours
à l'éclairage, bien, on peut pas s'abandonner.
On n'a pas l'impression
dans un film comme Mamie que
tu ne t'es pas abandonnée. Je me suis abandonnée,
mais c'est André Turpin.
Il y a ça aussi. Ça prend un bon directeur photo.
Ça prend un bon directeur. Ça prend des gens
en qui t' as totalement confiance,
qui ne te le trompent pas à tomber.
Puis Xavier a ces mêmes exigences-là aussi.
Puis il connaît mes exigences.
Ça fait qu'il ne va pas me saboter.
C'est vrai qu'on manque de temps des fois.
Mais il y a ce goût-là.
Il y a cette obsession-là aussi.
La beauté d'une image,
c'est de la photographie, du cinéma aussi, avant tout.
Donc il faut que tu aies envie de filmer ton sujet,
même s'il n'est pas parfait.
Mais André, oui, c'est un grand, grand directeur photo.
Puis, il n'est pas le seul, là.
Mais il m'a connue beaucoup à travers ce film-là aussi, je pense.
Puis après ça, quand on a retourné ensemble.
Tu sais, c'est ça, travailler avec une équipe longtemps,
c'est le fun parce qu'ils te connaissent.
Ils connaissent ton grain de peau.
Ils connaissent ton ossature. Ils savent
comment te filmer aussi, d'une certaine façon.
Ça fait que
oui, on se regarde moins et on s'abandonne.
C'est plus facile de s'abandonner.
Qu'est-ce que tu avais en commun avec cette femme-là,
avec ce personnage-là, Diane, dans Mamie,
alors que tu es l'incarnation même du raffinement
et qu'elle est l'incarnation d'autres choses?
Oui, d'autres choses.
Mon Dieu, c'est très, très loin de moi, évidemment.
C'est peut-être sa résilience.
C'est un mot qui est bien à la mode,
qu'on a entendu beaucoup, mais...
Qui désigne une réalité humaine qui existe pour vrai.
Je pense que c'est une combattante.
Puis moi, je suis une combattante aussi.
De quelle manière?
On a tous
des accidents de parcours dans la vie
qui nous ont plus ou moins marqués.
Je ne veux pas m'étendre là-dessus,
parce que je n'aime pas trop parler de ça.
Mais on a tous des moments
de...
Il y a des moments charnières
dans nos vies
qui changent le cours des choses.
On n'est plus la même personne.
Et il faut faire avec.
Il faut faire le deuil
de certaines choses.
Et ces deuils-là,
qui sont inévitables,
mais qui sont...
Quand on réalise que notre vie ne sera plus jamais la même
à cause d'un événement stupide
ou de plusieurs petits événements qui se sont accumulés,
ou bien on sombre,
puis on décide d'abandonner tout,
ou on se bat pour faire exister quand même le rêve qu'onandonner tout, où on se bat, pour faire exister quand même
le rêve qu'on avait au départ,
d'être heureux,
ou de s'épanouir professionnellement.
Et moi, je suis de la deuxième catégorie.
Moi, je lâche pas le morceau, en fait.
Je lâche pas le morceau.
Puis c'est peut-être de là aussi mon exigence,
c'est que j'ai dû comprendre très jeune que
ça allait pas être
si simple. Mais c'est
simple pour personne, en fait. Pas plus pour moi
que pour d'autres, mais...
Il y a des gens pour qui c'est sans doute un petit peu plus facile.
Oui. Puis il y en a pour qui
c'est plus difficile aussi.
On est une petite vie
que la nôtre.
Si on la compare à ceux qui sont à Gaza
en ce moment, mon Dieu,
on n'a rien connu comme souffrance.
C'est sûr.
Il y a tout ça aussi.
C'est bien de relativiser un peu.
Est-ce que tu accepterais, Anne,
de m'entraîner dans les coulisses
d'une de mes scènes préférées du cinéma québécois?
C'est dans «Mami», la scène où vous dansez tous les trois,
c'est-à-dire toi, Antoine...
Oh, Suzanne, et puis...
Oui, Antoine Pilon-Larose, Suzanne Clément,
au son de «On ne change pas», de Céline Dion.
Antoine, qui est complètement possédé par la chanson,
puis Suzanne, qui se laisse peu à peu gagner.
Oui, c'était un beau moment.
C'était un très, très beau moment.
C'est drôle parce que cette scène-là, on l'a tournée, je pense que c'était un très, très beau moment. C'est drôle parce que c'était... On a tourné...
Je pense que c'était un vendredi soir.
C'était la fin de la première semaine de tournage.
C'était une grosse, grosse scène.
Elle était compliquée.
On avait du retard.
On était déjà en heure supplémentaire.
Et puis après l'avoir faite,
je me souviens de la réaction de Xavier
qui a sauté de joie, qui criait. Il dit, j'ai ma scène,
je l'ai, je l'ai,
j'ai mon plan. Puis il était
tellement heureux. Puis
je me souviens du visage de tout le monde,
d'André, du
premier assistant, de tout le monde,
de Nathalie,
la script,
le bonheur.
Et on était tous
au même endroit.
Et on se regardait, Antoine, Suzanne et moi,
puis on avait l'impression de...
Oui, pas de créer un moment important,
mais on savait pas si le film se pouvait ou pas,
si ça allait être bon ou pas,
mais on était...
On était contentes de ce qui venait de se passer.
C'est comme si tout le film, ou presque,
se trouvait contenu dans cette scène-là.
Ben, oui.
Tout le film. Tout ce que...
Beaucoup de la relation, du moins.
Tout ce que ces vies-là auraient pu être.
Oui.
S'ils étaient restés ensemble.
Mais ils sont tous séparés.
Ils sont tous séparés.
C'est ça qui est triste.
Mais oui, c'était une belle prémisse quand même.
C'était un beau début de tournage.
Puis c'est impossible d'entendre cette chanson-là maintenant
sans avoir ces images-là dans la tête.
Pour moi, en tout cas, oui.
Comme la chanson de Lana Del Rey aussi,
à la fin du film Born to Die.
Ça me ramène à ça.
Je l'ai vue cet été en show, Lana Del Rey.
Elle a chanté...
T'étais là à Québec, oui.
Elle a chanté ça, Born to Die.
Mon Dieu, ça m'a ramenée
à Cannes.
C'était une telle émotion
tout à coup.
Ça m'a remuée quand même.
Qu'est-ce qui se passait dans ton corps
et dans ta tête à Cannes
pendant les 12 minutes durant lesquelles
le public vous a applaudi,
Xavier, toi, les autres membres de la distribution?
Bien, honnêtement,
j'étais droguée.
Parce que j'étais tellement traquée
avant la montée des marches
que Xavier m'avait donné
un petit comprimé
qu'il prenait lui-même pour se calmer.
