Juste entre toi et moi - Diane Dufresne
Episode Date: October 11, 2024Dans une rare et généreuse entrevue, Diane Dufresne raconte la création de son nouvel album, État de siège. Elle se confie sur sa relation avec sa mère, disparue trop jeune, sur son rapport à ...l’âge et sur ses convictions écologistes, en plus de revenir sur son amitié avec Luc Plamondon.
Transcript
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Salut, ici Dominique Tardif.
Ah, bienvenue à Juste entre toi et moi.
Bienvenue à un épisode très spécial de Juste entre toi et moi.
Bon, là, vous allez me dire que je présente chacun des récents épisodes de Juste entre toi et moi comme des épisodes spéciaux.
C'est pas tout à fait faux, mais celui-ci l'est tout particulièrement parce que mon invité aujourd'hui c'est la grande Diane Dufresne.
C'était la première fois que je rencontrais Madame Dufresne, mais j'ai eu la chance de l'interviewer au téléphone au mois d'août dernier.
C'était au moment où on célébrait les 40 ans
de son spectacle Magie Rose,
qu'elle a présenté au Stade Olympique en 1984.
Madame Dufresne, elle vient
elle-même de célébrer son 80e
anniversaire le 30 septembre dernier.
Et elle souligne cet anniversaire
de deux très belles manières.
D'abord en lançant un nouvel album.
Un nouvel album qui paraît aujourd'hui, 11 octobre.
Ça s'intitule État de siège.
C'est un album qu'elle a créé et co-réalisé
avec le guitariste Michel Cusson.
C'est un album parfois déroutant,
assurément étonnant,
mais qui témoigne de toute la créativité
qui habite plus que jamais Madame Dufresne.
Et puis il y a une exposition,
une exposition immersive, Diane Dufresne. Et puis, il y a une exposition, une exposition immersive,
Diane Dufresne, Aujourd'hui, Hier et pour toujours,
qui est présentée à Arsenal à Montréal jusqu'au 10 novembre.
C'est une rétrospective de sa carrière imaginée par l'artiste Richard Langevin,
qui est aussi l'amoureux de Madame Dufresne.
Ne me reste plus qu'à vous rappeler que vous pouvez lire l'article
que j'ai tiré de cette rencontre.
Vous pouvez admirer aussi le magnifique chapeau que portait madame dufresne ce jour là dans la presse plus sur la presse point ca ou sur l'appli mobile la presse et voici sans plus tarder Juste entre toi et moi
Ça restera entre toi et moi
Pour une fois
Ça reste entre toi et moi Est-ce que vous vous souvenez, Mme Dufresne,
du premier moment d'ivresse que la musique vous a procuré?
Premier moment de joie, de bonheur.
Un des moments d'ivresse, grand d'ivresse,
c'est quand j'ai entendu Barbara chanter pour la première fois
« Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous » à Bobbino.
J'avoue que ça m'a donné un moment d'ivresse.
Vous étiez là dans la salle?
Oui.
Vous aviez quel âge à peu près?
Je vais avoir 20 ans.
Ça, c'est votre premier grand voyage en France?
Oui, c'est quand j'ai fait mes études à Paris.
Elle était comment, Barbara, sur scène?
– Barbara, c'était sa vie.
Elle arrivait un peu comme moi,
longtemps d'avance, moins maintenant,
mais longtemps d'avance dans sa loge.
Elle arrivait, je pense, le matin.
Pour elle, c'était comme son histoire d'amour, c'est ça.
Donc, elle vivait vraiment, je crois, pour le public.
Je ne l'ai pas rencontrée souvent.
Je l'ai rencontrée une fois, mais je ne savais pas qui j'étais.
Pourtant, elle m'avait envoyé pour ma fête
une bouteille de champagne, mais...
Mais je n'avais pas...
Elle était grandiose.
Barbara était grandiose.
Elle était unique.
Et ça, c'était une époque extraordinaire.
Elle avait un pianiste aussi qui s'appelle Gérard Daguerre,
avec qui j'ai fait des spectacles aussi.
Comment est-ce que ça a façonné votre imaginaire, votre trajectoire,
ce premier séjour-là que vous avez fait en France dans les années 60?
C'est-à-dire que j'ai appris le chant avec Jean Lumière
et j'ai appris le théâtre avec Françoise Roset
et l'école Simon.
Donc, déjà, les deux fonctionnaient.
Puis, c'est là que j'ai commencé à faire des concerts,
des galas.
Et puis, j'étais...
Je faisais des boîtes à chansons, je passais des auditions.
J'avais une voix qui était très puissante.
Donc, je pouvais faire les ouvertures.
Donc, j'ai fait l'ouverture quand même
de l'écluse, qui était très importante,
où avait chanté Barbara
pendant des années,
je crois. Et ça,
les chants à l'écluse, c'était
une carte de visite incroyable.
Bon, ça n'existe plus, ces boîtes à chansons.
Ici, il y avait la butte à Mathieu.
Mais ici, à Paris, il y avait bien sûr
l'échelle de Jacob, le caveau de la Bollé,
mais l'écluse, c'était avec Marc Chevalier,
c'était quand même très, très important.
Puis on était engagés, comme plusieurs mois,
quand on est engagés.
À passer une audition à l'écluse,
c'était la première fois, c'est ça que j'ai...
Je me suis égarée dans la chanson,
j'étais trop impressionnée.
Qu'est-ce que vous chantiez? Ah, je me souviens
pas. Peut-être Jack Mandeloy.
Donc, une chanson de Vigneault. Oui.
Une chanson québécoise. Oui.
Parce que les Français étaient quand même curieux
de ce que les Québécois chantaient à cette époque-là.
Oui, il y avait beaucoup. Il y avait Pauline Julien,
il y avait Gilles Vigneault, il y avait...
Ferland. Oui, Ferland.
Il était très apprécié.
Vous êtes le brel canadien.
– Oui, c'est ça, parce qu'à l'époque,
on n'était pas encore Québécois, on était Canadiens-Français.
– Oui, oui.
– Comment est-ce que vous avez découvert votre voix?
– J'ai toujours eu de la voix.
– Oui? – Bien oui.
Petite fille du plus petite que je chantais.
Je chantais, Je chantais.
J'essayais de danser des claquettes.
Puis on n'avait pas la télévision,
mais c'était la radio.
Et chaque fin de semaine,
je faisais mon petit concert à la radio. Je chantais avec les chansons de la radio.
Je faisais des trucs de claquettes.
Et mes parents m'encourageaient beaucoup à chanter.
Je chantais dans les cabanes à sucre, très, très jeune.
Dans les cabanes à sucre?
Oui.
Oui, oui, j'étais...
Mon gros hit, c'était « Voulez-vous danser grand-mère? »
Puis « Combien vaut ce chien dans la vitrine? »
Wouf, wouf.
Ma mère m'encourageait, mon père aussi.
Mon père avait une très belle voix aussi.
Votre père était amateur d'opéra, n'est-ce pas?
Oui, oui.
Il chantait à l'opéra aussi.
Il chantait à l'opéra?
Il chantait, oui.
Il chantait le menu chrétien une fois par année.
C'était très, très impressionnant.
Avec la note aiguë, on priait pour qu'il y ait la note,
mais il n'y avait pas de problème avec les notes aiguës.
Puis qu'est-ce qu'il faisait dans la vie, votre père?
Il était courtier d'assurance.
L'assurance vie.
La Metropolitan Life.
Donc, la culture a toujours occupé une grande place,
la musique a toujours occupé une grande place dans votre vie.
Oui, oui.
Ma mère aussi écoutait la radio.
Parce qu'avec la radio,
elle prenait des notes aussi
pour apprendre tous les textes,
des chansons,
que ce soit Félix Leclerc,
Charles Drenet.
Donc, elle chantait aussi.
Ma mère chantait.
Puis en plus,
on allait au Théâtre Mercier
voir les spectacles.
Il y avait deux films
puis il y avait aussi
du vaudeville,
de la variété
avec Olivier Guimond et la troupe.
Donc,
chaque fin de semaine, ça...
Puis il y avait des chanteurs aussi,
Renaud Ketty, il y avait le chanteur
Paulo Noël.
Donc, j'écoutais des chanteurs.
C'est ça qui m'a préparée, en fait.
Donc, même si,
d'une certaine manière, vous avez grandi dans un milieu
modeste, est-ce qu'on
pourrait dire ça? Bon, on ne le sait pas. Quand on est jeune, on ne sait pas si on n'est pas ou riche.
On avait une voiture, donc on devait être médium. C'est déjà ça. Mais donc, même si vous avez
grandi dans ce milieu-là, votre rêve de faire carrière en chanson, lui, a toujours été encouragé
par vos parents. Oui, mais de toute façon, je faisais aussi dans ma chambre que je pouvais fermer ma porte. Ma mère me disait
« Tu peux faire ce que tu veux dans ta chambre. »
Et là, je faisais des spectacles
avec une boîte en carton que j'avais
trouvée avec trois cordes
pour pouvoir ouvrir le rideau.
Puis je prenais les revues
de ma mère qui étaient des revues Heaton.
Je ne sais pas, des revues avec des robes.
Et je faisais des spectacles.
C'est votre mère qui a fait entrer
dans votre vie Elvis Presley?
Oui.
Parce que tout le monde critiquait Elvis Presley.
Je l'ai vu aussi. Vous l'avez vu en spectacle?
Non, parce que quand je suis allée
plus tard à Las Vegas, il y avait
annulé. J'étais allée avec
Luc Plamondon et François.
François Cousineau, oui.
Oui, François Cousineau.
Il était malade, mais dans ce temps-là,ousineau, oui. Oui, François Cousineau. Et bon, il était malade.
Mais dans ce temps-là, il était vraiment énorme.
Oui, ma mère aimait beaucoup Elvis Presley.
On l'avait vu à Ed Sullivan Show.
