Juste entre toi et moi - Richard Séguin

Episode Date: June 12, 2023

Richard Séguin accueille Dominic dans l’église de Saint-Venant-de-Paquette, le temps d’un entretien autour de son enfance, son rapport au territoire et sa relation avec le peuple innu.... Aussi au menu : sa rencontre avec Springsteen et une anecdote impliquant Florent Vollant et Richard Desjardins dans un spectacle de Neil Young.

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Starting point is 00:00:00 Sous-titrage Société Radio-Canada spécial de Juste entre toi et moi. Oui, déjà un épisode spécial. Spécial parce que nous avons fait pas mal de route pour se rendre jusqu'à notre invité. Il y a quelques semaines, le photographe Dominique Gravel, le technicien de son Bastien Gagnon la France et moi-même, nous nous sommes rendus à Saint-Venant-de-Paquette, un petit village estrien d'une centaine de citoyens
Starting point is 00:00:40 et nous sommes allés rencontrer celui qui est en quelque sorte le maire officieux de Saint-Venant-de-Paquette, son résident le plus connu en tout cas. Je parle bien sûr de Richard Séguin, Richard qui nous a accueillis en nous tendant la main dès que nous sommes descendus de la voiture. Je pensais que je me rendais à Saint-Venant pour faire une entrevue avec Richard Séguin, mais je ne me doutais pas que je passerais l'après-midi au complet avec lui.
Starting point is 00:01:02 Richard nous a d'abord invités à prendre un café à la Maison de l'Arbre, puis nous a fait visiter l'église de Saint-Venant, une église qui est aujourd'hui désacralisée. C'est pas loin de là que se trouve le célèbre sentier poétique de Saint-Venant de Paquette. C'est d'ailleurs dans la sacristie de l'église qu'on a enregistré cet entretien. La sacristie, c'est maintenant une galerie d'art. Richard avait apporté pour tout le monde des copies de ses plus récents albums, Les liens, les lieux et Retour à Walden sur les pas de Thoreau,
Starting point is 00:01:31 son album inspiré de l'oeuvre du philosophe et poète américain Henri-David Thoreau. Pour le récit complet de notre journée, je vous invite à lire mon article dans La Presse Plus ou sur lapresse.ca. Ce que vous allez entendre dans quelques instants, c'est Richard qui nous raconte comment il s'est installé à Saint-Venant en 1973. Voici mon entretien avec un homme qui chante. Richard Séguin. Juste entre toi et moi Ça restera entre toi et moi Pour une fois
Starting point is 00:02:07 ça reste entre toi et moi On ne savait pas qu'on cherchait une terre parce qu'on a acheté avec ma soeur, on était les quatre, elle et son conjoint, on a acheté à quatre au départ, puis était les quatre, elle et son conjoint. On a acheté à quatre au départ. Puis les terres n'étaient vraiment pas chères ici. C'est pour ça qu'on s'est envenus ici.
Starting point is 00:02:33 On nous avait dit, on cherchait autour de Magog. C'était pas accessible pour nous autres. Et puis c'est ça. On venait d'une tournée pancanadienne de la minorité francophone. Fait qu'on a acheté une terre sans ordre pour 10 000 $. 10 000 $. Ça coûterait un peu plus cher que ça aujourd'hui.
Starting point is 00:02:47 Mets-en, ouais. Puis pourquoi est-ce que vous cherchiez, que vous souhaitiez sortir de la ville à ce moment-là? À l'époque, c'était ce qu'on appelait le retour à la terre. Et puis il y avait comme... Je pense qu'on faisait partie
Starting point is 00:02:59 d'un mouvement collectif. En même temps, ça se passait... On était d'abord à Magog, où on avait ouvert un café avec Richard Pouliot. C'était un café... On appelait ça le Café Duquet. C'était un entrepôt de Lucky One qu'on a transformé en café. On était à repayer des tables, tout ça. C'est là que t'as rencontré Serge Thierry et Michel Rivard
Starting point is 00:03:21 et compagnie. Oui, c'est ça. Mais c'était la Canoe Bleue, à l'époque. Ils venaient jouer là. Jimmy Bertrand, Raoul Duguay, Michel Garneau. Ensuite, il y avait aussi toute une section d'auteurs de faux seigneurs américains qui étaient les Broad Dodgers,
Starting point is 00:03:37 qui fuyaient la gare du Viettab, qui étaient installés dans les cantons d'Est. C'était du monde. Il y avait cette atmosphère-là, je peux dire, à la fois de communes, de collectifs. Puis on n'ouvrait le café que l'été. Ça a duré pendant trois ans à peu près. Et puis le café était devenu le lieu de rencontre. C'est là qu'on avait rencontré Harmonium pour la première fois, avec les improvisations. Puis la scène était ouverte, ça fait qu. On a eu droit à des bons jobs. À quel moment
Starting point is 00:04:05 tu t'es senti chez toi pour la première fois ici à Saint-Venant? Ça a été quand on a commencé à avoir une réelle rencontre avec les gens qui habitaient ici. D'abord, il y avait comme... Il y avait une communauté de gens
Starting point is 00:04:21 qui étaient des agriculteurs, d'autres qui faisaient de la culture du sapin. Et puis nous autres, on est arrivés aussi en groupe. Dans les années 70, ça a été la commune. C'était des communes musicales. On ne faisait pas de l'agriculture ou quoi que ce soit. Et puis aussi, on avait des projets collectifs, comme l'écriture de « Deux ennuis à l'heure », ça s'est fait ici.
Starting point is 00:04:45 Déjà, à l'époque de l'héptade, Michel Normandeau avait acheté une maison dans le village. Donc Serge était là souvent. Michel Rivard était là aussi. Ça se passait l'été. Quand l'été arrivait, il y avait beaucoup de monde. Et puis c'est ça, on a commencé à penser à un projet. À l'époque, on était les trois à écrire pour ce projet-là.
Starting point is 00:05:05 Michel Guivard, Fiori et toi. Oui, c'est ça. Ça a failli être un projet à trois, Fiori Séguin. Oui, parce que Michel avait commencé... Bien, Michel, il travaillait tout le temps. Vraiment, il était... Des photos de lui, il était toujours à la table en train d'écrire.
Starting point is 00:05:20 Il était bien, bien, bien... Il avait une grande rigueur. Que vous n'aviez pas forcément, Serge et toi. Non, pas forcément. Et puis, il y avait aussi le phénomène que quand il arrivait ici, c'était un espace à la fois de repos, un espace communautaire.