Mais on n'a pas le même poids,
Xavier et moi, donc...
Déjà, il aurait dû me donner un demi-comprimé.
En fait, il avait commencé par un demi-comprimé.
Puis au bout de 20 minutes,
il m'a dit, ça marche-tu?
Je lui ai dit, je ne sens pas grand-chose, mais bon...
Non, non, non, ça ne fera pas effet, alors prends un autre.
Un lativer?
Non, c'était... Alors, je ne me souviens plus du... Non, non, non, c fera pas effet, alors prends un autre. Un nativant? Non, c'était plus fort que ça.
Et je pense qu'il m'a donné
un comprimé entier.
Et là, je suis devenue beaucoup trop de bonne humeur.
Et je me souviens
de pas grand-chose.
Je me souviens pas d'avoir vu le film.
Ma fille,
qui était à Londres à ce moment-là,
elle passait l'année à Londres. Puis elle était venue
me rejoindre à Cannes.
Donc elle était
derrière moi. Ça, je me souviens de son visage.
Je me souviens d'elle qui pleurait
et qui était complètement émue.
Puis j'étais contente de partager ça avec elle.
C'était quand même...
Mais c'est surtout de son visage à elle
que je me souviens.
Puis après ça, on avait un party. Je me souviens, oui, mais je me souviens pas de tous les détails. Je me souviens. Puis après ça, on avait un party.
Je me souviens, oui, mais je me souviens pas
de tous les détails, non. Je me souviens pas d'avoir vu le film.
En tout cas, je me souviens que pendant tout le film,
je regardais plus les gens autour.
Je regardais les gens réagir,
les acteurs qui m'impressionnaient,
qui étaient assez autour.
Est-ce qu'il y a une partie de toi
qui a hésité à accepter le rôle
dans J'ai tué ma mère? Parce que Xavier Dolan, aujourd'hui,
il est canonisé. C'est un grand...
Mais il est encore en vie, ça le dit.
Oui, oui. C'est un être humain
comme tout le monde, puis il y a des défauts.
Et ce film-là aurait pu être...
C'était son premier film avec un tout petit budget.
Ça aurait pu être un bit total.
Moi, honnêtement, quand on le faisait,
c'était tellement une équipe...
Ce n'était pas des gens qui avaient travaillé beaucoup non plus.
Ils n'étaient pas payés.
Ils étaient payés minimum.
Ils avaient accepté de le faire.
Tout le monde ne voulait pas faire ce film-là.
Il est allé frapper à plusieurs portes.
Il y a bien des gens qui ont dit non.
Il est allé, il est ici et là,
des amis, des amis d'amis
qui ont voulu l'aider à faire son premier film
plus pour l'encourager.
Alors moi, parfois, puis on n'avait pas beaucoup de temps,
donc je me disais, ça sortira jamais,
ce film-là.
Puis il avait essayé de trouver
des producteurs, ça marchait pas,
personne voulait.
Il n'y avait pas de distributeur non plus à ce moment-là,
donc ça sortira jamais.
Mais je me souvenais quand même de ma réaction
la première fois que j'avais lu ce scénario-là.
Et ce qui m'avait frappée,
c'était la profondeur du personnage de la mère,
à tel point que je ne pouvais pas croire
que c'est lui qui l'avait écrit.
Parce que souvent, les auteurs peuvent...
Tu sais, j'en lis, là, des scénarios,
j'en ai lu beaucoup,
ou des pièces, ou j'en ai lu beaucoup.
Ou des pièces, j'en ai vu.
Et c'est facile d'entendre la voix d'un auteur ou d'une autrice dans tous ses personnages.
D'entendre son discours,
ou le discours qu'il voudrait donner à ce personnage-là,
mais t'entends quand même sa voix.
T'entends son rythme.
T'entends...
Et on ne creuse jamais assez loin.
Puis tu te dis, mais pourquoi
je n'accroche pas parce que c'est bien écrit?
Parce que je ne peux pas m'attacher
au personnage, il n'y en a pas.
Ce personnage-là n'a pas de fond.
C'est des archétypes.
Même pas.
C'est juste la surface. Ce n'est même pas un archétypes. Même pas. C'est juste la surface.
C'est même pas un archétype encore.
On explore, mais ça reste en surface.
C'est pas intéressant.
C'est pas assez intéressant.
Ça pourrait être intéressant
si on s'y penchait à nouveau
et si on creusait pour vrai.
Si on passait des semaines
à observer des gens.
Oui. Et dans ce cas-là,
dans le cas où j'ai tué ma mère,
j'étais tellement impressionnée
par la qualité de son écriture, de ses dialogues,
même si, bon,
il y avait des erreurs, puis
on s'est reparlés, après ça, Xavier,
puis il venait à la maison,
puis on réécrivait des choses,
puis je disais ça, c'est trop long,
on va le voir, il a besoin de l'écrire. C'est pas nécessaire, il y a des silences qui sont importants, il y a des choses, puis je disais ça, c'est trop long, on va le voir, t'as pas besoin de l'écrire,
c'est pas nécessaire, il y a des silences
qui sont importants, il y a des choses que tu peux inverser,
ça, dans le rythme, ça marche pas,
ça, il y a une phrase de trop, c'est trop redondant,
c'est quatre fois la même joke, on n'est plus capable,
enlève ça.
Puis il écoutait, puis des fois, il était pas d'accord,
puis il disait non, ça, pour telle et telle raison,
je veux le garder, puis je disais, oui, t'as tout à fait raison.
Ça fait qu'on... Il y avait une réelle collaboration quand même.
Mais il y avait...
Il y avait cette vérité.
Il y avait chez ces personnages
une telle précision
dans ce qu'ils étaient profondément.
C'est même plus dans les répliques,
parce que des fois, des répliques peuvent avoir l'air
complètement anodines ou superficielles.
C'est pas ça qui est important.
C'est la façon, c'est ce que le personnage fait en le disant,
parce que son corps peut avoir un autre discours que ses mots.
C'est ça qui est intéressant.
C'est ça que je voyais dans ce scénario-là.
J'en revenais pas à l'âge qu'il avait d'avoir cette acuité-là.
C'est quand même fou d'avoir une relation
aussi complexe avec sa mère
et par ailleurs comprendre à ce point-là
ce que vit sa mère.
Oui, et la défendre autant.
L'humilier comme il l'a humilié
et la défendre avec autant de force
et d'acharnement.
Puis je l'ai souvent dit en entrevue,
tu sais, ce film-là, c'est quand même une lettre d'amour à sa mère.
Puis le personnage que je joue, c'est pas sa mère.
Sa mère, elle est pas comme ça.
Moi, je la connaissais pas, sa mère, à ce moment-là.