On le voyait seulement à moitié.
Il ne fallait pas voir son bassin.
On n'a pas son bassin, mais ma mère adorait ça.
Trop lassif.
Oui, trop lassif, mais il bougeait.
Il bougeait fantastique.
Donc, ça veut dire que votre mère était très ouverte d'esprit
pour vous permettre d'avoir accès à Elvis à Ed Sullivan Show.
Alors que ce qu'on entend habituellement, c'est que
les enfants voulaient absolument voir Elvis,
mais que les parents étaient outrés
de tant d'érotisme dans le télévisage.
Oui. Ma mère était très pudique aussi.
Ma mère me disait toujours aussi,
tu danses avec quelqu'un, mais que
ses mains vont plus loin,
en bas du dos, il y a quelque chose qui ne va pas.
Donc, on était assez sévères, mais vu que mes parents allaient à New York
une fois par année, donc ma mère allait acheter ses vêtements là-bas,
donc il y avait une ouverture.
Mon père nous amenait souvent à Plattsburgh.
Mon père aimait toujours ce qui était nouveau.
Ma mère aussi, c'était toujours vers le nouveau.
Ma mère aussi, à ce temps-là,
dans les années 50, avait les cheveux platines,
la queue de canard, les cheveux coupés courts,
fumait de la cigarette, portait des shorts
très, très courtes.
Donc, c'était...
C'était le pétard, en fait,
de Ville d'Anjou.
C'est là que vous avez grandi, à Ville d'Anjou.
Oui.
Très jeune, j'étais sur la rue
Éloïne, à Oshalaga.
Et ensuite, c'est Ville d'Anjou.
Quels souvenirs vous gardez de votre
enfance? Est-ce que ce sont essentiellement des souvenirs
heureux? Oui, parce que ma mère,
j'étais près de ma mère. J'ai pas eu longtemps
ma mère. Elle est morte à 34 ans.
Et vous aviez quoi,
16 ans à ce moment-là? Oui, je sais ça, 14-15 ans, oui.
Est-ce que ce serait juste de dire
que c'était un moment déterminant dans votre vie?
C'est déterminant parce que ça change la vie.
Ça change la vie.
Ceux qui perdent leurs parents en jeunes,
je pense qu'on n'oublie pas ce que...
Bon, je ne parle pas toujours de ma mère,
mais il y a quelque chose qu'ils brisent.
On sait que la mort, ça existe.
Ça ne revient plus.
Et ça, c'est terrible,
parce que tu as ton père,
que tu ne sais pas qu'il vit une grande peine d'amour,
qu'il fait des dépressions.
Tu ne comprends plus ton père parce qu'il est différent.
Et puis, elle n'est plus là.
C'est terrible, la mort.
Tu ne peux pas t'imaginer.
Tu ne peux pas t'imaginer.
Tu te sépares de ton frère, de ta soeur,
puis tu les revois peut-être des années plus tard.
Mais même si tu es avec eux,
il y a quelque chose qui change, qui est irréversible.
Et ça, tu es trop jeune pour comprendre ça.
Tu ne peux pas vivre ta tristesse.
Tu ne peux pas même...
Même, je pense que le cerveau
essaie d'oublier le visage même de ta mère.
Il faut que tu te défendes d'une certaine manière.
Puis son visage, est-ce que vous êtes en mesure de le voir dans votre esprit aujourd'hui?
Oui, je le vois parce que je regarde des photos.
Mais son visage ne revient jamais dans mes rêves.
Ce n'est jamais revenu.
Elle m'a laissé cette liberté-là probablement, ma mère, que j'adorais.
J'adorais ma mère parce que même quand elle était malade,
très, très malade,
elle se levait la nuit avec sa souffrance
et on pouvait colorier, des livres à colorier.
Elle faisait les personnages avec des cheveux roses,
des cheveux bleus.
Donc, c'était très différent.
Elle était très différente.
Elle aimait la différence, ma mère.
Elle n'avait pas peur de la différence.
Puis, est-ce qu'elle était pointée du doigt
compte tenu de son amour de la différence?
Oui.
Dans une société quand même assez traditionnelle,
c'était le Québec de cette époque-là?
Oui, oui.
Elle était pointée du doigt.
Mais vu qu'à Ville-d'Anjou, mon père était...
Il faisait des assurances, il allait voir tout le monde.
Donc, il était très près du chef de police.
Donc, elle était protégée.
On n'entendait pas trop.
Puis juste à côté, la maison à côté,
c'était un boxeur qui s'appelait Gabi Ferland.
Donc, sa femme aussi chantait dans les cabarets,
qui était très belle.
Donc, c'était assez... c'était OK, quoi.
Mon père assurait tout le monde.
Il y avait du monde pas louche,
mais il était, bon, multi, tout le machin.
Donc, ma mère avait toutes ses permissions.
Il ne faisait pas de discrimination sur les clients?
Non, ma mère s'en foutait de ce que pouvaient dire les gens.
C'est puissant quand même.
Je ne m'en rendais pas compte.
De s'en foutre à ce point-là.
Oui, même quand les gens voulaient peindre,
les peintres voulaient peindre sa maison noire.
Elle prenait la rose, puis elle les arrosait.
Elle voulait une maison rose.
Pourquoi est-ce que les gens voulaient peindre la maison en noir?
C'est-à-dire que c'était comme ça.
À Ville d'Anjou, il y avait comme des patterns établis
que telle rue, tel truc, première maison.
Donc, c'était établi comme ça, une maison noire.
Elle voulait rose.
L'opinion des autres, vous,
est-ce que vous avez toujours été en mesure
de ne pas vous en soucier?
Au début, tu t'en soucies parce que tu veux être dans les journaux, puis tu voudrais te voir,
puis tu veux exister, puis tu penses
que tu rencontres les journalistes,
mais quand ils font l'article,
ils parlent tellement mieux que toi,
donc tu es comme emballé.
Puis quand tu arrives avec le temps,
et quand tu es arrivé à l'hostade,
les journalistes ont été tellement méchants.
Votre spectacle, Magie rose, oui.
Oui, ils ont été tellement méchants que là,
j'ai trouvé que c'était une injustice
et j'ai arrêté de lire.
Effectivement, j'ai eu la chance de vous interviewer
récemment à ce sujet-là
parce qu'on soulignait les 40 ans
de votre spectacle au stade olympique.
Puis il y a un texte, effectivement,
assassin qui est paru dans la presse.
Mais ce qui est amusant, puis ce qui est
beau aussi, c'est qu'une semaine ou deux après,
la presse publie des extraits de six lettres
de fans finis, de fans fervents de Diane Dufresne
qui vous défendent comme si on avait attenté à votre vie.
Les gens sont vraiment en colère.
Oui, ils sont vraiment en colère.
Mais il y a des gens aussi, des journalistes
qui disent qu'ils ne peuvent pas comprendre.
Son public l'aime.
Mais un public qui vient voir un artiste,
moi j'entends, c'est parce qu'il l'aime.
Et oui, le public écrivait,
mais c'est quand même la presse qui a été assez honnête
pour publier quand même,
ne pas publier quand même
ces lettres aux lecteurs.
Oui, il me défendait.
Il me défendait. C'est bien.
Votre relation avec vos fans, elle a toujours été très, très riche.
Quand on dit fan, moi, le fanatisme,
c'est pas quelque chose que...
C'est-à-dire qu'il ne faut pas oublier aussi
que très souvent, quand le public va voir un artiste
ou même dans l'art visuel,
c'est-à-dire qu'ils veulent se comparer.
Ils veulent se comparer à ce qu'ils voient
ou ce qui les fait rêver.
Donc, si on appelle ça du fanatisme,
j'aime pas beaucoup ce côté-là.
Mais vous donniez des permissions
à votre public. Je donnais des thèmes.
Je donnais des thèmes parce que, bon,
j'ai vécu le carnaval de Rio.
J'ai fait partie de l'école de samba aussi.
C'est pas rien. L'école
Portela. Donc, j'ai fait partie d'une école de samba.
Et quand les gens, quand je veux dire,
pas se travestissent, mais s'habillent,
se rendent dans des personnages ou dans des couleurs,
ça donne tout à fait une autre dimension.
Les gens, on touche à une certaine liberté.
Alors, j'ai donné des thèmes au spectacle.
Puis en plus, je m'habillais, bon,
d'une façon extravagante et pour ici,
mais en France aussi, il y avait le Casino de Paris.
Les femmes, les artistes, les danseuses
se permettaient des robes fantastiques.
Je l'ai fait ici, mais ici, j'étais très critiquée.
Et ensuite, c'est arrivé beaucoup...
Beaucoup d'homosexuels qui sont arrivés
ont eu cette permission de s'habiller
et de se travestir.
Ils avaient ce droit.
Pour le public, j'étais quelqu'un
de marginal. Je suis une chanteuse populaire, mais
assez marginale. J'ai toujours été un peu outsider,
mais j'ai eu des succès populaires
avec l'homme de ma vie et tout ça.
Ensuite, je suis devenue plus marginale
et ça a permis à des marginaux.
Vous savez, les marginaux, on dit ça parce que
ça peut sécuriser
certaines personnes
qui ont une pensée très carrée.
Tu peux avancer comme tu veux.
C'est de là qu'on pense qu'on veut.
C'est toujours préférable de penser ce qu'on souhaite penser soi-même.
Ou surtout que maintenant, il y a tellement toutes sortes de pensées.
Maintenant, c'est tellement une espèce de liberté qu'on ne peut même plus penser ce qu'on veut.
Oui, c'est difficile, effectivement.
On est inquiet. On se dit, on peut-tu penser comme qu'on veut. Oui, c'est difficile, effectivement. On est inquiet.
On se dit, on peut-tu penser comme ça?
Si on dit telle chose, telle chose, telle chose.