Starting point is 00:05:37 En même temps, c'était comme se nettoyer, se désintoxiquer de tout ce que la ville pouvait nous apporter. Mais c'est vrai qu'on sent, ça fait peut-être une demi-heure qu'on est arrivé, puis moi, je me sens déjà beaucoup plus calme que lorsque je suis parti de Montréal, il y a deux heures et demie. Oui, moi, ça a été essentiel. D'ailleurs, tout ce que j'ai écrit,
Starting point is 00:05:54 à l'acceptance de peut-être six ou sept chansons, ça a toujours été composé ici. Je ne sais pas si c'est une superstition, mais à la longue, c'est comme tu te dis, c'est mon ancrage. Puis moi, je me considère pas comme un poète, je me considère comme un artisan. Je travaille avec la lenteur
Starting point is 00:06:14 que ces lieux-là m'inspirent. Mais c'est intéressant parce qu'il y a plusieurs de tes chansons, surtout dans les années... fin des années 80, début des années 90, qui parlent de l'urbanité, qui parlent de la ville. Mais tu les as écrites ici, à Saint-Venant, aux, qui parle de l'urbanité, qui parle de la ville. Mais tu les as écrites ici, à Saint-Venant, aux antipodes de l'urbanité. Mais ça, c'est ça,
Starting point is 00:06:29 c'est le mystère de la création aussi. Quand tu es loin de ça, souvent, t'es plus près. Si on est en loin de la ville, des fois, on s'en rapproche. C'est comme une meilleure perspective de ce qui peut se vivre en ville. Souvent aussi, c'est comme quand j'arrive ici, tu te trouves devant ta feuille et puis tu vois un paquet de gens que tu as côtoyés
Starting point is 00:06:48 durant la tournée puis je dis qu'ils sont... c'est le paradoxe de l'écriture. Tu es seul, mais tu es entouré de tout ce que tu as vécu, tout ce que tu as côtoyé. Puis au niveau de mes influences, c'est surtout la route avec les musiciens. C'est eux autres qui m'apportent mes plus grandes influences musicales. Parce que quand on est en route, on échange beaucoup. Il y a beaucoup de découvertes
Starting point is 00:07:16 qu'on fait ensemble, puis on suggère d'écouter ça. Ou même eux autres ont déjà des projets personnels. L'influence musicale me vient beaucoup d'eux autres beaucoup de mes musiciens. En écoutant ton plus récent album, je me demandais justement,
Starting point is 00:07:29 en écoutant la chanson Habité, si tu avais entendu un groupe américain qui s'appelle The War on Drugs. Non, je ne connais pas ça. Parce que cette chanson-là, ta chanson Habité, ressemble beaucoup. Ce que fait The War on Drugs ressemble pas mal à ce que certains musiciens américains
Starting point is 00:07:42 faisaient dans les années 70-80. Tout finit par se recycler et par revenir. Je t'enverrai un lien pour que tu écoutes Do-A-R-A-D. C'est une chanson qui a été drôlement construite parce que j'ai découvert la guitare bariton. C'est une guitare exceptionnelle. C'est comme deux tons et demi plus bas qu'une guitare ordinaire. Et puis, j'ai commencé à jouer avec ça. La guitare nous suggère beaucoup de créer des musiques en spirale.
Starting point is 00:08:12 Et puis, j'avais une série d'accords qui roulaient tout le temps. Et puis, quand François de Carcoy est arrivé, c'est là qu'il a mis son piano. Il a comme bouleversé un peu la chanson. Pas la chanson, mais la trame musicale. C'est quelque chose de très atmosphérique. Exactement.
Starting point is 00:08:27 De très envoûtant. Oui. Et puis, je voulais avoir ce genre de progression-là, habiter, tu sais. Je voulais habiter beaucoup de choses qui m'entourent ici, tu sais, quand on lit les paroles.
Starting point is 00:08:40 Avec une note d'espoir à la fin. Je ne suis pas capable de tomber dans la... J'ai comme l'espoir à la fin. Je ne suis pas capable de tomber dans la... J'ai comme l'espoir volontaire. Je ne suis pas capable de laisser les gens avec une note désespérée. C'est une décision que tu prends de rester du côté de l'espérance? Parce que si tu laisses aller,
Starting point is 00:09:01 tu pourrais sombrer de l'autre côté? Regarde le chaos dans lequel on vit, c'est facile de dire, tu sais, si on y va de façon rationnelle, on s'entend que on est loin de la perspective d'espérance. Mais moi, j'aime quand l'effet Miron, quand on a fait le projet
Starting point is 00:09:18 Miron, le collectif à 12 hommes rapaillés, dans mon texte, moi je faisais un texte de Miron, compagnon des Amériques, etés. Dans mon texte, moi, je faisais un texte de Miron, compagnon des Amériques, et puis dans son texte, il disait « Je serai porteur de ton espérance ». Cette phrase-là, à ma compagnie, tu ne peux pas savoir. « Je me ferai porteur de ton espérance ».
Starting point is 00:09:37 Puis même le mot « espérance », j'avais de la difficulté à l'assumer avant Miron, avant d'habiter les mots de Miron en chanson. Je trouvais que ça se faisait trop judéo-chrétien avec la culture qu'on a eue. Mais à la lecture de ce texte-là, puis la façon de le chanter,
Starting point is 00:09:56 être porteur d'espérance, je trouve que ça donne toute une signification de ce qu'on peut faire en tant qu'artiste, puis au niveau même de la création. Ça demande un gros effort de se tourner versiste, puis au niveau même de la création. Ça demande un gros effort de se tourner vers un côté plus lumineux de la création. En tout cas, moi, c'est ce que j'ai choisi.
Starting point is 00:10:11 Je te pose une question peut-être un petit peu étrange, mais quel genre de vie spirituelle as-tu? C'est une question qui est appropriée parce que présentement, on est dans une église, mais il y a plusieurs de tes chansons où il me semble qu'il est question de ça. Croire en cherchant son étoile. Oui, bien, il y a plusieurs de tes chansons où il me semble qu'il est question de ça. Croire, en cherchant son étoile.
Starting point is 00:10:27 Oui, bien, il y a une sacralité païenne qui m'habite. Et puis, je ne peux pas nier, on a été élevés à l'étrovenneux dans l'église catholique. Tu sais, toutes ces années-là. On ne peut pas complètement s'en débarrasser.
Starting point is 00:10:41 Mon père chantait. Il y avait deux sortes de musique à la maison. Il y avait la musique de party qu'il faisait avec ses frères, ma tante Mairie, Paul, mon grand-père au violon, mon père jouait de l'accordéon. Ça, c'était une musique
Starting point is 00:10:57 qu'eux autres faisaient. Des rites écossais, des rites irlandais, quelques chansons traditionnelles. Et puis, il y avait la musique sacrée. C'était le groupe des Séguins qui chantait à l'église. Puis je me souviens, mon père qui répétait les sept paroles du Christ, puis tout ça. Ça fait que c'est sûr qu'on a été élevés de là-dedans.
Starting point is 00:11:16 Même toutes les références, que ce soit des trompettes de Jéricho ou encore... Des choses que... Comment... J'avais fait une chanson terre de caen la terre de caen puis je dis c'est très bien d'être une autre génération après cette terre de caen c'est ça va pas de quoi je parle mais c'est non c'est sûr que je dis a eu... L'empreinte de la religion catholique a été très forte sur la famille. On s'en est détaché.