Donc, c'est une vision que j'avais du texte que je lisais,
mais c'est pas sa mère.
Sa mère, elle est pas comme ça. Parlons d'un grand moment de ta carrière, Anne. Ah, qu'est-ce que c'avais du texte que je lisais, mais c'est pas sa mère. Sa mère est pas comme ça.
Parlons d'un grand moment de ta carrière, Anne.
Ah, qu'est-ce que c'est?
En 2003, t'accordes une entrevue à Richard
Martineau au Franc-Tireur.
Vous parlez de la répartition des tâches au sein
du couple entre un homme et une femme.
Et le Martineau te crie
« Relaxé! »
Oui, mais il faisait ça par provocation aussi.
Il y avait beaucoup d'humour.
Richard Martineau, de la provocation, je tombe en bas de ma chaise.
Non, non, mais à ce moment-là, il n'était pas...
C'était pas le même Richard.
Non, non, non.
C'était un autre Richard.
C'était une autre personne, mais...
C'est un moment merveilleux.
Ariel Charest en a tiré un sketch fabuleux.
Est-ce que tu l'as vu?
J'en ai vu des bouts, mais ça me rappelle tellement de mauvais souvenirs.
De mauvais souvenirs?
Oui.
J'essayais d'y mettre
beaucoup d'humour.
Plusieurs ont vu l'humour que je mettais là-dedans.
Il semble que l'humour est manifeste.
Il y en a qui ne l'ont pas vu.
Il y avait des masculinistes qui avaient écrit.
J'avais croisé Richard Martineau à un moment donné.
Je ne sais pas où.
Lui, il trouvait ça drôle.
Ils ont reçu des lettres.
C'est hallucinant.
Il y a des masculinistes qui veulent te tuer.
Qui disent que c'est à cause des femmes comme toi
qu'il y a autant de problèmes avec les hommes et les femmes.
Et là, moi, j'ai pas besoin de ça dans la vie.
Évidemment.
Je veux pas...
Alors que tout ce que tu dis, c'est
pouvez-vous ramasser vos pantalons sales, s'il vous plaît,
puis faire du lavage une fois de temps en temps.
Je résume. Tu parles de charge mentale.
Oui, mais...
Puis ce qu'on entend souvent, oui, mais ça sera pas fait
comme vous voulez qu'on le fasse,
mais qu'on le fait plus. Puis c'est vrai que,
oui, j'ai pu être contrôlante,
mais apprenez à bien le faire.
C'est tout ce que je veux.
Parce que ça donne... Moi, j'ai eu des femmes de ménage
qui sont venues à un moment donné, ou des hommes de ménage,
puis je leur disais, non, ne faites surtout pas le lavage.
Puis, on veut vous aider, non?
Puis, il y en a une
qui l'a fait quand même.
Je venais de m'acheter une nappe en lin
en Italie.
Elle m'avait coûté la peau du cul.
Qui était ma nappe préférée.
C'était du plandard.
Mais elle a voulu m'aider.
Elle l'a mise au lavage.
À l'eau très, très chaude.
C'était violet et écru.
C'était une teinture artisanale.
Le violet a splaché partout.
La nappe était rose nanane
quand elle est sortie.
Elle avait rapetissé d'à peu près trois pieds.
Au lieu d'être une nappe
pour une table de huit personnes,
c'était un napkin.
J'étais tellement en colère.
Je rigole, mais je compatis.
Oui, que j'ai essayé de garder mon sang froid,
j'ai pas pu, puis elle est plus jamais revenue.
Ça, c'est la première fois qu'elle était venue chez moi, elle.
Alors, si vous voulez faire le lavage,
les amis, c'est ce que je vous encourage
à faire,
mettez pas
une chaussette rouge dans une brassée
de blanc à eau chaude.
On prend des notes à la maison.
Parce que tout ça va devenir rose. Et j'ai même ajouté ça
dans la crise au téléphone
quand j'ai tué ma mère.
Quand elle parle au directeur
et qu'elle rajoute ça.
Aimes-tu ça, toi?
Vous n'êtes même pas capable de
calisser... Qu'est-ce qu'elle disait?
De ne pas calisser vos bobettes rouges dans une
brassée de blanc.
T'aimes-tu ça, toi, des...
C'était quoi?
Je ne sais plus.
En tout cas, t'aimes-tu ça des...
des draps roses, toi, calisses? t'aimes-tu ça, des draps roses?
Oui, quand Alice...
J'avais rajouté ça.
J'avais improvisé un petit peu, puis j'avais rajouté
cette affaire-là parce que ça m'est arrivé.
Et...
Mais ce que ça veut dire, parce que ce moment de télé-là
est merveilleux parce que c'est un moment
comique, mais aussi d'une grande vérité.
Vous avez une vraie conversation.
Même si Martineau donne dans la provocation un peu.
Tout ce que j'ai dit, je le pensais.
J'ai juste mis un peu d'exagération
pour que ça soit pas trop lourd.
Les femmes ont trouvé ça très, très drôle
et les gars, pas du tout.
Ça veut dire qu'il y a un prix à payer
lorsqu'on dit la vérité.
Parce que des moments de vérité comme ça,
à la télé, on en voit très, très peu.
Oui. C'était une écœurantité aiguë.
J'étais très, très fatiguée.
J'étais fatiguée, mon Dieu.
Mon Dieu que j'étais fatiguée.
Oui, je tournais tous les jours dans une quotidienne.
Puis,
c'est ça. Mes deux enfants étaient là.
Je faisais le lavage.
Je faisais la bouffe.
Donc, c'est moi qui faisais l'épicerie, puisque je fais la bouffe.
C'était tout ça.
Je ne pense pas que c'était de la mauvaise volonté
du père de mes enfants.
C'est vrai que j'étais contrôlante.
On n'avait pas de temps.
Il fallait bien faire et vite.
Si tu n'es pas rapide, tu le pitons.
Laisse faire.
C'est ça aussi.
Il faut apprendre à être vite
et bien faire les choses.
Quand on a des enfants, c'est le même. Il m'arrive de vite puis bien faire les choses. C'est tout ça.
Quand on a des enfants, c'est le même.
Il m'arrive de répondre à ma blonde,
oui, je vais le faire,
mais de moins de demi-heure,
de moins une heure.
Mais il faut que ça se passe, là.
Bien oui, il faut que ça se passe.
Puis c'est parce qu'en une heure,
si t'es juste capable de laver deux têtes d'oreiller,
bien, la blonde va avoir le temps de faire passer l'aspirateur,
faire la soupe,
changer la couche.
Aller au dépanneur
chercher une peine de lait
parce qu'il n'en a plus.
Aller jouer avec l'enfant au parc.
Puis il y a tout ça.