On est pris dans une espèce de carcan quand même assez terrible.
Il y en a une question de ça sur votre plus récent album,
la raison pour laquelle on se rencontre aujourd'hui.
Votre album État de siège que vous avez créé,
co-réalisé avec Michel Cusson.
Ça revient, les médias sociaux,
les opinions qui sont nombreuses
et étalées sur toutes les tribunes,
les opinions de tout le monde.
Est-ce que vous êtes en contact au quotidien avec ça
ou vous vous préservez du torrent d'opinions
qui est déversé sur nous?
Ah oui, je me préserve de ça.
Ah bien oui. Je lis, Ah oui, je me préserve de ça. Ah ben oui.
Je lis, bien sûr, je lis des fois.
Bon, pas beaucoup, non.
Pas beaucoup.
Je ne vois pas beaucoup non plus
ce qui se passe sur Facebook.
J'y vais quand, bon, j'ai à parler au public
ou je m'envoyais des trucs
ou si quelqu'un est décédé,
j'envoie mes salutations
à ces esprits qui s'en vont.
Non, je ne suis pas trop attirée
vers ça parce que j'ai une tête trop
multi, tout le machin que là,
si j'étais... On ne peut pas
se fier à toutes les opinions. Il y a des espèces
de carcans qu'il faut penser
d'une manière, il faut penser d'une autre.
Là, il y a une espèce de truc, c'est sûr qu'il y a eu MeToo.
On avait besoin de ça. On avait besoin d'exprimer ce qu'on pense. Mais là, d'une autre. Là, il y a une espèce de truc, c'est sûr qu'il y a eu Me Too. On avait besoin de ça. On avait
besoin d'exprimer ce qu'on pense.
Mais là, c'est parti. C'est comme
sur une peau de banane. Là, ça va.
Il faut quand même une certaine
rigueur. On a aussi une morale.
Mais ça devient une morale
de dire tout ce qu'on pense
en ne disant pas son nom,
en ne signant pas. C'est trop facile.
Vous dites, vous employez le mot multi.
La dernière pièce de l'album s'intitule « Multirêves ».
Un clin d'œil au multivers, si j'ai bien compris.
On a parfois l'impression, effectivement,
que d'être trop prisonnier de nos téléphones
ou des réseaux sociaux, ça nous empêche de rêver.
C'est-à-dire, je comprends,
parce que la vie peut-être peut être plate.
C'est vrai, ça peut être souvent,
mais il faut être dans la vie.
Il faut être dans la réalité.
Parce que sinon,
je ne sais pas où ça va. Quand vous voyez les gens
traverser la rue en regardant un téléphone,
il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.
Je comprends que c'est intéressant,
mais tous les gens sont toujours
sur leur cellulaire. Moi, je les gens sont toujours sur leur cellulaire.
Moi, je ne suis pas toujours sur mon cellulaire.
Non, non.
Il faut une espèce de liberté.
Il faut avoir la liberté de s'ennuyer
pour pouvoir y mettre quelque chose dedans,
parce que sinon, on ne peut jamais créer.
Il faut quand même un espace.
Sinon, c'est tout le temps, tout le temps, tout le temps.
Je veux dire, c'est plein tout le temps.
Tu n'as pas d'espace.
Moi, je trouvais ça extraordinaire
que le monde soit plus dans la rue,
qu'ils soient tous chez eux,
parce que moi, je suis toujours chez moi,
où je suis plus austère, probablement,
de vivre de cette manière.
Et c'était une autre façon de vivre.
Et tu disais, bon, quel peut être le contact?
Donc, j'ai regardé des émissions de Michel Cusson
qui étaient sur...
Il faisait des webdiffusions.
Oui, il faisait des webdiffusions.
Depuis chez lui.
Oui, oui.
J'avais travaillé avec lui sur un disque.
Il avait fait des arrangements.
Et puis là, je passais du temps à écouter Michel Cusson
et je trouvais ça absolument fantastique.
Je trouvais ça...
Cette espèce, il était là seul dans son studio.
Il créait toute sa table de musique,
toutes ses guitares.
Ça m'a toujours impressionnée, Michel Cusson,
comme il impressionne beaucoup de gens
parce que c'est un grand, grand, grand musicien.
On s'entend bien que c'est une pointure.
Et j'écoutais ses émissions, ça me faisait tellement de bien.
Je me suis dit qu'il faudrait que...
J'aimerais faire de la musique avec Michel Cusson
qui crée, puis j'entendais toutes les musiques qu'il créait
quand même sur place. Bon, il devait
aller travailler avant avec tous ces trucs qui s'installaient.
Il y a eu des musiciens aussi
qui sont venus avec lui, qui viennent en studio
une fois par semaine. Et j'écoutais ça,
c'était pour moi, je me suis dit, bon,
je pourrais l'appeler. Moi qui n'appelle pas souvent les gens,
je pourrais l'appeler peut-être pour dire ce que ça
pourrait l'intéresser si je mettais des textes
sur ses musiques. Je me disais, bon,
c'est ses noms. Puis je n'appelle pas grand monde.
Je ne vais pas dire que j'appelle beaucoup des gens.
Est-ce qu'on vous a souvent dit non dans votre carrière?
Bien, je n'ai pas souvent appelé. Je n'ai pas souvent demandé
des choses.
Mais donc, Michel Cusson vous a dit oui.
Bien, il trouvait ça intéressant.
Il trouvait ça intéressant. Bien, on avait travaillé ensemble à cause, bon, des arrangements qu'il avait faits sur deux chansons. Il trouvait ça intéressant. On avait travaillé ensemble
à cause des arrangements qu'il avait faits sur deux chansons.
Il trouvait ça intéressant.
Donc, j'ai dit, je vais commencer.
Puis moi, j'avais commencé une idée qui était...
Je me dis, comment on peut...
Quand tu marches dans la rue, justement,
avec les téléphones, on ne se regarde plus.
Je lui ai dit, ce qui est drôle, c'est quand tu es sur l'autoroute,
tu te retournes vers une voiture.
C'est très souvent quand tu te retournes vers une voiture, la personne,
c'est drôle, elle te regarde.
Comment se fait-il que dans la rue, elle ne te regarde pas, puis quand
tu es en voiture, elle te regarde. Il dit, il y a quelque chose
là-dedans, comment on peut trouver un contact
avec le monde?
Quand on est pris dans le trafic. J'ai dit, quand on est pris
dans le trafic. Alors, je me suis dit, bon, c'est peut-être
la façon d'écrire, et j'ai commencé à écrire
justement
état de siège. Je me suis dit, bon, on est dans
voiture, puis tout le monde a tellement leur voiture,
c'est rendu que la voiture, des fois, est comme plus
importante, même des fois, tu as une espèce
de voiture complètement sophistiquée, puis la
personne qui en sort, elle n'est pas du tout. Donc, la voiture
donne un peu le caractère de la personne.
Je me suis dit, bon, bien, pourquoi pas
commencer à écrire quelque chose,
bon, puis c'est bien écrire, ça donne de la discipline.
Et j'ai commencé à écrire, justement, quelque chose qui se passe,, ça donne de la discipline. J'avais commencé à écrire
quelque chose qui se passe.
Je me suis dit, on va mettre un accident
dans cette espèce d'écriture
qui est sur la route. Écrire sur des chars,
ce n'est pas nécessairement ma tasse de thé
puisque je ne conduis plus.
Ce n'est pas d'emblée le sujet le plus poétique.
Non, mais c'est à l'intérieur.
J'ai dit, comment on peut trouver?
Quand j'ai entendu
ces fabuleuses
musiques de Michel Cusson
dans le temps de la pandémie
et c'était une fois par semaine
j'étais complètement, puis je voulais absolument
c'était tellement bien, je me suis dit
bon je vais l'appeler et puis ça l'a
intéressé, je me suis dit on va commencer comme ça
et bon, il est quand même impressionnant
Michel Cusson, c'est quand même très impressionnant
comme musicien, comme compositeur
et comme personne aussi.
Vous êtes impressionné encore aujourd'hui
par les gens avec qui vous collaborez?
C'est-à-dire, ça m'impressionne...
C'est sûr qu'on devient...
Ça vous arrive?
Oui. La musicalité de Michel Cusson,
c'est quand même un grand, grand niveau de musicien.
Il y a des personnages attachants sur cet album-là.
Puis il y en a qui le sont moins.
Vous parliez des gens qui sont soudainement moins élégants
lorsqu'ils sortent de leur voiture,
ce que leur voiture laisse entendre.
Il y a une pièce qui s'appelle Le Gladiator,
dans laquelle vous parlez de la masculinité.
Oui, mais j'appelle ça la calotte cinglée.
C'est qu'on est sur l'autoroute,
puis il y a des voitures qui sont toujours là en train de...
Ils sont dangereux, les jeunes.
Ils ne se rendent pas compte que, je veux dire,
bon, tu vas vite.
Puis probablement qu'ils sont probablement
justement sur leur ordinateur,
puis ils jouent avec des voitures.
Ils pensent que c'est comme ça,
mais il y a beaucoup d'accidents de jeunes aussi.
Puis donc, j'appelle ça le gladiateur, oui.
Il y a combien de couilles sous son moteur? Il y a combien de couilles
sous son moteur, oui. À toutes les fois que
je vous entends dire cette ligne-là,
je m'esclaffe.
C'est très, très drôle.
Ils sont dangereux, de toute façon. Pour eux-mêmes.
Et pour les autres aussi.
Bon, qu'ils se frappent et qu'ils rentrent
dans les trucs, mais qu'ils laissent les gens tranquilles, quand même.
Vous avez collaboré avec
plusieurs grands.
Vous en avez nommé quelques-uns.
On pourrait ajouter Luc Plamondon, Yannick Nézet-Séguin,
Daniel Bélanger, Michel Rivard, Serge Gainsbourg.