Starting point is 00:11:49 Dans les années 70, c'était l'ouverture vers la méditation, vers le monde oriental. Après ça, c'était... Non, je pense que c'est plus l'humanisme qui m'habite. Mais tu as renoué avec le mot « espérance », grâce à Miron. Oui. Le décor de ton enfance, ça ressemblait à quoi?
Starting point is 00:12:10 C'était assez différent d'où on se trouve présentement. Oui, parce que c'était des raffineries de pétrole. Mon père travaillait dans les raffineries. Il a dû quitter. Dans ce temps-là, tu sais, dans la famille, il y en avait un qui devait se sacrifier pour les autres. Il choisissait quelqu'un qui allait travailler et puis les autres pouvaient
Starting point is 00:12:28 poursuivre leurs études. Mon père en a souffert de ça. Je l'ai évoqué un peu dans la chanson de Garage du dernier album. C'était comme quelqu'un qui n'avait pas pu réaliser ses rêves. Il y avait un genre de frustration silencieuse tout le temps. C'était des hommes de silence. Et puis, je pense qu'il portait
Starting point is 00:12:52 ça comme une blessure. Le travail de la raffinerie. On restait à côté d'une voie ferrée. Déjà, ça en dit beaucoup, ça. La maison, une petite maison en carton, papier-brique. C'était modeste, mais quand on a de la musique, on ne sent aucunement l'effet de pauvreté. La pauvreté se situe ailleurs pour moi. Elle se situe dans le sens qu'avec des observations comme on n'a pas d'affaires là, on n'est pas à la hauteur, c'est pas notre monde, on ferait mieux de partir.
Starting point is 00:13:24 Il y a tout ce contexte-là qui, pour moi, était l'image de la pauvreté. Le fait que la musique ait été... D'abord, il y avait un piano. Ma mère a fait en sorte qu'il y avait un piano dans la maison. Mes soeurs ont appris le piano. Moi, j'ai eu une guitare à 14 ans.
Starting point is 00:13:40 Et on n'a jamais subi une résistance au fait qu'on faisait de la musique. Au contraire, c'était comme pour eux, pour mon père, pour la famille, c'était comme naturel. Il était même étonné qu'on puisse vivre avec ça. C'était comme... Il n'y avait pas de cette résistance-là. Je me souviens que Kathleen Dyson,
Starting point is 00:13:59 à un moment donné, une guitariste, qui a joué avec nous autres à l'époque... Kathleen Dyson, qui a joué avec Prince après avoir joué avec Richard Seguin. Oui, elle faisait la tournée de Journée d'Amérique et quand on en parlait, elle disait qu'elle a trouvé toute sa force à force de résister
Starting point is 00:14:14 aux contraintes que son père lui apportait. Dans le refus de son père. Oui, elle ne voulait pas qu'elle joue de guitare. On comparait un peu les parcours. Un comme l'autre. Un, c'est un peu insimulant. puis l'autre, la colère ou la résistance, c'était aussi un stimulant pour elle de s'affirmer dans la musique. Nous autres, ça a été naturel.
Starting point is 00:14:35 On a commencé juste Marie et moi. Qu'on puisse faire le chemin de la chanson, ça a été vraiment déterminant quand on a fait La Patriote. On avait 16 ans à l'époque. C'était à Saint-Agathe, c'est ça? Non, c'était à Montréal. On avait gagné le concours, Marie et moi, et dans le concours, c'était qu'on faisait la première partie
Starting point is 00:14:51 de Juvignot pendant deux semaines. Mais ça impliquait aussi qu'en faisant la première partie, on pouvait rester là, assister à son spectacle, et moi, je m'occupais de sa loge. On avait le droit, à la fin des spectacles, d'aller dans sa loge et puis là, il nous parlait
Starting point is 00:15:08 de notre interprétation. Il nous parlait de Félix. Il nous parlait de la portée des mots, la portée des voyelles. Je me souviens qu'une fois, il nous avait parlé sur notre sentier près du ruisseau. Il digérait par le mot. Il y avait le mot
Starting point is 00:15:24 bouleau, il y avait le mot « eau ». Il faisait tout le lien entre... Il créait comme une symbolique à travers cette voyelle. Puis ça, juste en abordant la chanson de Félix. Durant ces deux mois-là, c'est-à-dire ces deux semaines-là,
Starting point is 00:15:42 c'est comme s'il avait tracé un rideau en disant « il y a un chemin qui s'appelle la chanson. » À partir de ce moment-là, nous autres, Marie et moi, pendant dix ans, on a travaillé ensemble, on a fait la route ensemble. – Bruce Springsteen, il raconte dans son autobiographie que c'est ironique qu'il lui-même ait jamais eu de vrai job. Il a toujours été musicien, mais il a raconté la vie,
Starting point is 00:16:02 le quotidien de l'humble travailleur, de l'ouvrier. Puis la conclusion à laquelle il arrivait, c'est qu'il a raconté... Ce qu'il a raconté, c, le quotidien de l'humble travailleur, de l'ouvrier. Oui. Puis la conclusion à laquelle il arrivait, c'est qu'il a raconté… ce qu'il a raconté, c'est la vie de son père qui, lui, travaillait en usine. C'est ça. Est-ce que ce serait la même chose, est-ce qu'on pourrait dire la même chose de ton parcours à toi? Est-ce que tu as eu une vraie job avant la musique? Ah, j'étais concierge. Concierge. Est-ce que tu étais un bon concierge?
Starting point is 00:16:21 Ben, ils m'ont renvoyé. Parce qu'on a notre réponse. Je m'occupe. Ils trouvaient que je n'étais pas assez vaillant. Il fallait que je balaie les planchers, nettoyer les fenêtres. En tout cas, c'était un gros immeuble. Il fallait que je prenne l'autobus pour y aller. Ça a duré un été et demi. Mais c'est un fait.
Starting point is 00:16:41 J'ai l'impression d'avoir donné la parole à une génération qui n'avait pas la parole. C'est ça que moi, quand j'ai écrit La raffinerie, je garde un cri sauvage tout au creux de ma cage. Je garde un cri sauvage comme unique héritage. C'était beaucoup, beaucoup ces silences refrognés que j'avais envie de créer une rupture avec cette génération-là, puis en même temps donner la parole à cette génération-là. Que c'était comme... mais c'était pas juste mon père, hein, c'était mes oncles, c'était tout le monde qui faisait de la musique comme échappatoire,
Starting point is 00:17:20 si on peut dire. C'était vraiment pour eux autres un lieu de liberté, je pense. Et puis oui, je me suis senti proche de quartier aussi. Le quartier où on était, c'était un quartier d'ouvriers. Puis quand on est allé... Quand on s'est en allé en campagne, à l'âge de 8 ans, mon père avait construit un chalet. Mais ironiquement, c'était tous les mêmes employés
Starting point is 00:17:41 de la référentiel qui s'en allaient en groupe dans la même place, au Lac-Noir, à Lens-à-Bary. Ils se déplaçaient en groupe, ils s'aidaient pour construire les chalets. C'est là que j'ai découvert la nature. On était loin des ruelles. On était en pleine nature.