Aller chercher un cadeau
pour la fête d'enfants
à laquelle il est convié en fin de semaine.
Il y a tout ça. Répondre au téléphone.
Payer des comptes.
Organiser.
Organiser les prochaines vacances.
Tout ça.
Elle est capable de le faire en une heure
parce qu'elle s'est pratiquée
longtemps.
C'est juste ça.
C'est sûr qu'à un moment donné,
on se dit, bon, malouf,
je viens de faire beaucoup de choses en 5 minutes.
Je pense que je vais faire le reste.
Parlons d'un autre moment mémorable d'entrevue.
Ah, voyons, j'en ai donc bien fait.
Celui-là, c'est en 2014.
T'es sur le plateau d'On n'est pas couché pour faire la promotion
du film Mamie. Puis Éric Zemmour
est là lui pour dire que l'homosexualité, c'est
mal. Je résume, mais c'est à peu près ça, la
teneur de son propos.
Il était complètement ahuri.
J'en perds mes pinces à cheveux.
Bien, j'en perdais mes pinces à cheveux. Je me suis
tellement énervée que ça tombait de partout. Je fais
voyons, il y a une pluie de
pinces à cheveux ici. Est-ce que vous vous êtes reparlé
en coulisses ou ce qu'on voit, ce qui a été filmé?
Il est parti tout de suite. Mais ce qui est filmé,
en fait, c'est que ces grands plateaux-là,
en France, on arrive
à 18h,
genre, et
on peut pas sortir. Et eux, ils finissent pas
à 11h le soir, le tournage.
Ils sont sortis de là à 3h du matin.
On a terminé à 2h du matin.
Et on est tous
pris en otage. On peut pas s'en aller.
Et moi, Xavier avait déjà d'autres entrevues ailleurs, donc il était venu me rejoindre plus
tard. Mais moi, quand j'ai commencé, j'étais toute seule avec mon agente, Marie-Claude Goodwin,
qui était là. Puis c'est tout. Je ne connaissais pas personne. Puis il n'y a pas grand monde qui
sont venus nous parler. Laurent Ruquier est venu me dire bonjour comme ça, très gentil,
mais sans plus. Puis,
j'ai raconté souvent cette affaire-là,
mais j'étais
très, très nerveuse
parce que, bon,
il y avait, toujours
à cette émission-là, il y a deux personnes
qui vont critiquer live devant toi.
Zemmour et Nolo.
Ben, Zemmour a déjà été dans ce siège-là.
Et la fois
où je suis allée, c'était
Émeric Caron et
cette femme...
Est-ce que c'est Léa Salamé?
Oui, c'était Léa Salamé, exactement.
Et
je suis nerveuse et
Zemmour vient me voir.
C'est le seul qui est venu me voir.
Et moi, je le connaissais pas.
Je le connaissais pour
l'avoir vu avec Thierry
Ardisson dans un autre
format. Je le trouvais un petit
peu... Il m'énervait beaucoup.
Des fois. Mais
j'avais pas tant vu.
Alors, il vient me voir, puis il fait
avec beaucoup, beaucoup
d'empathie, de gentillesse et de bienveillance.
Il me dit, je vois que vous êtes nerveuse.
Je sais que vous n'avez pas l'habitude,
peut-être, des plateaux français,
mais je veux juste vous dire,
vous n'avez pas à vous en faire.
Moi-même, j'ai déjà été
dans le siège des critiques,
puis je sais que ça peut être insupportable
pour les gens qui se font critiquer,
mais dans ce cas-là, je les ai entendus tout à l'heure
et ils ont adoré votre film.
Donc, arrêtez de vous en faire pour rien.
Ils ont vraiment aimé le film.
Puis là, il était gentil.
Il me met sur la main, sur l'épaule.
Beaucoup de bienveillance.
Beaucoup de bienveillance.
Et c'est le seul qui a fait ça.
Alors, je me suis dit, mon Dieu, mais il est donc bien fin.
Puis oui, ça m'a fait du bien.
Puis ça m'a calmée un peu.
Et là, le show commence.
J'arrive.
Et il part, lui.
Puis là, je fais, mais voyons, c'est pas la même personne.
Mais en même temps, je suis nerveuse aussi.
Je suis nerveuse parce que je ne peux pas sortir de là.
Je ne connais personne.
Xavier n'est pas là.
Mon agent, je ne peux pas y parler.
Je ne peux même pas me lever aux pauses.
Je ne peux pas se lever.
Et ça repose sur tes épaules de relever la teneur?
Non, ce n'est pas que ça repose sur mes épaules.
Le Kodak n'est pas sur moi.
Je l'écoute parler et je me dis,
voyons, il est-tu tombé sur la tête?
Mais moi, je ne me rends pas compte souvent
de ce que ma face dit.
J'ai l'impression d'être complètement impassible.
Vraiment, dans ma tête, je suis impassible.
Tout ça se passe dans mon cerveau.
Ton visage est très parlant.
C'est ça.
Tout le monde le voit.
Laurent Ruquier me voit.
Il y a un montage dans ces shows-là.
Il a tout coupé ça.
Il me dit, Anne, je vois que vous avez quelque chose à dire. »
Puis avant ça,
il y avait une petite chanteuse,
une jeune chanteuse qui était là,
il lui a demandé,
puis elle a fait,
« Non, non, moi je veux pas,
je veux pas m'en mêler. »
Ça fait qu'ils ont coupé ça au montage.
Tout ce qu'il voit, c'est moi.
Et j'ai dit,
« Bien, je peux pas croire ce que j'entends,
mais ça sous-entendait aussi.
Je peux pas croire ce que j'entends, mais ça sous-entendait aussi. Je ne peux pas croire
que cette personne-là
est venue avec tellement de bienveillance
et d'ouverture d'esprit
me faire un petit câlin
et avait cette conscience
des autres
et que là, il n'y en a plus du tout.
Et qu'il est en train de dire
que l'homosexualité est une maladie.
Je me souvient bien,
il disait même que c'était la faute des mères aussi,
qui couvaient trop, certainement,
qui couvaient trop leurs petits garçons
et qui en faisaient
des espèces
de petites fillettes
peureuses
et que ça donnait lieu
à de l'homosexualité.
Comme si c'était une maladie
ou quelque chose qui se développait avec le temps.
Ça nous dit, sur Zemmour,
que c'est une personne complexe
ou que c'est une personne perfide et hypocrite?
Non, je pense qu'une personne complexe.
Je pense que tout le monde est complexe.
Je pense que ça ne sert à rien de...
Je parlais de Trump tantôt. C'est sûr que
j'aimerais ça qu'il se fasse humilier
un peu plus souvent, mais
je pense qu'on n'est pas juste une affaire
dans la vie.