On pourrait passer la journée ici à nommer des gens avec qui vous avez collaboré.
Marie Bernard.
Oui.
Grande compositrice, grande logicienne.
Qu'est-ce que vous cherchez chez un collaborateur
lorsque vous amorcez une relation? Qu'est-ce que vous cherchez chez un collaborateur lorsque vous amorcez une relation?
Qu'est-ce que vous admirez chez un collaborateur?
Sa créativité.
Sa créativité,
c'est sûr. De toute façon, je suis quelqu'un...
Je suis moins timide, mais je n'ai pas
de contact. Je ne suis pas friendly, moi,
dans la vie. Je ne suis pas friendly.
Quand j'appelle quelqu'un, c'est que
j'ai une affinité, je crois,
musicale.
Puis il a beaucoup d'admiration aussi.
Il faut beaucoup d'admiration.
Comme un homme comme Michel Rivard, c'est un grand, grand poète.
Un grand musicien aussi.
Donc, c'est Daniel Bélanger.
C'est intéressant.
C'est plus qu'intéressant.
C'est un contact, c'est un privilège.
Même d'appeler Michel Cusson ou Marie Bernard.
J'ai fait beaucoup de musique avec Marie, même
comme musicienne aussi sur scène.
C'est une grande, grande musicienne.
C'est des grands...
C'est des grands créateurs.
C'est avec Marie Bernard
que vous avez créé votre album
Détournement majeur, en 93.
C'est le premier album, si je ne me trompe pas,
sur lequel vous signez tous les textes.
Oui. C'est un album dans lequel il est question
d'écologie, de l'environnement.
Puis en 93, j'étais jeune,
mais si je me souviens bien, on n'en parlait pas tellement.
On n'en parlait pas. On n'en parlait pas du tout.
On n'en parlait pas.
C'est grâce à Uber Eats. Oui, c'est grâce à Uber Eats.
Oui, parce que je suis allée
à l'Université de Montréal.
Ils donnaient des conférences.
Et quand j'ai entendu Hubert Reeve parler
de tout ce qui était pour arriver sur Terre,
qu'on pouvait disparaître,
j'avais l'impression que j'hallucinais.
Moi, j'allais voir Hubert Reeve qui me parle du ciel.
Il en parlait, mais c'est le premier
qui m'a donné cette conscience qu'on pouvait disparaître.
Et là, ça a changé complètement la dimension de voir le monde.
On pouvait disparaître, mais c'est pas rien.
On pouvait, bon, on disparaîtra peut-être pas tous, mais il va arriver.
On le voit arriver, d'ailleurs.
Et ça, ça m'a donné une conscience.
Et je me suis dit, bon, il faut que j'écrive.
Je me suis dit, bon, mais j'écris pas.
Alors, je sais pas, j'ai toujours eu des auteurs exceptionnels.
Je me suis dit, j'écrivais.
J'aimais écrire.
Je faisais des compositions à l'école.
J'étais une des premières de la classe.
Mais je ne pensais pas écrire.
Quand on a Luc Plamondon et Pierre Grosse.
Je me suis dit, je vais écrire.
Je vais écrire comme je suis.
Et tant pis. J' si c'est pas...
J'ai reçu des informations.
J'ai suivi Ubarri, il est arrivé Marie-Bernard.
Et ça a permis des tournements majeurs.
Mais je pensais que c'était le dernier.
Il y a 10 mois, je pense toujours que c'est le dernier.
En 93, vous pensiez que c'était fini.
Ah bien oui, puis d'écrire ce sujet
qui était complètement surréaliste.
Pourquoi dire que le monde va disparaître
quand tout va bien?
Mais Barry le disait.
Barry disait, oui, mais
un jour, préparez-vous, parce que peut-être on sera plus loin.
Les humains.
Comment est-ce que les gens réagissaient à l'époque quand vous leur
rapportiez ça, que la planète
est menacée?
C'est-à-dire que c'était pas...
Je suis toujours là pour certaines
personnes, j'étais toujours comme en dehors de la trappe.
Pour d'autres, c'était vrai.
Mais en plus, ça m'a permis de rencontrer
Richard Langevin, l'homme de ma vie,
puisque c'est lui qui a travaillé sur la vidéo.
Donc, ça, ça mène ailleurs.
Chaque fois que tu fais un changement dans la vie,
t'as toujours l'impression que tu vas te casser la marboulette.
Mais moi, ça me dérange pas,
parce que sinon, je reste vraiment fermée chez moi.
Il y a pas de problème. Mais ça permet toujours autre chose. Quand t'ouvres une porte, il y a toujours quelqu'impression que tu vas te casser la marboulette, mais moi, ça ne me dérange pas parce que sinon, je reste vraiment fermée chez moi, il n'y a pas de problème.
Mais ça permet toujours autre chose.
Quand tu ouvres une porte, il y a toujours quelqu'un derrière.
Et ça, on ne s'y attend pas.
Mais il faut ouvrir la porte ou la fermer.
Il y a un nouveau mot qui est dans notre vocabulaire
depuis quelques années, c'est le mot éco-anxiété.
Est-ce que vous l'êtes, vous, éco-anxieuse?
Est-ce que ça vous habite au quotidien à ce point-là?
Je ne sais pas pourquoi.
Depuis quelques temps,
depuis peut-être un an,
je ne sais pas si c'est mon âge,
mais oui, il y a comme une angoisse qui est différente.
Je suis inquiète.
Mais une peur, ce n'est pas seulement inquiet,
c'est que pourquoi cette peur tout le temps?
Et la peur n'est pas une bonne chose.
Donc, qu'est-ce que c'est qui fait ça?
Puis, tu te raisonnes.
C'est évident, tu te raisonnes.
Mais qu'est-ce qui fait que quand tu te réveilles,
il y a comme une angoisse. Pourtant, tout est beau.
Je vis à la campagne. C'est beau dehors.
Ça sent bon. Je vis avec l'homme
que j'aime. Tout est OK.
Il y a ça.
Il y a ça. Il doit y avoir quelque chose
qui est dans l'air.
C'est une peur par rapport
à votre propre vie,
à vous, par rapport à l'humanité?
Oui, ça a rapport avec quelque chose.
Des fois, je ne regarde pas toujours les actualités.
On ne peut pas toujours être dans la guerre.
C'est triste ce qui se passe aussi.
Tous ces gens qu'on tue.
Il y a toujours eu des guerres.
Je me dis, bon,
les hommes sont souvent en guerre aussi. Ce n'est pas souvent les femmes qui s'en vont en guerre. C'est pas toujours eu des guerres. Je dis, bon, les hommes sont souvent en guerre aussi.
C'est très souvent.
Ce n'est pas souvent les femmes qui s'en vont en guerre.
Ce n'est pas toujours les chefs de guerre.
C'est bon.
Bon, il y a tout ça.
Mais des fois, il faut que tu arrêtes de lire aussi pour respirer.
Et qu'est-ce qui fait que cette espèce d'angoisse
que doivent avoir beaucoup de gens?
Quand tu vois les gens qui sont sur leur moteur aussi,
sur les autoroutes, les jeunes, ça doit être ça aussi.
Tu pousses ton moteur.
Il doit y avoir une espèce d'angoisse qui est partout.
Parce que les gens qui sont angoissés comme ça,
c'est la peur.
Puis des fois, tu ne la sens pas vraiment, la peur.
La peur peut te donner aussi un feeling.
Un feeling que c'est un drive.
Oui, de l'adrénaline.
De l'adrénaline. Mais c'est faux.
Ce n'est pas toujours de la bonne adrénaline.
Quelle place le silence occupe dans votre vie?
Une grande place.
Oui. Je suis quelqu'un de silencieux.
Je vis à la campagne.
C'est un beau paradoxe pour une chanteuse.
Oui. Oui. Oui.
J'ouvre ma trappe quand je vais voir le monde.
Ou quand je viens ici.
Mais ce n'est pas tellement mon truc de faire les entrevues.
Ça se passe bien jusqu'à maintenant.
Mais j'ai lu un livre que vous avez fait paraître en 2009
qui s'appelle « Mot de tête ».
Vous en parlez beaucoup dans ces livres-là
d'à quel point vous avez besoin de solitude,
de vous replier dans votre domicile
et que vous aimez aller à la rencontre des autres,
mais que ça vous coûte toujours quelque chose en énergie.
Oui, parce que je ne suis pas indifférente aux gens.
Quand je vois des gens, je suis avec eux.
Ça ne sert à rien d'aller voir des gens et d'être ailleurs.
Très souvent, tu es avec des gens, mais ils ne sont pas là.
Moi, quand je suis avec des gens, je suis avec des gens.
Je veux sentir leurs émotions.
C'est pour ça que je suis attentive aux gens.
Et vous me dites ça en me regardant directement dans les yeux.
Bien oui. Vous voulez que je regarde
la lampe.
Il y a des gens qui ont le regard plus fuyant
durant des entrevues. Ah oui?
Oui, ça arrive. Ah.
Dans quel état d'esprit vous devez être lorsque
vous créez comme ça un nouveau spectacle ou
un nouvel album comme État de siège?
Ben, vous me dites ça, je pense que
j'essaie de créer tous les jours. Tous les jours, c'est nouveau
pour moi. Tous les jours, c'est nouveau pour moi. Tous les jours, c'est nouveau.
Tous les jours, quand je m'endors le soir,
peut-être plus âgé, parce que j'ai 80,
mais ça fait longtemps quand même.
Depuis, même la mort de ma mère.
La mort entre et tu ne sais jamais
pourquoi tu te réveillerais le lendemain.
Tu n'es pas sûr de te réveiller.
Donc, j'ai toujours cette espèce de...
Je suis toujours dans cette espèce de conscience
de la vie ou de la mort.
Je suis toujours surprise de voir que je me réveille.
Chaque fois que je me couche le soir,
je me dis peut-être qu'on rentre dans un rêve
puis on ne vient pas.