Starting point is 00:17:58 Et pendant longtemps, quand je suis arrivé ici, je confondais ces deux lieux. Dans mes rêves, c'était la perception de l'enfance, de la nature, avec celle que je découv arrivé ici, je confondais ces deux lieux. Dans mes rêves, c'était la perception de l'enfance, de la nature avec celle que je découvrais ici. C'était tout mélangé. Dans ma psyché, en tout cas, ça avait une cohérence bien forte.
Starting point is 00:18:17 Puis ton père avait subi un accident de travail, c'est ça? Oui, il est mort jeune, il est mort à 58 ans. C'était un accident de travail à l'épaule. Il a bourré de cortisone. À l'époque, c'était les médecins de la compagnie qui... Non, ça n'a pas été une belle époque parce qu'après ça, il était très, très retiré, très jeune du travail, à 50 quelques années.
Starting point is 00:18:45 Je ne me souviens plus, peut-être 51, 52 ans. C'était une période où, tu sais ça, il était très, très silencieux. C'était difficile pour ma mère. Nous autres, on grandissait, puis ça l'avait brisé. Ça l'avait brisé, ça. Et l'accident, et l'affaire de ne pas travailler, puis tout ça. C'est donc deux vies très différentes, radicalement différentes,
Starting point is 00:19:08 celles que ton père a eues, puis la tienne. Parce que ta vie, on s'imagine que c'est une vie de très grande liberté. La scène, c'est un lieu de liberté. La création, c'est un lieu de liberté. Et puis, oui, je me sens privilégié. Moi, je veux dire,
Starting point is 00:19:23 je dois tellement à la chanson. La chanson, elle m'a fait rencontrer du monde que jamais je n'aurais rencontré dans ma vie. Des auteurs, des poètes, des poétesses. Elle m'a fait voyager. Elle m'a fait rencontrer des musiciens, partager la route avec eux.
Starting point is 00:19:40 Je suis bien, bien, bien reconnaissant à la chanson. Puis la chanson, moi, je pense que ça ne s'apprend pas. Tu vas à la rencontre de toi-même. Taureau disait, si je ne suis pas moi, qui le sera, au départ? Il faut trouver sa singularité. Bien, pour se trouver, au départ.
Starting point is 00:20:00 Ensuite, il y a une phrase que j'aime beaucoup de Michel Garneau. Je me souviens, quand j'ai commencé, je trouve, à écrire plus sérieusement, à peu près à l'époque de l'album Double Vie. Michel Garneau écrivait, « Les mots méritent qu'on les vive, sinon ils ne disent rien, ils trahissent le réel. » Moi, j'avais écrit cette phrase-là sur mon bureau, c'était encadré. Puis quand je commençais à écrire, je faisais toujours référence à cette phrase-là.
Starting point is 00:20:26 À partir de ce moment-là, le chemin de l'écriture, le chemin de la chanson a été bien, bien différent pour moi. Ça a été... On va fermer, Pop. Qui est-ce qui coupe son arbre présentement, Richard? Est-ce que tu le connais? Non, non, c'est une équipe qui est venue travailler dans le sentier, puis
Starting point is 00:20:41 c'est magnifique, c'est des bénévoles. Ils sont à peu près 6-7, puis ils viennent travailler autour du sentier. C'est magnifique. C'est des bénévoles. Ils sont à peu près 6-7. Ils viennent travailler autour du sentier. Avec les vents qu'on a eus, il y a eu une grosse tempête. Beaucoup d'arbres renversés. Je me suis fait une tendinite.
Starting point is 00:20:58 C'est de la guitare. Ce n'est pas recommandé. Tu viens de dire que tu as commencé à écrire pour vrai avec Double Vie. C'est ton recommandé. Tu viens de dire que t'as commencé à écrire pour vrai avec Double Vie. C'est ton troisième album en solo. T'as fait des albums avant avec ta soeur, avec Les Séguins. Oui, mais... Qu'est-ce que ça veut dire, ça?
Starting point is 00:21:12 C'est un album collectif. Les Séguins, c'était vraiment une commune. C'était Francine Amnès, c'était Guy Ruché. Écrire avec ma soeur, tu sais. Forcément, il y avait été un aura de fraternité, tu sais, de collectif aussi après il a fallu réapprendre à parler seul
Starting point is 00:21:30 ma soeur et moi on parlait ensemble elle complétait mes phrases, moi je complétais les siennes on savait pas parler individuellement ça c'est le phénomène des jumeaux c'est un cadeau et c'est pas juste un cadeau c'est un cadeau d' c'est pas juste un cadeau.
Starting point is 00:21:47 C'est un cadeau d'avoir quelqu'un qui est capable de lire tes pensées, compléter tes phrases à partir d'un mot. Et d'un autre côté, il y a quelque chose d'intriguant là-dedans, c'est qu'avec le jumeau ou la jumelle, il y a tellement une grande complicité d'esprit et d'échange que tu t'imagines
Starting point is 00:22:04 que tu peux reproduire ça avec d'autres gens, dans tes amitiés. Autrement dit, ça a placé la barre très, très haute. Et puis, les premiers temps, on vivait comme une déception d'amitié parce qu'on n'atteignait jamais un genre de complicité comme ça. C'est jamais aussi riche. C'est ça. Et puis après, tu te décolles. Écoute, les jumeaux, c'est particulier. Ça appartient juste à la jumelité, tu sais. Puis c'est ça.
Starting point is 00:22:30 Mais après, il a fallu trouver chacun notre langage. Et puis on continuait à reproduire des jumelités. Marc-Claire travaillait avec Hélène Penaud. Moi, je travaillais avec Fiori. Encore là, il fallait que je trouve ma façon de dire des choses, ma façon d'écrire, ma façon de... Fait que c'est avec... C'est ça, j'ai appris lentement. Au contact de Louki Bersianek, elle m'a donné des outils incroyables.
Starting point is 00:22:52 Après, ça a été une rencontre avec Marc Chabot. Il écrit beaucoup de chansons avec Marc. On écrivait aussi pour Luce Dufault. Puis la première chanson qu'on a faite, Chabot puis moi, c'était « L'ange vagabond ». C'était le symposium de Jacky Roack à Québec. Et puis Marc était arrivé avec ce texte-là.