Je pense que Trump n'est pas totalement
inintelligent. Je pense que
probablement que c'est quelqu'un qui a été
traumatisé. Ça part toujours
de l'enfance qu'on a eue.
Et ça part de ce qu'on a comme tempérament aussi,
des forces qu'on a, de notre génétique,
de toutes sortes de facteurs.
Mais je pense qu'il y a beaucoup de choses
qui peuvent se guérir quand on est tout petit.
Et plus on est tout petit,
plus c'est peut-être facile à guérir.
Plus on attend, plus ça devient
complexe et
long à guérir. Puis
je pense que
au lieu de m'emporter,
ce qui aurait été bien,
c'est que je lui dise calmement
j'aimerais ça avoir une conversation avec vous.
Est-ce qu'on peut se parler?
Qu'est-ce que vous faites demain? Est-ce qu'on peut aller déjeuner vous. Est-ce qu'on peut se parler? Qu'est-ce que vous faites demain?
Est-ce qu'on peut aller déjeuner ensemble?
Est-ce qu'on peut...
Il fallait quand même que quelqu'un relève
la violence de ses propos.
Oui.
Et le mépris avec lequel il disait ça aussi.
C'était son ton aussi.
Sa suffisance.
Comme s'il était invincible et qu'il détenait la vérité.
C'est ça qui était choquant aussi.
Lui, il avait compris.
Oui.
C'est ça qui était choquant.
Mais ma réaction était complètement stupide
et j'avais honte de ça.
Je ne voulais pas qu'on m'en parle.
Le lendemain, tout...
Et là, je t'en reparle.
Non, mais tu m'en reparles.
J'ai eu des bons échos de ça.
Des gens qui étaient contents que je les ai défendus,
mais c'était même pas une défense,
c'était une semi-défense parce que j'étais nerveuse,
puis je vais juste crier toutes sortes d'affaires.
Ce qui aurait été bien, c'est que je me dépose
et que j'aille parler avec lui.
J'aurais aimé ça, lui parler.
Et lui poser des questions.
Puis qu'on ait une vraie discussion là-dessus.
Parce que oui, ça m'a piqué. Ça m'a enragée, et pour les des questions, puis qu'on ait une vraie discussion là-dessus. Parce que oui, ça m'a piqué.
Ça m'a enragé,
et pour les mères,
et pour toute la communauté LGBTQ+,
pour tous les gens
qui ne sont pas pareils comme les autres.
Ce qui inclut quand même pas mal de gens.
Ce qui inclut beaucoup, beaucoup de monde.
Beaucoup.
Bon, la prochaine fois qu'on se voit,
on évitera Éric Zemmour,
puis on aura une conversation.
Ou pas.
Marc Labrèche, ton ami,
je l'ai interviewé à quelques occasions,
puis à chacune de ces occasions-là,
j'ai pris soin de lui dire à quel point
il avait été important pour moi.
Puis c'est comme s'il ne l'entend pas.
Est-ce que tu penses que les compliments
se rendent jusqu'à lui, jusqu'à son cœur?
Bien sûr. Ça se rend tout le temps.
Oui.
Ça se rend tout le temps. C'est juste qu'il ne faut pas en faire de...
À partir du moment où c'est dit,
on dit merci,
mais si on accumule
tous ces petits commentaires
vraiment flatteurs,
puis qu'on y pense
sans arrêt,
ça ne nous fera pas avancer.
Ça va faire justement
comme bien des gens
dans ce métier-là, des gens
qui s'écoutent parler, puis qui se regardent jouer,
puis qui se regardent écrire,
puis qui se trouvent bons, puis qui se pètent les bretelles,
puis qui pensent qu'ils sont arrivés
quelque part, puis c'est ça que ça fait.
Ça fait des gens
inintéressants et plates
qui n'avancent plus.
Ça fait que c'est le fun, c'est flatteur,
mais ça reste là.
Et je sais
que Marc est exigeant envers lui-même aussi.
Je sais qu'il travaille fort
pour être prêt, pour être à l'heure,
pour bien faire ses devoirs.
Il n'y a pas d'autre façon d'entrevoir
le métier, pour moi
et pour lui, j'imagine.
Oui, je pense qu'il l'entend et ça lui fait très plaisir, mais ça ne sert à rien.
Comment tu réagis lorsque tu te trouves en présence d'une de ces personnes
qui s'écoute parler et qui est persuadée d'être arrivée à destination?
Je ne dis plus rien.
Je me tais et je change de pièce.
Ou je ris. des fois je ris
Par gêne, par malaise
Maintenant j'ai moins de patience
C'est sûr que je pense
J'ai des visages
Je nommerai pas, j'en ai en tête
C'est pas nécessaire que je te demande les noms
Non, je les nommerai pas
Je ferai jamais ça
Mais je m'arrangerai quand même pour qu'il sache.
Je ferais...
Ah non, pas ça.
Puis je m'en irais.
Mais il faudrait qu'il entende au moins mon commentaire.
Ah, je taboute.
Je m'en irais.
C'est lequel le plus grand moment de grâce
que tu as vécu avec Marc Labrèche?
Vous avez fait beaucoup de radio ensemble.
Vous avez fait, évidemment, Le coeur a ses raisons.
Et Les Bobos. Oui, Les Bobos, c'était le fun aussi. Vous avez fait beaucoup de radio ensemble. Vous avez fait, évidemment, Le coeur à ses raisons. Et Les Bobos.
Oui, Les Bobos, c'était le fun aussi.
Puis cette émission de radio qu'on a faite,
c'est le plus beau jour de ma vie, ça aussi.
Mais juste de l'avoir rencontrée.
C'est au Grand Blanc que vous vous êtes rencontrée?
Oui, bien en fait,
c'est bizarre comment c'est arrivé,
cette affaire-là.
Parce que c'est Dominique Chaloux
qui produisait
Le Grand Blanc, puis qui avait produit
La fin du monde est à 7h aussi.
Et qui planchait
sur ce projet
du Grand Blanc. C'était pas encore commencé.
Et
il m'avait appelée.
Je sais pas si c'est elle
qui avait appelé à l'agent, en tout cas.
Il voulait me rencontrer, Marc Brunet et Marc Labrèche
Marc Labrèche je l'avais croisé mais
sans plus, on avait jamais travaillé ensemble
et Dominique Chaloux m'avait vu
dans un party peu de temps avant
avec Francis Reddy justement
puis moi je le connaissais pas Dominique
et puis elle leur avait dit
écoutez cette fille là
faudrait l'avoir comme coniqueuse
elle est bien bien drôle.
C'est grâce à Dominique Chaloux, en fait,
qui m'avait vue dans ce party,
qu'ils ont voulu me rencontrer
pour une éventuelle collaboration,
pour faire une chronique
au Grand Blanc.