Même des fois, je me demande si je suis vraiment là.
J'ai l'impression que vous êtes vraiment là.
Ah oui?
Présentement, oui.
Il y a une chanson sur l'album.
En fait, il y a beaucoup question de la mort,
d'après ce que j'ai entendu dans votre nouvel album,
dans « État de siège ».
Il y a une pièce qui s'appelle « Intersection »,
tous dans la même direction.
Puis vous chantez « Qu'on soit zen ou en trance,
il n'y a aucune différence.
On ne peut plus compter sur sa chance.
Il n'y a qu'une station, une dernière prédiction.
À la fin, on va tous dans la même direction. »
Vous parlez d'une ultime station.
Oui.
Est-ce que vous y pensez beaucoup,
à votre ultime station?
Oui, je pense à la mort pour mal tous les jours.
Ça fait partie d'une espèce d'équilibre,
d'une espèce de balance.
La vie puis la mort,
paraît-il que quand un enfant naît,
on pense aussi, très souvent les femmes
qui accouchent disent,
quand ils donnent naissance, ils pensent aussi à la mort
de leur enfant. C'est comme
une espèce de force, parce qu'on met
des mots sur cette espèce
de puissance
de la vie et la mort, mais il y a quelque chose
de... Peut-être qu'on ne meurt pas non plus, peut-être
qu'on va dans une autre dimension, tout simplement.
Quel rapport
vous avez, justement, avec cette autre
dimension-là, tout ce qui
est invisible,
tout ce qui est peut-être là,
mais qui n'est pas perceptible à l'œil nu?
On le sent dans la créativité.
Quand on peint,
je ne dis pas que je fais de la sculpture par rapport au grand sculpteur,
mais tu touches une autre dimension.
Tu n'es pas là. Il y a quelque chose ailleurs.
Et probablement aussi, la vieillesse,
puisque je suis dedans, nous amène aussi dans cette... Des fois, tu es chose ailleurs. Puis probablement aussi, la vieillesse, puisque je suis dedans, nous amène
aussi dans cette... Des fois,
t'es ailleurs aussi. Tu le sais que
tu t'en vas ailleurs. C'est une espèce de côté
zen. Tu fais la différence
entre vraiment la vie
et t'es ailleurs aussi. Tu t'en vas
tranquillement. Je crois qu'on
s'en va tranquillement. Je suis peut-être
un peu mystique, mais je crois pas. On le
sent, ça. On le sent dans...
Et on le sent dans la créativité aussi qu'on est ailleurs.
Donc, vous pensez qu'il y a autre chose que ce qu'on vit?
Il n'y a peut-être rien.
Mais dans le rien, c'est peut-être plein.
Parce que quand on regarde le soir,
quand arrive la noirceur,
je veux dire, la noirceur, c'est plein.
On pense qu'il n'y a rien, mais c'est plein.
Les trous noirs, c'est plein rare.
Effectivement, lorsqu'on s'intéresse
par exemple à ce qui intéressait Uber Eats,
c'est difficile de se convaincre
qu'il n'existe pas autre chose. Mais après,
la science peut expliquer cette autre chose
et la spiritualité, la religion peut expliquer
d'une autre manière. – Mais la religion
extrapole. Mais comme disait Uber Eats, on a seulement
trouvé 10 %.
Il y a 90 % qu'on ne sait pas
et qu'on ne saura jamais. Mais on doit le sentir.
On sent des fois qu'on
vient d'ailleurs. On sent que
c'est peut-être ça qui nous porte à créer, parce que tout le monde
peut créer. Il y a quelque chose qui
vient d'ailleurs. Il y a quelque chose qui vient
d'ailleurs. C'est peut-être pas...
Peut-être que Dieu s'ennuyait, puisqu'on lui donne
un nom. C'est peut-être pour ça qu'il a créé les humains,
qu'il a créé la Terre.
Ça devait être un ennui.
Mais tout va devenir noir.
On sait que le noir, c'est l'éternité.
Dans cette même pièce que j'évoquais,
tous dans la même direction, à la toute fin,
on a une surprise.
On a quelques surprises sur l'album.
On entend la voix de Paul Arcand,
puis on entend la voix de Sophie Thibault.
Puis Sophie Thibault nous parle de carambolage, de mauvaises nouvelles, d'explosion,
ce dont elle parle habituellement dans ses bulletins de nouvelles.
Mais elle termine en évoquant la nouvelle exposition de l'artiste-peintre Dominique Bessner,
qui sera présentée dans une galerie du Vieux-Montréal.
C'est Dominique Bessner qui signe la pochette de l'album. Oui.
Je n'ai pas pu m'empêcher d'entendre dans ce clin d'œil-là
une manière de parler du pouvoir de l'art.
Qu'est-ce que l'art, selon vous, peut faire face à tout ce dont on parle depuis tantôt,
c'est-à-dire les guerres, l'environnement, etc.?
C'est une façon de vivre.
Chacun, chacun, chacun...
C'est parce que les gens ne savent pas qu'ils sont tous créatifs.
C'est sûr que c gens ne savent pas qu'ils sont tous créatifs. C'est sûr que c'était toujours
sur ton téléphone.
Bon, tant mieux.
Même les enfants, quand ils dessinent,
c'est supposé être naturel
de créer.
Donc, l'art
est très important.
Je pense que c'est naturel chez les êtres humains
de créer.
C'est très naturel. Même quand on est enfantains de créer. C'est très naturel. Même
quand on est enfant, on joue. C'est une façon
de jouer. Moi, j'ai étudié quand même
la peinture avec le frère
Jérôme. Le frère Jérôme était quelqu'un quand même
exceptionnel avec
le refus
global et tout ça, les
automatistes. Donc,
c'est une façon de jouer. Je pense qu'il faut créer.
De là que c'est bien aussi
que ce soit un créateur
qui fasse la pochette,
que ce soit un grand, grand
peintre. Bessner.
Vous le citez à quelques reprises dans votre
livre, Mots de tête, le frère Jérôme
avec qui vous avez
travaillé, avec qui vous avez appris.
Puis vous aurez dit, l'artiste
ne doit pas se montrer sous un faux
jour, il doit rester lui-même avec
ses nerfs, avec son caractère,
je dirais presque avec ses défauts.
Lequel
de vos défauts vous a été
le plus utile en tant que créatrice?
Mon défaut?
Il faut faire la paix avec ses défauts?
Oui, oui, mais peut-être ma timidité.
Ma timidité m'a permis de développer,
parce qu'être plus jeune, j'étais quand même
quelqu'un de timide, de renfermer.
Puis perdre sa mère très jeune,
t'as comme une espèce de...
t'as une espèce d'inquiétude toute ta vie.
C'est peut-être ma timidité.
Je sais pas.
J'ai l'impression que ce dont vous a aussi
beaucoup parlé le frère Jérôme,
c'est de l'importance d'être authentique ou d'être vrai.
D'être authentique, puis c'est des faux, ce sont aussi des qualités.
Il m'a dit, il faut que tu restes ce que tu es.
Bon, mais ce que tu es, tu me disais, tu peins comme tu veux.
J'ai dit, oui, mais comment je peux?
Il m'a dit, il ne faut pas penser.
C'est difficile de ne pas penser quand on peint.
Et c'était ça.
Donc, j'ai appris à peindre dans une pièce où on était seul, pas avec les autres. Moi, j'aimais ça être seul. Et là, on on peint. Et c'était ça. Donc, j'ai appris à peindre, bon, dans une pièce où on était seul,
pas avec les autres. Moi, j'aimais ça être seul.
Et là, on pouvait peindre. Je me suis dit, bon, mais comment je peux
peindre sans penser? Je me suis dit, bon,
sans voir. Donc, j'ai appris à peindre
les yeux fermés. – Vous peignez les yeux
fermés? – Bien, au début. T'apprends
à faire du gestuel, les yeux fermés.
Et puis, ça donne une
espèce de liberté. Ça donne...
Puis lui, il savait voir ça.
Puis même quand on faisait des bonhommes puis des trucs, il prenait, il mettait à l'envers.
C'est pas ça qui est important.
Ce qui est important, c'est le gestuel.
On peut regarder ça, une espèce de liberté.
Parce qu'une espèce de liberté,
c'est très difficile de pas penser quand on peint.
Mais c'est la façon de créer.
On doit se lancer.
Et c'est très souvent après une journée de fatigue que là,
que tu fais quelque chose de bien, que tu inventes
quelque chose. C'est quand tu as tout sorti,
tous tes trucs, tes pensées,
c'est là que tu crées vraiment.
On touche à l'inconscient en ce moment.
Oui, aussi.
Est-ce que vous arrivez encore souvent
à vous étonner vous-même, à vous émerveiller
vous-même de ce que vous créez?
Quand je me regarde le visage d'un labinette
dans le miroir, puis que je vois
qu'on change
tellement, on change beaucoup dans la vie,
et que tu vois que la vie passe,
j'essaie de m'étonner,
j'essaie de me...
C'est étonnant aussi parce que la vie nous amène
toujours des surprises.
Parce que tout le temps, il y a toujours d'autres choses dans le journal.
La vie change tout le temps.
L'évolution des gens aussi.
Leur façon de penser.
Comme les plus jeunes, une autre génération me connaissent moins.
Donc, c'est bien aussi.
Ça laisse...
Je suis toujours intéressée aussi par les gens.
Je ne suis pas en dehors du monde.
Je ne suis pas dans le monde, mais je suis très... Je suis les actualités
tous les matins. Je fais tous les trucs.
Ce que j'admire beaucoup chez vous,
c'est votre curiosité.
Vous semblez très curieuse de ce que
les autres font, de ce que les autres créent.
Vous semblez très en contact avec ce que
les autres créent encore aujourd'hui, les jeunes artistes.