Starting point is 00:23:09 Marc-Claire et moi, on a fait la musique de L'Ange vagabond. Ça a donné vraiment quelque chose de très, très fort, très signifiant. Puis en plus, ça racontait le Canadien français exilé. Victor Lévis, au lieu, a déjà dit qu'on n'a jamais, les Américains
Starting point is 00:23:26 comme les Français n'ont jamais compris l'exil du Canadien français. Il dit qu'on ne triche pas avec la pauvreté. C'est vrai que je trouve qu'il y avait une image de Jack Kerouac, mais le Kerouac qu'Alexis Martin a présenté à Montréal,
Starting point is 00:23:42 c'est le Kerouac du Canadien français exilé, avec tous les déchireux qu'il peut porter en lui-même. Oui, c'est moi le Jack Kiroak cool qui collabore avec des grands jazz bands. C'est ça. Louki Bersianic, quel rôle elle a joué dans ton amour des mots, dans ta découverte des mots? D'abord, on était en rapport avec Luki Bersianek par Hélène Pedneau, parce qu'à l'époque, on voulait adapter
Starting point is 00:24:08 en théâtre musical Le Gullion, son livre majeur. Le grand roman de Luki Bersianek. Oui. Et puis, Hélène avait commencé à faire un découpage. On se rencontrait, on se voyait à peu près durant un mois, quatre, cinq séances d'écriture,
Starting point is 00:24:24 de découpage, tout ça. C'est un roman foisonnant. C'est tellement riche. C'est plus par où commencer. Si Hélène avait demandé une bourse pour poursuivre tout ça, elle ne l'avait pas obtenue. C'était resté en suspens. On va peut-être s'en prendre un peu plus tard. Pendant ce temps-là,
Starting point is 00:24:40 Lucky et moi, on a commencé à travailler des chansons. Et puis, ça a donné Chansons pour durer toujours ça a donné Traces et contrastes, ton deuxième album tu l'as beaucoup écrit avec elle beaucoup l'écriture de Luki à ce moment-là, il m'a fait découvrir ça c'était fascinant, c'était une femme
Starting point is 00:24:56 qui travaillait avec ses outils, elle sortait plein plein de dictionnaires va voir l'origine des mots regarde le dictionnaire elle m'a fait découvrir Gaston Bachelard je ne connaissais pas je suis en admiration pour Bachelard parce qu'il parle des éléments
Starting point is 00:25:10 c'est celui qui a écrit les plus beaux textes sur les graveurs c'est l'ami des poètes Bachelard c'est simple, c'est l'ami des poètes ça m'a fait découvrir ça, le droit de rêver puis à partir de là elle me donnait des outils de comment travailler,
Starting point is 00:25:28 comment aborder la chanson, l'importance de la rime, l'importance de la rythmique. Tranquillement, j'ai commencé à apprendre un peu plus, puis travailler un petit peu plus le métier de l'écriture. Puis vu que ça me prend bien du temps, au départ,
Starting point is 00:25:43 je me sentais qu'il y avait une certaine frustration. Je me disais comment ça se fait que je n'écris pas plus vite? Comment ça se fait que je ne suis pas celui qui est capable d'écrire sur la route? Comment ça se fait que... Sur un rouleau, sur un interminable rouleau, comme Jacques Leroy. Oui, oui, oui. Puis après ça, j'ai admis que ça me prenait du temps pour l'écriture. Si ça prend 60 heures, si ça prend 110 heures, je vais respecter le temps que ça va prendre.
Starting point is 00:26:14 J'avais à peu près 12 versions de la raffinerie. Je me perdais dans bien des... Même chose pour Double Vie. Puis après ça, je pense que le fait d'être réconcilié avec... Puis ici, on échappe à l'accélération du temps. Tu n'es pas pressé ici. Je fais confiance au temps.
Starting point is 00:26:35 Je parle ici à Saint-Venant-de-Paquette, dans les Appalaches, entouré des ventes, dans la montagne. C'est quelque chose qui m'habite et que j'habite. Je me passais la remarque en parcourant ta carrière qu'il y a plusieurs femmes
Starting point is 00:26:52 importantes qui ont été tes collaboratrices. Oui. Louki Bersianic, ta soeur, évidemment. Oui. Hélène Pedneau. Hélène Pedneau. Hélène Dallaire. Hélène Dallaire.
Starting point is 00:27:01 Hélène Dorion. Oui, Hélène Dorion, qui a signé quelques textes sur ton plus récent album. J'ai été élevé à trois heures. Peut-être qu sur ton plus récent album. J'ai été élevé à trois heures. Peut-être qu'il y a ça aussi. J'ai été élevé à trois heures. J'avais une puste.
Starting point is 00:27:12 Et puis, ma jumelle aussi, Marthe Lair. Je ne sais pas si dans ma psyché, ça peut influencer l'approche, mais je me sens confortable de travailler. La complicité s'installe facilement. Et puis, je trouve qu'il y a une sensibilité, je trouve qu'au niveau de l'écriture au féminin, il y a une sensibilité beaucoup plus rapprochée
Starting point is 00:27:32 au niveau de l'écrit et l'intime. Je trouve que les femmes vont plus loin dans la description de l'intime. Hélène Dallaire, je veux dire, elle était tellement merveilleuse parce qu'elle ouvrait beaucoup de portes. C'était la première chef d'orchestre d'un band de rock.
Starting point is 00:27:51 Ça a été la chef d'orchestre pendant plusieurs années. C'est elle qu'on voit dans le clip de Journée d'Amérique, par exemple. C'est presque pendant neuf ans, c'est ça. Elle a commencé en 85-86 jusqu'en 92-93. C'est elle qui avait recruté les musiciens
Starting point is 00:28:09 avec qui je faisais la tournée, Kevin De Souza. Formidable bassiste. Kathleen Daston. Kim Richardson. Kim Richardson. C'est elle qui, pour Kim, avait trouvé l'appartement, avait trouvé les meubles. Parce qu'elle arrivait de Toronto.
Starting point is 00:28:23 Oui. Puis elle faisait... Elle partait avec Kevin de Souza, puis elle allait voir des spectacles puis elle recrutait les musiciens de cette façon-là. Fait que c'est elle qui a monté le groupe. C'est elle qui était chef.
Starting point is 00:28:38 Et puis, pour bien des femmes, de la voir comme ça, tu sais, tout le drive l'avoir comme ça, tout le drive qu'elle pouvait avoir, ça parlait à une génération complète de femmes qui pouvaient assumer le rôle de chef.
Starting point is 00:28:55 Et un sourire inoubliable aussi. Hein? Un sourire inoubliable. Oui, oui. Quand je pense à elle, je vois son sourire dans le clip de Journée d'Amérique. Absolument, oui. C'est elle aussi qui amenait la plupart des arrangements. Mais ça se faisait de façon collective.
Starting point is 00:29:12 Réjean Bouchard a une très, très, très grosse signature guitaristique pour moi. Quel guitariste? Incroyable. Là, Réjean ne peut plus jouer. On évoquait cette période-là. Réjean, pour moi, un des plus grands guitaristes du Québec... Non, l'ange vagabond dont tu parlais, c'est lui.