Oui, au Grand Blanc avec un chausson noir.
Et donc, j'ai fait cette chronique
du monde à bout,
qui a mis certains patrons à bout, à TVA. Ah oui? Donc, ils m' fait cette chronique du monde à bout, qui a mis certains patrons à bout à TVA.
Donc, ils m'ont indiqué la sortie parce qu'il était tanné.
Et là, Marc Brunet,
qui était un des idéateurs de la série
avec Richard Goyer, que je connaissais,
que j'aimais beaucoup aussi, et Marc Labrèche.
Marc Brunet a dit, regarde, je suis en train
d'écrire
une petite parodie de soap.
C'est un petit segment qui va durer 2-3 minutes.
Juste pour intégrer
notre invité du jour au lieu,
parce que Marc n'aime pas trop faire des entrevues conventionnelles.
Ça serait une façon d'intégrer
l'invité du jour.
On va mettre Stéphane Rousseau dans le sketch et ça sera réglé.
On va faire tout ça.
Alors, on avait fait ça, puis ça s'appelait Le cœur à ses raisons.
Puis c'est parti de là.
Et là, ça a été
pour Marc Brunet,
je pense aussi, de voir à quel point
on avait du plaisir ensemble, puis qu'on se relançait,
puis qu'on improvisait et tout,
puis que c'était facile.
Bien là, c'est là que ça a commencé.
Mais c'était déjà, c'est là que ça a commencé. Mais c'était déjà
un moment de grâce,
de les rencontrer, les deux ensemble,
Marc Brunet et Marc Labrèche.
Parce que je connaissais
Richard Goyer, qui était un des idéateurs,
mais je ne connaissais pas du tout Marc Brunet.
Puis là, il y a eu une espèce de complicité.
Mais pourquoi est-ce que les patrons
n'en pouvaient plus de ta chronique?
Parce que j'étais à bout.
J'étais à bout contre les écureuils qui mangeaient des poubelles, ça m'était arrivé.
J'étais à bout des petits signaux de stationnement un peu partout dans la ville de Montréal.
J'étais à bout de bien des choses.
Puis ça peut être agressant.
Puis c'est vrai que j'y allais...
Bien, c'était la chronique du monde à bout.
Ça fait que je faisais un personnage qui était à bout.
Mais oui, ça pouvait être agressant La longue
Parlons d'un sujet un petit peu moins comique
Celui du film
Quitter la nuit
Dans lequel tu as tourné
C'est un film qui porte sur
Le sujet des agressions sexuelles
Du viol
Puis toi là-dedans tu joues
Je joue la mère de l'agresseur.
Comment est-ce qu'on aborde un personnage
de ce genre-là?
Déjà, moi, en fait, j'ai connu Delphine
parce qu'elle avait fait un court-métrage
qui s'appelle Une soeur, qui a été aux Oscars
et qui était formidable, qui était extraordinaire.
Quitter la nuit est une sorte de version longue.
Quitter la nuit commence avec...
C'est exactement la même chose qu'elle a retournée. C'est son court-métrage. Et après ça, c'est exactement la même chose qu'elle a retourné.
C'est son court-métrage.
Et après ça, c'est la suite.
Et on est sur le bout de notre siège.
On est sur le bout de notre siège.
Moi, c'est comme ça que j'ai connu Delphine
parce qu'elle m'a appelée et tout ça.
Comment on l'aborde, en fait?
Je pense qu'on
questionne.
On cherche, puis on observe., on cherche, puis on observe,
puis on lit, puis on
imagine. C'est toujours la même chose
quand on aborde
un nouveau personnage.
Il faut qu'il soit intéressant,
puis je pense que Delphine elle-même est tellement
quelqu'un de brillant
et qui a fait sa
recherche, puis qu'il est la nuit en même temps.
C'est pas une dissertation sur
comment il faudrait
se comporter
à l'avenir avec les femmes. C'est pas ça du tout.
C'est deux êtres complexes
qu'on déteste
à certains moments, avec lesquels
on n'est pas d'accord. Le personnage,
je parle des deux personnages principaux,
le personnage de l'agressé
et le personnage de l'agresseur. Elle a beaucoup de compassion pour chacun, dans la mesure du possible, pour chacun deux personnages principaux, le personnage de l'agressé et le personnage de l'agresseur.
Elle a beaucoup de compassion dans la mesure du possible
pour chacun des personnages.
Oui, parce que ce sont des êtres humains complexes
qui ont vécu des choses.
À un moment donné, on ne veut pas,
mais oui, ça se peut
que le cerveau ne soit pas à la bonne place
à un moment donné et qu'on fasse des choses.
Donc, elle ne fait que montrer une situation
qui est complexe,
et les deux protagonistes principaux
qui ont des chemins complexes aussi, après,
qui sont pas nécessairement logiques,
qu'on ne comprend pas toujours,
mais qui font partie de l'équation aussi.
Et le personnage de la mère,
c'est un personnage qu'on aime
puis qu'on peut détester à certains moments aussi
parce que c'est un personnage qui se ferme les yeux.
Mais elle aussi, elle a un passé
avec lequel elle doit composer.
Et une mère aime son fils.
Mais c'est plus complexe que ça
parce qu'elle-même a des choses à guérir.
Puis les choses qu'on met sous le tapis toute notre vie,
à un moment donné, ça finit par nous rattraper.
Et si on n'est pas guéri de quelque chose,
bien, ça se peut que le couvercle saute plus tard dans sa vie
si on revit une situation semblable.
Donc oui, c'est une mère qui pense qu'il aime de la bonne façon,
mais non, comme tous les personnages.
Il pense qu'il se conduise de la bonne façon, mais non. Comme tous les personnages, ils pensent qu'ils se conduisent de la bonne façon,
mais pas nécessairement.
Et Delphine,
elle ne les condamne pas. Elle ne fait que
nous faire réfléchir. Elle ne fait qu'exposer une situation
et nous faire
nous poser la question.
C'est quoi l'idéal?
Comment on réagirait?
Qu'est-ce qu'on doit répondre à ça?
Parce que le personnage de l'agresseur
à la fin,
je dévoile pas de punch non plus,
c'est l'histoire d'un procès aussi,
c'est l'histoire d'un long cheminement, mais
il essaie, comme bien
des agresseurs,
de demander pardon
et d'attendre
le pardon instantané
de l'agressé. Et ça...
C'est rarement possible.
C'est pas possible.
Et c'est pas comme ça que tu vas obtenir un salut.
C'est pas comme ça que tu vas te guérir de ton mal-être.
C'est pas juste en ayant le pardon de quelqu'un.
Il faut que tu te reconstruises toi-même.
Et c'est normal que la porte reste fermée.