Est-ce que c'est un muscle qu'il faut
entretenir, qu'il faut développer la curiosité?
Je crois que oui. Et c'est pour ça peut-être que j'ai donné
des thèmes, des fois, au spectacle
pour la créativité du public
parce que sur scène, moi, je suis vraiment
un moteur. Le public est créatif
aussi. Comment ils peuvent écouter
quelque chose sur scène
que j'ai donné? Mais s'ils ne sont pas
créatifs, c'est qu'ils sont créatifs
puisque ça correspond à ce qu'ils sont.
Donc, c'est pour ça que je donnais la liberté
en donnant des thèmes dans des spectacles
pour que les gens puissent, on appelle ça se travestir
ou s'habiller, se changer.
Donc, je pense que c'était très important
que le public pouvait avoir cette liberté
de pouvoir sortir.
La créativité est très, très importante chez les gens,
même chez les enfants.
Oui, je le constate au quotidien avec mes propres filles,
qui sont très créatives et qui ont beaucoup d'énergie.
Oui, voilà.
C'est pour ça que je suis heureux de passer un moment
en votre compagnie.
Ça me permet aussi de me reposer un peu.
Est-ce que vous avez toujours été de cette manière-là?
C'est-à-dire, est-ce que vous avez toujours eu besoin
de vous éloigner, de prendre une distance
par rapport à la ville, par rapport aux autres?
Ou c'est le succès qui a exacerbé ce besoin-là chez vous?
Non, non, avec ma mère, j'étais comme ça.
Je voulais être dans ma chambre, j'aimais être seule.
Et ma mère me permettait, dans ma chambre,
on ferme la porte puis on fait ce qu'on veut.
En autant que quand on ouvre la porte, tout est replacé.
Ma mère me laissait cette liberté.
J'avais ça, Ma mère comprenait
ça. Puis il n'y avait pas d'heure
avec ma mère non plus. On pouvait
dessiner tard le soir.
En autant que je faisais mes devoirs,
que j'avais tout ce que j'avais à faire, j'avais
une espèce de liberté. Même ma mère
me changeait de vêtements aussi.
J'allais au couvent,
mais après ça, je pouvais m'habiller.
Ma robe de première communion était longue.
On pouvait m'habiller peut-être deux ou trois robes par jour
en comptant la robe du couvent.
Deux ou trois robes par jour?
Oui.
C'est beaucoup de créativité au quotidien.
Ça, c'est une belle école, la créativité.
Oui, oui. Ma mère faisait ça.
Elle faisait de la couture, donc elle aimait m'habiller.
Les robes à clignes et d'abeilles, puis changer de couleur.
Oui, oui, j'étais toujours bien fancy.
Il voulait toujours aussi, d'une certaine manière.
Est-ce que ça ne comporte que des désagréments,
que de vieillir, ou il y a aussi des avantages à l'âge?
C'est assez déplaisant.
D'accord, je pense que j'ai ma réponse.
C'est assez déplaisant parce que'accord. Je pense que j'ai ma réponse. C'est assez déplaisant parce que tu vois ton corps
qui se transforme.
Et donc,
c'est très... Quand tu as la jeunesse,
tu te regardes, bon, il y a une espèce de...
Puis tu ne peux pas non plus
mépriser ton corps qui a beaucoup donné
parce qu'il se transforme, il se transforme.
Mais c'est...
C'est quelque chose. C'est quelque chose.
La vieillesse, c'est à apprivoiser. Et on doit trouver. On doitest quelque chose. C'est quelque chose, la vieillesse. C'est apprivoiser
et on doit trouver autre chose.
On ne peut pas comme ça
bannir la vieillesse.
Il faut inventer autre chose.
Il y a quelque chose dans la vieillesse. La tête
est beaucoup mieux quand on est en santé.
Évidemment, beaucoup mieux parce que
on a fait, on n'a pas tout
fait de sa vie, mais on a une plus grande
liberté. Pas de dire j'en ai rien à foutre, mais pas loin. vie, mais on a une plus grande liberté.
Pas de dire, j'en ai rien à foutre,
mais pas loin.
Donc, ça te permet une espèce de liberté où tu peux...
C'est sûr qu'il y a le corps.
C'est assez spécial de voir ton corps
qui n'est plus le même,
de voir toutes ces rides que tu as sur les...
Moi, je porte des jaquettes.
Des fois, je ne les lève pas.
C'est spécial.
C'est spécial, la vieillesse.
Mais il faut l'apprivoiser. Il faut
l'offrir. Puis il faut inventer
quelque chose aussi pour les nouvelles générations.
Il faut arrêter d'avoir peur de la vieillesse aussi.
On ne peut pas comme ça s'enfermer.
On ne peut pas.
On a beaucoup plus de choses à vivre.
Et c'est l'Amérique qui fait que la vieillesse
est comme bannie. On en a peur.
C'est vrai qu'on est moins beau.
Mais on est beaucoup plus.
On est beaucoup mieux dans notre tête. On est beaucoup plus libre,
je crois.
Plus apaisé?
On ne peut pas être plus apaisé dans un monde comme aujourd'hui.
Il faut être conscient.
Est-ce que vous avez parfois l'impression,
parce que j'ai regardé
plusieurs extraits de vos spectacles au cours des
dernières semaines sur YouTube.
Il y en a plein, c'est merveilleux.
Si on veut se mettre un sourire au visage, il suffit de taper Diane Dufresne,
puis ça va se produire, on va redevenir joyeux soudainement.
Pas tout le temps.
Pas tout le temps, il y a des chansons plus tristes, effectivement.
Mais ce qui nous met en joie, c'est de vous voir aussi énergiques sur scène.
Vous donniez tout, vous donnez encore tout sur scène.
Est-ce que vous avez parfois l'impression d'en avoir abusé
de votre corps sur scène?
Oui, je l'ai montré presque nu.
Moi, qui ne montrais pas mon corps presque
nu aux hommes qui m'ont... J'ai toujours
été pudique. Oui, bien...
Vous êtes sain nu sur la pochette de votre deuxième album, effectivement.
Oui, bien c'est ça. On a des éclairages
sur scène aussi. On est dans un autre
niveau de la scène.
Quand tu montres sur scène, il faut que tu
étonnes. Il faut que tu étonnes pour aller
chercher l'instinct du public.
C'est comme tu es avec un enfant.
Quand tu lui donnes un ballon, un nouveau ballon,
il y a quelque chose, une espèce de joie.
Et ça, c'était pour moi,
c'est ce que j'aimais offrir.
Quand tu ouvres les cœurs
et que tu ouvres la pensée, tu peux peut-être
aller donner peut-être un autre
sentiment.
Avec Luc Plamondon, il donnait
toutes sortes de... Même les peurs. On pouvait chanter
les peurs aussi. La peur de la vieillesse, la peur
de... La peur de la folie.
La peur de la folie. C'est exactement ça.
C'est pour l'apprivoiser. C'est pas pour la donner.
C'est pour l'enlever.
C'est ça que ça permettait.
À chaque fois que vous parlez de Richard Langevin, vous avez l'étincelle pour l'enlever. Alors, c'est ça que ça permettait, en fait.
À chaque fois que vous parlez de Richard Langevin,
vous avez l'étincelle dans l'œil.
Oui. Comment est-ce que cet amour-là vous a transformé?
Moi, d'ailleurs, je pensais
que ma carrière était faite. Je me suis dit,
bon, il faut arrêter à un moment donné. Quand j'ai fait le stade
que j'ai eu, les critiques que j'ai eues,
je me suis dit, bon, bien, je n'ai pas exprès pour mettre
le... Donc, je me suis dit, c'est OK, faire un stade,
c'était quand même un grand privilège.
Et vous n'aviez même pas 30 ans. Vous alliez avoir 30 ans
lorsque vous avez fait le stade. Vous aviez 29.
Oui. Ah! Je me suis dit, bon, il faut que ça arrête.
J'avais une carrière, bon,
en France. Je me suis dit, bon,
je vais la faire tranquillement, bon, tout ça.
Je me suis dit, bon, et les critiques étaient...
Et puis, j'ai rencontré, bon,
Richard Langevin, et ça a fait que lui, il disait,
« Mais pourquoi tu arrêtes?
Pourquoi pas continuer? »
Je me disais, « Ah! »
Je lui ai dit, « Je vais continuer si tu es là. »
Il m'a dit, « Je serai toujours là. »
Et il est encore là.
Il a tenu sa promesse.
Oui, puis pour lui, c'était très important
qu'on puisse voir.
Je me disais, « Mais pourquoi? »
Il a gardé toutes les robes, tous les costumes.
C'est ça, bon.
J'ai eu un feu. J'ai eu un feu.
J'ai eu un feu il y a plusieurs années.
Et les pompiers se sont couchés sur les costumes pour les sauver.
Donc, je me suis dit, quand il y a eu le feu,
je me suis dit, oh, bon, OK, les costumes.
Je n'arrivais pas à m'en défaire, les costumes.
Même s'il y a certaines personnes,
certains établissements qui voulaient faire des expositions
de mes costumes, je me disais, oh.
Et Richard, lui, bon, il les a regardés dans son bureau costumes. Je disais, oh, et Richard, lui, bon,
il les a regardées dans son bureau.
Je me disais, oui, mais quand même,
les mythes, les choses, les souris.
Et les costumes étaient, pour cette exposition,
bien sûr, ils étaient un peu froissés,
mais ils étaient impeccables.
Donc, c'est comme s'il avait passé le temps.
Et lui, bon, faire une exposition
avec son amoureux, c'est bien.
Parce que lui a toujours...
Il me dit, mais pourquoi t'arrêtes?
Le monde sont là. Il me dit, il a tout
remonté la pente.
Et je l'ai fait par amour.
Et j'ai retrouvé l'amour
du public, c'est bien. Puis c'est bien
de vieillir aussi, parce que le mot est là.