Starting point is 00:29:29 Oui, c'est lui. La guitare qu'on entend beaucoup. Il a fait l'album de Journée d'Amérique, il a fait Les portes du matin, Vagabondage, puis comme réalisateur aussi. Tout le travail qu'il a fait à Chloé Sainte-Marie, tout ça, c'est... Non, puis il a travaillé après beaucoup,
Starting point is 00:29:45 beaucoup avec le studio Makoucham, au niveau de la réalisation, puis des guitares qu'il faisait et pour Florent et pour Martin, puis les autres groupes. Comment est-ce que ta relation avec le peuple Innu est née? Ah, bien déjà, on avait
Starting point is 00:30:01 une grande sensibilité. Si tu veux parler du plan spirituel, ça ne l'était pas. Moi, je trouve que la spiritualité est liée à la musique, le tambour, la pulsation cardiaque, le fait de marcher. C'est un geste de résistance pour moi.
Starting point is 00:30:18 C'est un geste aussi d'appartenance au territoire. Tu découvres le territoire en marchant. Quand Florent est arrivé à Montréal, c'était en 1986, je pense, avec Kajtin, on avait été les voir en spectacle, ma blonde puis moi, puis tout ça. Et puis Florent s'installait à deux rues de chez nous. On n'avait pas de maison, un appartement à Outremont. Il était à côté.
Starting point is 00:30:43 Puis là, je veux dire, tout de suite, j'ai connecté avec sa musique, un appartement à Outremont. Il était à côté. Puis là, je dis, tout de suite, j'ai connecté avec sa musique, puis j'ai présenté Montréal. Fait qu'on est allés au sommet du Mont-Royal. Ensuite, on est allés voir le spectacle de Nényon. Wow! Oui, j'avais eu des... Ça, ça s'est passé dans la même soirée.
Starting point is 00:31:02 Robin Fogel m'avait donné des passes pour Nényang puis c'était la tournée Crazy Hearts et puis je suis en train de penser que c'était pour être le côté folk de Nényang c'est bien, bien intime quand il décide de monter le son de son ampli ça sonne fort
Starting point is 00:31:20 on arrivait backstage il nous avait donné des passes, puis il était bien étonné parce que les noms s'entouraient de beaucoup des gens des Premières Nations. Quand on est arrivé là, il était en territoire de connaissance. C'est full native.
Starting point is 00:31:38 Là, on s'est promenés, le spectacle a commencé, mais c'était de la distorsion à coefficients en mille. c'était de la distorsion à coefficients 100 000. C'était tellement fort. Je ne t'attendais pas à ça. On se promenait, on se promenait. Dans les gradins, c'était dégagé.
Starting point is 00:31:55 En haut, c'était le forum à l'époque. On voyait quelqu'un qui était tout seul à côté d'un banc, les grands bras ouverts et les yeux fermés. Je te dis, il était tout seul dans une série de bancs en haut. « Non, on se rapproche, on se rapproche. » C'était Richard Desjardins.
Starting point is 00:32:11 « Richard, qu'est-ce que tu fais ici? » C'était fort, fort, fort. Puis Richard dit, « Maudit qui s'est reposé. » Fait que, Florent, on restait un bout de temps avec... Je le raconte dans le livre, dans sa biographie, un petit passage. Et puis,
Starting point is 00:32:32 après ça, il y avait au Club Soda le spectacle de Mark Cohn. Fait qu'on est allés voir Mark Cohn walking in Memphis. Puis tout ça, c'était un beau spectacle. Et puis lui, en retour, il m'a invité à marcher à Mayotenam, à 270 km plus haut.
Starting point is 00:32:52 Il m'a invité à aller dans le bois puis découvrir qu'est-ce que c'est être dans le bois. À ce moment-là, ça a été comme vraiment une vraie amitié qui se poursuit toujours jusqu'à 34 ans plus tard. Mon collègue Alexandre Vigneault est allé faire un reportage récemment à Malhotenam avec les artistes de la région, de la communauté Innu, Florent Voland notamment,
Starting point is 00:33:12 mais des artistes des plus jeunes générations qui me disaient que pour tout le monde là-bas, Richard Séguin, c'est une sorte de saint. Tout le monde t'admire. Grand respect pour qui tu es et pour ton travail. Je te dirais, c'est pour les deux. On se disait, Florent et moi, que la musique avait le pouvoir
Starting point is 00:33:27 de réunir les communautés. Puis on y croit encore, puis on le fait encore. Par la musique, il y a eu des échanges, des échanges profonds, des échanges réels, des échanges d'amitié, de complicité, puis des grands, grands partages.
Starting point is 00:33:47 Puis quand on allait là, quand on allait à Mayoté-Nam, on a été initiés au sweat house, avec tout le rituel de purification, les pierres chaudes, puis la tente à suer, puis avant de faire le spectacle. Il y a plein, plein de rituels de partage qu'on a découverts avec eux. Et puis, c'est là aussi que Réjean
Starting point is 00:34:08 a connu le monde de Mayoté-Nam, la création du studio Makoucham. Ça s'est fait de façon bien, bien, bien organique ensemble, puis ça se poursuit encore aujourd'hui. On va être, Florent et moi, les porte-parole pour l'édition
Starting point is 00:34:24 de Tite-Vallée, comme passeurs. Si on a quelque chose à dire, c'est justement que par la musique, on peut créer des liens profonds, des liens qui vont... des grands liens de fraternité. Ça, j'y crois beaucoup. En 1973, tu as participé à Montréal à un spectacle pour dénoncer l'exploitation de la baie James.
Starting point is 00:34:44 Il y avait plusieurs grands personnages qui ont participé à Montréal à un spectacle pour dénoncer l'exploitation de la baie James. Il y avait plusieurs grands personnages qui ont participé à ce spectacle. – Joni Mitchell. – Joni Mitchell. – Peter Pollen-Murray. – Est-ce que tu les as rencontrés, ces gens-là, ce soir? – Non, par contre, c'est le soir où on a rencontré Pauline Junier et Gérald Godin. Ils étaient venus dans la loge nous voir.
Starting point is 00:34:57 – C'est pas mal comme rencontre. – Ah, c'était incroyable comme rencontre. C'était d'abord de l'admiration. Nous autres, on avait quoi? 20 ans? 21 ans? Mais c'était d'abord l'admiration. Nous autres, on avait 20 ans, 21 ans. Mais c'était en 1973. Je suis pas mal sûr que c'était en 1973. Je pensais que c'était plus tôt que ça. Mais c'est la première fois qu'on chantait Sam Seguin, Martelard et moi. Et puis, ça avait été bien fort comme ralliement. Puis je vous dis, c'était toutes les voix dissidentes du projet de l'abbé James,
Starting point is 00:35:27 parce qu'il y avait une section des cris qui reconnaissait que le territoire était pour être inondé. Il y avait toute cette réalité-là qui n'était pas tellement affirmée. Et puis, pour nous autres, c'était un des premiers grands spectacles. C'était au Centre Paul Sauvé, à l'époque.