Et peut-être qu' la porte reste fermée.
Et peut-être qu'elle va rester fermée toute sa vie.
La porte de l'agressé, je parle.
Peut-être qu'elle ne voudra plus jamais reparler à cet agresseur-là.
Peut-être qu'elle ne lui accordera jamais son pardon.
Ce n'est pas grave.
Ce qu'il faut, c'est soi.
C'est se guérir soi pour que la Terre tourne un peu mieux.
Après le grand succès de Mamie,
dans toutes les entrevues que t'as accordées au Québec,
les journalistes sont toujours très, très enthousiastes.
C'est presque comme s'ils te mettaient de la pression
pour que t'aies une grande carrière à l'international.
Les journalistes veulent beaucoup.
À Norval, l'international, est-ce que ça vous attend?
T'en es où aujourd'hui?
C'est un bel exemple de film international.
J'en fais.
J'ai un autre film qui va sortir cette année
que j'ai tourné en Suisse l'an dernier.
J'en reçois régulièrement des scénarios
de la France ou d'ailleurs,
mais c'est pas toujours
bon ou des fois c'est bon,
mais j'ai déjà fait ça, ça me tente pas.
Puis ma vie est ici aussi.
Il y a des moments
où ça peut être
déprimant aussi
de partir tourner à l'étranger.
D'être à l'hôtel.
C'est le fun quand tu tournes tous les jours.
Mais si
il y a 4-5 jours
où tu ne tournes pas,
j'ai des amis là-bas, mais ils habitent là-bas.
Ils ont une vie là-bas. Ils ont des enfants.
Ils ont des choses à faire.
Je ne suis pas chez moi. Je ne suis pas dans mes choses à moi.
Je ne suis là que pour ça.
Je ne peux pas accepter d'autres contrats.
Je suis là-bas.. Je ne peux pas accepter d'autres contrats.
Je suis là-bas. Il y a ça aussi.
Moi, je peux glisser facilement dans une espèce
de dépression.
Ça ne m'aide pas.
Je vais continuer à y retourner.
Je vais...
Une carrière internationale,
tu sais, à 40 ans,
tu oublies ça un peu.
C'est vers la quarantaine
que j'ai tué ma mère
que j'ai commencé à recevoir des offres là-bas
j'ai eu un agent français
c'est déjà trop tard
j'avais mes enfants
il faut s'installer là-bas
à 20 ans, 30 ans, tu peux espérer avoir
une grande carrière à l'étranger peut-être
mais peut-être.
Mais peut-être moins à 40.
Et ma vie était ici.
Il n'y a jamais été question que je déménage là-bas.
C'est ça, j'en fais de temps en temps.
Je suis très heureuse de ça.
Je suis toujours accueillie là-bas.
Vraiment à bras ouverts.
Comme une icône.
En tout cas, les gens sont très généreux à mon endroit.
Très, très, très généreux.
Je me permets de présumer que c'est d'autant plus difficile
de quitter maintenant que tu as grand-mère.
Oui, mon petit Paul.
Je vais le garder ce soir, d'ailleurs.
Je vais faire la cuisine avec lui.
Il faut que je prépare un petit menu.
Depuis quelque temps, on fait ça ensemble.
C'est une nouvelle activité.
Il y a deux ans.
Je vais lui faire faire. Je vais lui commander un petit tablier.
Pour qu'il sente...
Avec peut-être une petite toque de chef.
Je ne sais pas quoi.
Comment est-ce que tu décrirais l'amour
d'une grand-mère par rapport à l'amour
d'une mère pour ses enfants?
C'est aussi excessif.
L'amour d'une mère...
C'est le même amour.
Mais ça se concrétise différemment.
C'est-à-dire que je fais des choses avec mon petit Paul
que je n'avais pas nécessairement le temps de faire avec mes enfants
ou que je faisais plus vite avec mes enfants,
mais j'avais moins de patience aussi.
Je travaillais en même temps.
Là, quand je le vois, c'est parce que j'ai vraiment du temps.
Je peux le faire.
Des fois où je tourne, où je suis bien bien occupée,
je ne peux pas le garder, je n'y vais pas.
Donc, je disparais pendant...
Souvent, je disparais pendant plusieurs semaines dans sa vie.
Il ne me voit pas, ce qui n'aurait pas pu arriver avec mes enfants.
Mais je me rattrape.
Puis, il n'y a rien d'autre qui existe.
Quand je suis avec lui,
je ne touche même pas à mon téléphone.
Je ne peux pas regarder mes textos.
Il n'y a rien de tout ça qui existe.
On est juste nous deux.
Puis on a bien du fun.
Ça m'avait bouleversé lorsque ma mère m'a dit
quelque chose de sensiblement,
mais qui ressemble beaucoup à ce que tu viens de dire.
C'est un amour qui est aussi intense,
mais qui est dégagé des responsabilités de la parentalité. C'est juste ça, la différence. Mais l de dire. C'est un amour qui est aussi intense, mais qui est dégagé des responsabilités de la parentalité.
C'est juste ça, la différence.
Mais l'amour, c'est un amour...
Il n'y a pas d'amour
qui peut se comparer à ça.
Non.
C'est pour ça que je suis contente d'avoir eu des enfants.
D'avoir pu vivre ça.
Un amour aussi exagéré,
aussi puissant,
sans vouloir être aimé en retour.
On veut être aimé, bien sûr, on en a besoin,
mais à la limite, même quand nos enfants nous envoient promener,
ça fait bon.
On les aime tellement qu'on les comprend
de nous envoyer promener.
On comprend tout. Il faut qu'on comprenne tout.
Moi, j'angoisse quand même assez souvent l'idée de vieillir.
Mais ce que tu dis à l'instant,
qu'il y a 40 ans,
ta carrière a connu un nouveau tremplin
grâce à « J'ai tué ma mère » puis à « Mamie » ensuite.
Ça me réconcilie avec l'idée de vieillir.
C'est quand même beau de se dire que...
Bien, c'est beau, mais...
Non?
Bien, c'est beau.
C'est beau d'évoluer, en fait. C'est beau d mais... Non? C'est beau d'évoluer.
En fait,
c'est beau d'avoir des nouveaux projets
puis d'avoir
des défis dans la vie.
Vieillir, c'est le temps
qui passe, oui.
Le temps qui passe fait qu'on évolue,
mais c'est la gravité
aussi, la gravité qui nous
attire vers le sol, vers les abysses. c'est la gravité aussi, la gravité qui nous attire
vers le sol,
vers les abysses. C'est ça aussi.
Et ça, c'est
pénible.
C'est pénible.
Comment ça se manifeste?
Je sais que tu en as souvent parlé de ta peur de la mort,
mais puisque c'est un de mes sujets préférés.