J'ai quand même 80 ans.
De vieillir, peut-être j'en vais en faire moins.
Mais je ferai toujours... Il n'y a pas d'arrêt pour moi. Peut-être
que ça va arrêter, mais il n'y a pas d'arrêt.
Quand il y aura toujours des sujets
qui me donneront de l'inspiration, j'y retournerai.
Je retournerai sur scène,
je ferai des choses. Bien là, la preuve,
à 80 ans. Puis tout est arrivé
en même temps. Je n'ai pas choisi le timing
de tout ça, l'exposition. C'est que l'exposition
a été retardée, le disque aussi,
et tout arrive en même temps.
Parce que vous auriez pu arrêter d'enregistrer des albums
après votre premier disque ou après votre deuxième
et chanter ces chansons-là
pour le reste de votre vie et vous auriez eu
des contrats pour toujours.
Ça aurait été plus facile.
Ça aurait été moins exigeant,
mais créativement moins satisfaisant.
Oui, ça, c'est dans ma nature.
Je vais faire toujours la même chose.
C'est OK, ceux qui sont bien là-dedans,
mais moi, ce n'est pas dans mon tempérament, non.
Pourquoi est-ce qu'on les met de côté,
les personnes qui arrivent à un certain âge,
les personnes âgées,
alors que ce ne sont pas toutes les personnes âgées
qui sont aussi créatives que vous,
mais il y en a plein, des gens de votre âge
qui le sont, à leur manière.
C'est une espèce de
système, probablement.
C'est qu'il ne faut pas trop être, justement,
un peu outsider.
Si tu n'es pas outsider, tu rentres dans un système
et la vieillesse, ça fait peur.
Et il y a de quoi avoir peur,
parce que c'est spécial. Quand tu vois ton corps
qui se transforme, surtout quand tu es une femme,
quand tu vois tout ça, tous les charmes, tous les...
Moi, j'ai la chance d'avoir des maquilleurs,
de tous les coiffeurs,
de monter sur scène, d'être dans la lumière.
Mais c'est sûr que, bon, tu peux rester amoureux
tout le restant de ta vie, mais quand même,
il y a la maladie, il y a la mort,
c'est épeurant, la vieillesse.
Puis il y a de quoi avoir peur.
Mais on peut trouver des trucs pour... Parce que la tête, c'est pas le cerveant la vieillesse. Puis il y a de quoi avoir peur. Mais on peut trouver des trucs pour...
Parce que la tête, c'est pas le cerveau
qui vieillit, c'est qu'on nous fait
vieillir d'avance. Avec tout ce qu'on dit, on a peur
des vieux. On a peur de vieillir.
Je comprends. Ils ont raison. Donc, il faut
inventer quelque chose. Donc, voyez-vous comme là,
je vous parle et je me dis, ah my God,
mais je perds la mémoire. Et déjà, ça te fait peur.
Mais il faut oser dire
je suis rendu où et c'est pas grave, on continue pareil. Parce déjà, ça te fait peur. Mais il faut oser dire « Je suis rendu où? » Et ce n'est pas grave,
on continue pareil. Parce qu'on est vivant.
Écoutez une seconde. Puis quand on
lit la Kabbalah, ce qui est drôle,
je ne la lis plus, mais quand on lit la Kabbalah,
un vieux ou un jeune
a la même valeur. Et c'est ça.
C'est un être humain.
On peut être créatif très, très âgé
aussi. Parce que quand on
garde des grands, grands créateurs, je veux dire, il reste la créatif très, très âgé aussi. Parce que quand on garde des grands, grands créateurs,
je veux dire, il reste la créativité, c'est toujours jeune.
On m'a raconté, je n'y étais pas,
mais on m'a raconté qu'à la première de la nouvelle mouture de Starmania,
qui était présentée à la Place Belle, au mois d'août,
vous étiez là, puis que vous avez dû traverser la scène
avec Luc Plamondon au début du spectacle pour aller rejoindre votre siège.
Puis les gens vous ont vus et vous ont spontanément applaudi
parce que vous avez tous les deux grandement contribué
à la création de la première version de Star Mania.
C'était comment de vivre ce moment-là?
C'était extraordinaire.
C'est Luc qui a téléphoné.
Et puis, bon, je l'avais vu, Luc.
Je rencontrais Luc, il venait voir mes spectacles.
Moi, je n'ai jamais retourné voir Starmania
parce que je ne voulais donner aucun avis.
Je me suis dit, non, je ne vais pas donner mon avis.
J'ai fait quelque chose, mais je ne vais pas donner mon avis.
Et à Paris, mon producteur m'a dit,
mais Diane, va voir Starmania, il se passe quelque chose.
J'ai dit, je ne vais pas voir Starmania.
Puis tout ça, bon, je ne vais pas voir Starmania. Je ne vais pas donner de critique.
Je ne vais pas faire ça.
Je suis allée le voir.
J'allais voir la dernière version.
J'ai eu beau me mettre un chapeau, me mettre un truc.
On m'attendait et c'était vraiment une super version.
Après ça, quand je suis revenue,
même lui qui était au téléphone,
tout le monde m'attendait.
Je ne comprenais pas comment ça se fait
qu'on m'attendait comme ça.
Vous êtes Diane Dufresne.
Moi, je ne pense pas à ça.
Moi, je ne pense pas à ça dans la vie.
Et ensuite, Luc m'a appelée
quand il s'est arrivé à Montréal.
Luc, ça a toujours été un des hommes de ma vie.
Luc, ça a toujours été à la métier.
Mais je me suis dit...
Il y a eu une période où Luc me disait,
maintenant, je vais faire mon truc.
J'ai dit OK.
Et là, c'était une séparation.
C'était pour moi une grande peine d'amour
parce que c'est une grande peine d'amitié.
Et tout à coup, là, il m'a...
Il y a eu beaucoup de choses à l'histoire maniaque
qu'on aurait pu faire, que j'aurais pu faire,
des télévisions que j'aurais pu...
Mais j'ai toujours évité ça.
Je voulais pas rentrer dans...
Non, je suis pas...
Et puis là, c'est arrivé.
Le dernier spectacle qui est arrivé à Montréal.
Ils m'ont téléphoné.
C'était un plaisir.
Quand j'étais entrée dans la porte,
c'était comme l'un des hommes de ma vie.
Luc, c'est un des hommes de ma vie.
Et ça a été fantastique.
C'est lui qui voulait que j'aille dans la salle.
Puis lui, parce que lui, il aime ça, les bras, tout ça.
Moi, c'est un peu moins.
Je le regardais.
Puis il est toujours, toujours beau.
Et on se rappelait des choses.
Et c'est un des hommes de ma vie, Luc.
J'ai Richard Langevin, mais c'est aussi Luc Plamondon.
J'avais compris que vous avez déjà été en chicane avec lui.
Est-ce que c'est vrai ou c'est exagéré?
La chicane, non, ce n'est pas une chicane.
C'est que quand j'ai fait le Cirque d'hiver,
on avait fait un disque qu'on avait fait à Londres,
Dioxène de carbone.
Moi, je voulais intégrer des chansons.
Il m'a dit, si tu fais ça.
Luc avait quelque chose à faire.
Il avait quand même...
C'est lui qui voulait...
Il avait quelque chose à dire de beaucoup...
Pas plus grand que moi, mais autre chose,
des opéras, des trucs.
Donc, il n'était pas bien dans ça.
Il m'a dit, si tu fais ça,
ça va être ça,
ou je serai plus là.
Bien, j'ai dit, écoute...
Puis j'avais tellement peur que ça en aille,
comme quand t'es en amour,
si jamais il part, tu pourras plus vivre.
Puis je me suis dit, bon, bien, là,
il faut qu'il s'en aille,
puis il faut qu'il dégage.
Parce que là, c'est plus sain,
c'est plus... c'est épeurant,
parce que sans le plamondon,
qu'est-ce que je pourrais faire?
Bien, il faut que t'écrives.
Il faut que tu trouves quelque chose.
Donc, il est parti. Puis ensuite, bon, il a fait tout ce qu'est-ce que je pourrais faire? Il faut que tu écrives. Il faut que tu trouves quelque chose. Donc, il est parti.
Puis ensuite, il a fait tout ce qu'il a fait.
C'est vous qui l'avez mis à la porte
ou c'est lui qui est parti?
Non, il n'y a pas eu de porte.
C'est ainsi.
On avait fait beaucoup, beaucoup...
Il fallait qu'il fasse...
Regarder tout ce qu'il a fait
parce qu'il a fait beaucoup de disques,
en fait, avec moi.
Ça a toujours été une histoire d'amour
et de grande amitié. Et je le voyais
quand je faisais même Dioxane de carbone.
Bon, il prenait pas l'avion en même temps
que moi. On a fait beaucoup de voyages
à New York. On a vu beaucoup de comédies musicales.
On faisait beaucoup de choses ensemble.
C'était un ami.
Et quand j'ai vu qu'il était pas bien
et qu'il a fait des choses,
alors... Puis là, on s'est retrouvés.
On s'est retrouvés à Montréal pour cette manière.
C'était fantastique. – Parce que votre amitié
remonte, corrigez-moi si je me trompe,
à votre premier séjour à Paris dont on parlait
tantôt. C'est à ce moment-là que vous vous êtes rencontrés.
– Oui. On s'est rencontrés avant. On s'est rencontrés
grâce à André Gagnon.
– Oui. – Grâce à André Gagnon.
C'était son ami.
Et puis, il était très, très jeune,
Luc. Et c'était juste un ami.
Pas d'enfance, mais d'adolescence.
J'avais probablement 19 ans.
Puis c'était comment d'avoir
19-20 ans et de se promener
à Paris avec son ami Luc Plamondon?
C'est fantastique parce que c'était un promeneur.
C'était un promeneur.
Il connaissait tout. C'était
un professeur. Il était très...