Starting point is 00:35:44 Et puis, ça a été déterminant. Puis la rencontre avec Pauline, il était tout dans l'exaltation. C'était comme un tourbillon. Quand ils sont passés dans l'âge, je me souviens juste que c'était comme un grand coup de vent, puis beaucoup d'enthousiasme, puis beaucoup de...
Starting point is 00:35:59 Je peux pas dire... Qu'est-ce qu'on a parlé? Est-ce que tu les as revus après cette première rencontre? Oui, on sait bien qu'il y avait toute l'affirmation avec le Parti québécois et les grandes manifestations.
Starting point is 00:36:14 Mais aujourd'hui, par rapport à la défense, disons, de la cause autochtone, on en est où selon toi? Parce qu'entre le moment où tu es devenu ami avec Florent Voland, aujourd'hui, on peut avoir l'impression qu'il n'y a pas tellement de progrès qui s'est fait. Il y en a eu du progrès,
Starting point is 00:36:28 mais quand on voit des événements comme ce qui est arrivé avec Joyce Echaquan, c'est difficile de ne pas désespérer. Il y a une prise de conscience, en tout cas, qui est là. Cette prise de conscience-là éveille beaucoup, beaucoup de choses. Puis moi, je vois une renaissance incroyable de
Starting point is 00:36:44 toutes les Premières Nations, l'affirmation, le retour, l'urgence de garder la langue, l'urgence de garder les traditions. C'est sûr qu'il y a eu un état de choc très, très, très fort. Puis je dis, il y a eu aussi, il fallait reconnaître toutes les blessures. Quand je dis que Florent porte un sac de douleur des ancêtres, c'est ça aussi. J'ai vu à quel point comment ça a touché plusieurs générations. Toute la question des pensionnats, tout ça,
Starting point is 00:37:13 c'est des blessures qui se transmettent de génération en génération. On a des mots pour nommer ces réalités-là, traumatisme intergénérationnel, alors qu'on ne savait pas comment décrire cette chose-là. J'allais jusqu'au génocide. Moi, je n'ai pas peur de ce mot-là
Starting point is 00:37:26 pour ce qui concerne les Premières Nations. Mais je trouve tellement vivifiant ce qui est en train de se passer au niveau de la parole, au niveau de la poésie, au niveau de l'écriture, au niveau de l'expression. C'est fort, c'est fort. Je pense qu'on va apprendre encore beaucoup, beaucoup, beaucoup. Ils peuvent nous apprendre beaucoup, beaucoup encore
Starting point is 00:37:44 sur notre relation avec l'humain, notre relation avec la nature, notre relation avec l'idée du cercle, avec leur spiritualité qu'ils peuvent amener. Moi, je suis très, très, très reconnaissant aux Papineaux, parce que c'est avec eux autres que je suis le plus poète. Dans les années 80, puis au début des années 90, tu étais une immense star. Aujourd'hui, tu es encore une icône de la culture québécoise,
Starting point is 00:38:07 mais tu présentes pas des spectacles à grand déploiement. Ça fait longtemps que t'as pas présenté un grand spectacle extérieur. C'est une décision que t'as prise à un certain moment? C'est parce que je trouve que depuis à peu près une dizaine d'années, les chansons se prêtent moins à ça. Les chansons se prêtent plus à l'intimité,
Starting point is 00:38:23 plus des salles que des festivals. Au festival, il faut que tu vendes de la bière. Je ne vends pas de bière. Les organisateurs s'en plaignent. C'est peut-être à cause du répertoire. Le répertoire, c'est beaucoup nuancé, je trouve. Moins rock,
Starting point is 00:38:40 la place au mot, même au niveau du tempo. J'ai vraiment... Il y a un virage beaucoup plus faux qui s'est prononcé depuis... Depuis Microclimat. Depuis Microclimat, on travaillait carrément avec un quadruple à l'accord à cette époque-là.
Starting point is 00:38:55 Ensuite, de ça, ça a été d'instinct. Non, c'était pas d'instinct. C'était lettre ouverte. Ensuite, il y a eu Appalaches. Appalaches aussi, c'était un grand tournoi. Tu étais venu voir notre spectacle justement, avec une critique qu'on a bien appréciée, qu'on s'est changé entre musiciens,
Starting point is 00:39:10 regarde telle affaire. Bon, tant mieux. Mais d'instinct, c'est ton dernier vrai disque rock. Oui. Puis ça ne t'a jamais manqué de refaire de la scène de cette manière-là, en assumant davantage les guitares électriques? Parce que tu pourrais aujourd'hui,
Starting point is 00:39:24 c'est vrai que ton répertoire actuel est plus dépouillé, plus folk, mais tu pourrais partir en tournée jouer Journée d'Amérique, Double Vie, L'Ange vagabond avec les arrangements d'époque ou à peu près. Puis ça, ça vendrait de la bière. Non, mais je me verrais boire une bière avec Journée d'Amérique qui joue. Oui, oui.
Starting point is 00:39:42 Bien, on le fait encore en spectacle. Il y a des incontournables. Mais en général, je trouve que... Je me sens plus à l'aise avec la nuance, le rythme des chansons,
Starting point is 00:39:59 l'aspect guitaristique plus folk. Cette approche-là, c'est comme... Puis moi, je ne suis pas nostalgique de ce que j'ai fait dans le passé. Il y a des chansons qui traversent le temps, puis que les gens m'écoutent ça, je vous dis, ça me fait un devoir de les faire. Mais tu sais, on donne beaucoup de place à la parole, on donne beaucoup de place
Starting point is 00:40:18 à des longues introductions avant les spectacles, avant les chansons, je vous dis. Non, ça ne me manque pas. Ça ne me manque pas, ça. Peut-être qu'un jour, je réunirais beaucoup de guitar heroes ensemble. Tous ceux qui ont...
Starting point is 00:40:35 Tous ceux avec qui j'ai travaillé. Puis on pourrait monter un spectacle plein de guitares. Ou encore faire quelque chose de façon collective. que jean la chance jess maud déjà ce serait pas mal oui oui oui encore je travaille à cubo quoi qu'elle n'a pas fait la dernière tournée je travaille avec simon rodin qui échappe de casse pour nous pour la dernière tournée vincent vaillard m'a déjà parlé, sous le seau de la confidence, confidence que je vais briser à l'instant,
Starting point is 00:41:06 d'un projet de tournée que vous aviez, toi, lui et Patrice Michaud. Et Florent Volant. Et Florent Volant. Oui, les quatre ensemble. Qui ne s'est pas concrétisé. La pandémie est arrivée. Et puis, on avait ça en tête de réunir deux générations.