Ah oui, c'est un de tes sujets préférés?
Parce que je la vis aussi, cette peur-là.
Elle m'habite.
J'essaie de comprendre comment ça se manifeste chez les autres.
Mais peut-être que tu l'as frôlé, la mort aussi.
Je te le confirme, Anne.
Je m'en doutais bien, parce que je connais un peu ton histoire.
T'as fait tes recherches?
Ben non, mais j'en ai entendu parler
il y a longtemps, puis ça m'avait
vraiment bouleversée.
On pourrait se dire
« Viens des choses en dehors de ces petits micros. »
On pourrait se parler longtemps.
Mais c'est parce que tu l'as frôlé, toi aussi,
que tu t'en as parlé.
J'ai l'impression que je l'ai frôlé
ou l'idée de la mort, en tout cas.
Il faut faire la paix avec ça à un moment donné.
C'est du temps perdu, sinon.
C'est juste de l'angoisse.
C'est juste des nuits blanches.
Il faut transformer ça en d'autres choses.
C'est de l'énergie perdue, sinon.
Oui, il faut se dire,
il faut se le répéter,
que le temps fait
qu'on devient
des êtres qui pensent mieux,
qui réfléchissent plus peut-être,
qui ne refont pas les mêmes erreurs,
mais qui les font quand même.
En tout cas, moi, dans mon cas,
je refais les mêmes erreurs à répétition.
C'est bien fatigant.
Mais oui,
il faut apprivoiser ça, absolument.
Oui, il faut apprivoiser
notre fin.
Tu parlais de la compassion envers les autres
que tu arrives à aiguiser
grâce à ton métier
d'actrice, de comédienne.
Est-ce que tu arrives à faire grandir
la compassion que tu as pour toi-même?
Je pense que oui, quand même.
Mais j'aime bien
me mettre la tête dans le sable, souvent.
J'aime bien ne pas voir...
Je me regarderai pas dans le miroir.
Je me regarde
de moins en moins dans le miroir.
Ça me brise trop.
À ce point-là?
Oui. Parce que dans ma tête,
je suis encore...
Mais je me suis en 40 ans aussi.
Je pleurais parce que...
Là, c'est le début de la fin.
Puis je le voyais dans ma peau.
Je voyais ma peau vieillir.
Je voyais que ce n'était pas pareil
comme cinq ans avant.
Ce n'était plus la même chose.
Imagine maintenant, je regarde ma bouche,
je m'écroule.
J'ai juste envie de pleurer
et donc je ne veux plus ça.
Et c'est pour ça que c'est
si dur de faire ce métier-là
quand on vieillit. Pour les hommes
et pour les femmes, je crois. Mais plus
pour les femmes. Ce sera toujours plus dur pour les femmes.
C'est pour ça que je ne veux pas
me regarder comme je ne veux pas me regarder devant un miroir.
Oui, j'ai l'impression que je me...
J'apprends à vivre mieux avec moi, en tout cas.
Ne serait-ce que parce que j'ai compris
que j'avais un contrôle sur moi-même.
J'ai compris que boire moins d'alcool,
mais c'est vrai, ça t'entraîne moins vers une dépression.
Mais c'est renoncer à de si beaux moments.
Oui, mais quand on apprend...
Moi, je sais que je suis quelqu'un d'excessif.
De très excessif.
Et je ne peux pas prendre une petite affaire.
Il faut que j'ai la totale.
Si je n'ai pas la totale, je suis aussi bien de m'en passer.
Je me connais. C'est comme ça que je suis.
Si je veux me protéger, c'est ça qu'il faut que je fasse.
Il y a des choses qu'il faut que je mette de côté
et il ne faut plus que je retouche à ça.
Jamais.
Comme la batterie.
Si je ne deviens pas une virtuose de la batterie,
pas question que j'en joue.
Non, je n'en jouerai pas.
Je ne vais pas m'humilier.
Non, ça va me briser.
Anne, ce balado s'intitule « Juste entre toi et moi ».
Tu m'as déjà dit beaucoup de choses,
mais est-ce qu'il y a une dernière chose que tu aimerais me dire
qui resterait juste entre toi et moi?
Oui, c'est ça. J'y ai pensé beaucoup, mais...
Écoute... J'aime ça, t'as fait tes devoirs.
Oui, j'ai fait mes devoirs.
C'est admirable. Oui, mais je t'écoute.
Tu penses que personne t'écoute. Je t'écoute, puis je te lis.
Je vis dans l'illusion. Mon pauvre ami.
Je te dirais... Écoute, c'est niaiseux,
mais juste entre toi et moi,
je te dirais que je n'ai pas encore fait le deuil
d'avoir un chien dans ma vie.
C'est mon rêve d'avoir un chien.
Je suis allergique aux chiens.
Mes enfants sont allergiques aux chiens.
J'allais dire que c'est un rêve accessible.
Non, je suis allergique aux derniers.
J'ai tout essayé. J'ai les yeux enflés.
J'ai des plaques partout. J'ai le ternu.
Je fais de l'asthme. C'est la totale.
Mais je ne désespère pas encore, parce que c'est le rêve de ma vie.
Et j'aime tellement les chiens.
Je voudrais avoir un petit beagle avec des grandes oreilles,
un petit Snoopy.
Et je pense que...
Tu irais le promener dans le quartier?
Oui! Et puis, je lui ferais...
Moi, je tricote, donc je lui tricoterais des petits chandails,
des petites bottes.
Puis, je lui ferais venir de la bonne nourriture,
qui est bonne pour la santé,
et je lui ferais à Noël des biscuits de chien.
Josée d'Estasio,
elle a déjà mis une recette
de biscuits de chien dans son petit carnet
de Noël, dans son petit carnet de recettes,
et je ferais ces petits biscuits de chien à mon chien,
que j'appellerais peut-être Marcel.
Marcel? Pourquoi?
Je ne sais pas. Je l'entends.
Ça fait longtemps que j'ai ce nom-là en tête.
Des fois,
j'ai même fait semblant
d'avoir un chien dans la maison.
Marcel, viens souper.
Maman t'appelle. Je fais ça.
Je parle à des êtres imaginaires.
Je parle à mon mur de cuisine. Je parle à des chiens.
Je parle à des gens. Je fais ça.
Je parle tout seul. Mais Marcel, mon petit chien, je parle à des chiens, je parle à des gens, je fais ça. Oui, je parle tout seul.
Mais Marcel, mon petit chien, je l'ai bien aimé.
Je te souhaite tout le bonheur d'un chien prénomé Marcel.
J'espère que je vais l'avoir un jour, mon petit Marcel.
Je te le souhaite.
Je te remercie.
Merci beaucoup, Anne.
Merci à toi. Juste entre toi et moi