Luc était très cultivé par rapport à ce que moi, j'avais un professeur. Il était très cultivé
par rapport à ce que moi,
j'avais reçu comme culture.
Il était très cultivé.
Puis il écrivait, mais il ne me montrait pas ses textes.
Je ne savais pas qu'il pouvait écrire des chansons.
À ce moment-là, vous ne saviez pas ça?
Je ne savais pas ça.
Il étudiait l'art quand même, Luc.
Puis il nous amenait dans des expositions.
On faisait des promenades,
on passait Noël ensemble.
Il n'était pas timide, mais il ne parlait pas
beaucoup. Et justement,
il se préparait, Luc Plamondon.
Puis à quel moment il vous a fait la grande révélation,
la grande annonce qu'il était aussi
un parolier? Bien, c'est-à-dire qu'avec
François Cousineau, on avait des...
Je chantais des chansons de films, et puis
je connaissais Luc.
Il avait fait des textes avant.
Il est arrivé avec L'homme de ma vie.
Tous les textes.
C'était bien.
Il disait beaucoup de choses que j'aurais voulu dire et que je ne pouvais pas.
Vu que c'était mon ami,
il écrivait beaucoup de choses que je voulais dire.
Tu ne penses pas que ce qu'on écrit
pour toi
va correspondre à ce que le public pense
aussi et c'est ça que Luc a donné
de toute façon Luc c'est un
grand poète, entendons-nous bien
il a changé l'univers de
la chanson
Ce sont lesquels les autres hommes de votre vie
outre Richard Langevin
et Luc Plamondon?
Mon père, mon père aussi
on le sait pas quand c'est son père
que c'est l'homme de sa vie. Mais mon père était
quelqu'un d'aussi
qui aimait beaucoup
les arts.
Mais qui aimait aussi aller
à New York avec ma mère, mon père,
disons. Mon frère, j'ai beaucoup aimé
mon frère aussi. Les hommes de ma vie.
Les autres, on les oublie
parce qu'il faut les oublier.
Ah, le frère Jérôme.
Le frère Jérôme était très, très, très important.
Dans
Mots de tête, votre livre,
vous parlez de vous
en utilisant l'expression la chanteuse.
C'est comme s'il y avait deux entités. Il y a Diane Dufresne,
la femme du quotidien, puis
il y a la chanteuse.
Quelle est la différence entre ces deux personnes-là?
Dans la vie, je ne vis pas comme une chanteuse.
Je ne sais pas comment je vis, mais je vis peut-être comme une ermite,
mais je vis avec quelqu'un, donc je ne peux pas dire ça.
La chanteuse, quand je deviens chanteuse, c'est autre chose.
Ma vie est différente.
Il y a une discipline, je deviens chanteuse, c'est un autre...
Je n'ai pas le même caractère.
Je m'en vais sur scène.
On ne peut pas venir trop...
On peut me déranger.
Quand je dis déranger, c'est-à-dire que, bon,
il faut que je me remette en...
D'abord, j'écris mes spectacles.
Donc, j'écris mes enseignes.
Peut-être que ce n'est pas
toutes les paroles
de mes chansons, mais j'écris mes spectacles.
Vous vous asseyez et vous écrivez le spectacle.
Oui.
Oui.
J'écris le spectacle.
Oui.
Je le visionne.
Et je me mets comme si j'étais dans la salle.
Donc là, je rentre dans le monde de la chanteuse,
qui appartient un peu comme quand j'étais enfant
et que je faisais mes spectacles avec la boîte en carton.
Il y avait le spectacle.
Donc, je me remets là-dedans. Et là, je deviens quelqu'un. Je nete en carton. Il y avait le spectacle, donc je me remettais,
je me remets là-dedans.
Et là, je deviens quelqu'un.
Je ne dois pas être très, très plaisante
quand je prépare un spectacle.
Il ne faut pas trop me déranger
parce qu'il faut que je sois centrée vraiment.
Et je suis vraiment centrée sur le spectacle.
Je m'en vais voir les gens.
Ce n'est pas rien d'aller voir des gens.
Ce n'est pas rien d'aller voir du public.
Chaque personne qui est dans la salle a une vie.
Chaque personne est importante.
C'est une responsabilité.
Pas que je la prends comme ça, c'est-à-dire que c'est une responsabilité.
Il faut qu'ils trouvent... C'est un échange.
Et cet échange doit être le plus...
le mieux possible dans la condition
qu'on est.
Donc, vous avez toujours eu un grand souci
puis une grande estime pour l'intelligence
de votre public.
Bien, c'est du monde.
C'est pas rien, le monde. C'est du monde. C'est pas rien, le monde.
C'est pas rien. C'est un échange puis ça amène ailleurs.
C'est pas rien si...
Moi, j'ai pas eu toujours beaucoup de liberté.
C'est bien si on peut donner une espèce de liberté,
bon, avec les costumes qui sont extravagants,
si ça permet de rire et de
trouver une liberté, tant mieux. Si les gens
retournent chez eux avec une espèce de créativité,
la créativité probablement est un échange aussi., tant mieux. Si les gens retournent chez eux avec une espèce de créativité, la créativité probablement est un échange aussi, tant mieux.
Luc Plamondon a écrit une grande chanson
dans laquelle il est question de la beauté du monde,
qu'il ne faut pas tuer,
que vous interprétez magnifiquement, évidemment.
Vous la voyez où, la beauté du monde?
Parce qu'on a beaucoup parlé au cours de cette conversation de la laideur qui est présente dans notre monde, mais la beauté, vous la trouvez où? Des enfants, aller chez les animaux, aller dans tout l'espoir qu'on a.
La beauté est partout.
Elle est même dans la laideur aussi.
Peut-être pas dans les guerres, c'est impossible.
Mais il faut la trouver.
Il ne faut même pas la chercher, il faut qu'elle soit naturelle.
Il faut la voir.
Il faut prendre le temps, justement, des silences
et essayer de voir la beauté même dans une feuille. Il faut se centrer pour la voir. Il faut prendre le temps justement des silences et essayer de voir la beauté
même dans une feuille.
Il faut se centrer pour la voir.
Elle est où? Chez les enfants? Chez les bébés.
Chez les bébés. C'est joli. Ils sentent bon.
C'est déjà là.
C'est vrai qu'ils sentent bon, les bébés.
C'est très vrai.
Vous mettez un sourire au visage. Je pense à ma fille.
Elle sent très bon. Elle a un an.
Oui.
À quoi vous rêvez, Mme Dufresne?
Je rêve à du nouveau,
mais sans savoir exactement c'est quoi.
Je rêve à quelque chose de différent.
J'ai l'impression de toujours
de ne pas avoir fait grand-chose
et de toujours...
Vous êtes sérieuse?
Oui.
Oui, oui.
Bon, c'est ça,
quand je vais à l'exposition de Richard.
C'est difficile de nier que vous avez fait quelque chose.
Je le regarde et je vois les gens qui regardent
et puis ensuite qui viennent te voir.
Ça, ça crie autre chose, mais...
Inventé, j'espère que...
Justement, la vieillesse, la vieillesse,
la vieillesse, c'est un poids.
Il faut y donner de la légèreté et c'est tout un boulot.
Ce balado-ci s'intitule « Juste entre toi et moi ».
Alors, ma dernière question sera celle-ci.
Est-ce que vous auriez une dernière chose à me dire
qui resterait juste entre vous et moi?
Je ne pensais pas passer à travers cette émission.
Ça n'a pas trop mal été?
Est-ce que ce n'était pas trop souffrant?
Non, c'était agréable parce que vous êtes doux
et que vous laissez parler.
Est-ce que vous accepteriez de me parler
d'un de mes chanteurs préférés
qui s'appelle Serge Gainsbourg,
avec qui vous avez collaboré?
Vous l'avez un peu connu.
Oui.
Il était comment, Serge?
Il était extraordinaire.
Il était vraiment quelqu'un de, pour moi, de doux.
Bon, c'est un grand...
C'est un génie, on se comprend.
Il était quelqu'un de doux, quelqu'un...
Je l'ai connu parce que je suis allée le voir
s'il pouvait faire des chansons.
Je me suis dit, bon, il pourrait pas faire.
Je t'aime tellement pas son monde.
Et c'était quelqu'un de très, très gentil.
Un grand, grand créateur.
Un jour, il est arrivé chez moi.
Je me suis dit, je vais l'inviter à manger.
Je ne pense pas que...
Dans ce temps-là, j'étais une grande cuisinière.
Il est arrivé avec la belle Jane Birkin à la maison.
C'était très impressionnant.
Il était très gentil.
C'est des gens très, très gentils.
Jane Birkin et Serge Gainsbourg, c'était des amours.
Je suis allée chez lui aussi pour...
Sur la rue de Verneuil, dans son hôtel particulier.
Oui, la rue de Verneuil.
Oui, oui.
Il avait quitté Jane.
Donc, c'était une période très triste
avant de devenir Gainsbourg.
Et il m'avait ouvert tout son livre de textes. Il m'a dit,
« Bon, choisis ce que...
Choisis quelque chose. » C'était très impressionnant.
C'était quand même... Il était très gentil,
d'une douceur.
Donc, c'est ce que je garde de lui.
C'est sûr que sa mort, de mourir seule,
mais probablement qu'il voulait...
Mais c'est une très, très belle rencontre.
C'est un des grands poètes.
Lui, puis quand même Brassens aussi.
C'était quelqu'un de... C'est des grands
messieurs. Puis vous avez interprété
Les deux Souchiques de Gainsbourg. Oui.
Magnifique chanson. Qui est mieux
interprétée, je pense, par Jane aussi.
Qui est très bien interprétée par Jane, mais votre version
est très belle aussi. Merci beaucoup,
Mme Dufresne. C'est moi qui vous remercie. Ça a été un honneur.
Merci.