Starting point is 00:41:21 Et puis, on avait évoqué les Woodburys un petit peu. Les Traveling Woodburys, oui. Les Traveling Woodburys québécois. C'est ça, on pensait à eux autres. Tu serais Dylan ou George Harrison dans ce scénario-là. Non, non, c'est justement ça. On essayait d'écarter le rapprochement comme ça. Mais c'était
Starting point is 00:41:39 l'idée de se retrouver sur scène. On trouvait que le temps musical, la complicité qu'il y avait entre nous autres, notre amour pour le folk, nos références aussi. On est des amoureux de Dylan, de John Hyatt. Des références qui sont assemblables.
Starting point is 00:41:56 On parle de Dylan, on parle de John Hyatt. Est-ce qu'on peut parler un peu de Springsteen, dont je suis un grand fan? Oui, moi aussi. Tu l'as rencontré, tu lui as prêté une guitare? Oui, c'était encore par l'intermédiaire de Robin Fogel. Springsteen était venu à Montréal parce qu'il faisait
Starting point is 00:42:12 une tournée solo et puis l'équipe technique se déplaçait deux jours plus tard. Lui, il arrivait plus tôt dans les villes. Il en avait profité pour aller dans les vêtements usagés, les thrift stores. C'est plus facile quand tu prends déjà
Starting point is 00:42:27 un coat qui est usé. Un manteau en donnait neuf, c'est trop rigide. Il faut que quelqu'un l'ait cassé avant. C'est ça. En tout cas, son manteau était bien cassé. Et puis Springsteen est arrivé et l'équipement était resté avec le monde à Boston
Starting point is 00:42:46 et puis il avait demandé à Robin s'il connaissait quelqu'un qui pourrait lui prêter une guitare pour pratiquer dans la loge Robin c'est qui? Robin Fogel c'est l'associé de Michel Sabourin c'est eux autres qui ont le club Soda pendant longtemps puis Robin s'occupait beaucoup plus de la section anglophone
Starting point is 00:43:03 au niveau du du booking il tout ça. Il y avait beaucoup de contacts avec tout ce monde-là. C'est lui qui recevait souvent des tournées internationales. Il m'avait demandé de passer une guitare. J'ai repassé ma Gibson 1954. Après ça, je suis allé la récupérer. On a eu un échange dans l'âge autour de Kerouac,
Starting point is 00:43:22 parce qu'il ne savait pas que la famille venait de Saint-Hubert-de-Rivière-du-Loup. Et puis on parlait de tout ça. La famille des Kerouacs s'est en allée à l'eau. C'était un échange sympathique puis on avait une grande admiration pour les Guitars Gibson. Une belle rencontre.
Starting point is 00:43:41 Parce qu'à cette époque-là, il y avait deux de mes chansons qui avaient été traduites par Gary Usborne. Ah oui, avec qui il a travaillé et réalisé quelques-uns de ses albums. C'est un grand chanteur soul des années 60. Springsteen a contribué à son retour dans les années 70. Oui, en même temps, il rend hommage parce qu'il avait été inspiré par Gary Usborne.
Starting point is 00:43:59 Puis Gary avait pris Les portes du matin en anglais. Ah oui? Oui, Et tu marches et l'ange vagabond. Il avait choisi trois chansons. Mais l'album n'est jamais sorti. Il y avait des gros problèmes de toxicomanie. Je pense que la compagnie avait laissé tomber.
Starting point is 00:44:15 Mais j'ai les chansons. C'était bien fait. Il m'avait invité à aller à New York en studio, jouer de l'harmonica. J'étais tellement impressionné que il m'avait dit dans le talk-back, quand on enregistrait, «Give me some cotton blues!»
Starting point is 00:44:35 Pour me déjeuner, me mettre à l'aise. Je vais jouer de l'harmonica là-dessus. J'ai lu dans une entrevue que tu as accordée que tu as déjà eu l'audace de jouer de l'harmonica dans un spectacle en première partie de John Mayer, qui est un des plus grands harmonicistes qui a jamais existé. Oui, mais ça avait passé éternellement, peut-être parce que c'est l'arrogance de mes 18 ans.
Starting point is 00:44:56 Et puis je faisais un long solo dans... Tu as des souvenirs, toi, c'est incroyable. Je faisais un gros, gros solo à la fin du Train du Nord. Puis c'était dans le mode blues, avec une harmonica assez classique dans l'approche. Mais je pense que c'était mon innocence et mon enthousiasme
Starting point is 00:45:15 qui avaient fait que ça passait. J'avais été abruti. Mais on n'a pas parlé à Mayo. Il n'a pas donné son approbation. Il n'a pas désapprouvé non plus. Je pense qu'il ne se préoccupait pas des premières parties. Dans ton plus récent spectacle, tu cites Félix Leclerc et tu dis « Je ne suis pas un chanteur,
Starting point is 00:45:32 je suis un homme qui chante ». C'est quoi la différence entre un homme qui chante et un chanteur? En fait, c'est une citation de Félix. Félix disait de lui-même « Je ne suis pas chanteur, je suis l'homme qui chante ». Pour moi, ça a une grande nuance parce que quand je pense à l'homme qui chante, je le vois sur un terrain ou je le vois sur le bord de l'eau,
Starting point is 00:45:53 au bord du fleuve ou encore marcher dans un rang. Et puis c'est l'homme heureux qui s'exprime en chantant. C'est plus celui qui n'est pas dans le métier, je vais dire, qui n'est pas dans le cycle de la tournée. C'est l'homme heureux qui s'exprime en chantant. Je pense que c'est un peu ça qu'il voulait dire. Pour la chanson d'Hugo Latulippe, je trouvais que ça évoquait exactement
Starting point is 00:46:19 ce type de chanson-là que je chante à Capella. Volontairement, on aurait pu mettre une section de cuivre sur cette chanson-là. Ça aurait été magnifique. Mais je voulais absolument que ça reste à l'exemple, comme je viens de te dire, l'homme qui chante. Celui qui s'en va sur un rang et qui apporte avec lui sa chanson à l'intérieur de lui, proche du cœur et qu'il reconnaît par cœur.
Starting point is 00:46:43 C'est dans cette chanson-là que tu dis que nos territoires sont des temples. Nos territoires, oui. Ce sont notre temple. Ces territoires sont notre temple. Comme ici. Oui, on regarde par la fenêtre présentement et c'est difficile de ne pas voir un temple.
Starting point is 00:46:59 Il y a une autre phrase de Félix qui était chère. Félix Leclerc qui disait que c'est un métier, la chanson, où il faut plus souvent dire non que oui. Absolument. Moi, ça m'a pris du temps à savoir que non était une phrase complète. C'était...
Starting point is 00:47:14 Parce que tu... Sur bien des aspects, on dirait que quand tu... D'abord, t'es toujours souvent pris dans la difficulté, justement, de dire non, d'accepter, d'être là. Puis tu as aussi le mythe de dire que quand tu n'es pas là, tu n'existes pas. Puis souvent, les tournées, après que les tournées sont finies,
Starting point is 00:47:36 il y a une poussée d'adrénaline qui fait que c'est difficile de rentrer dans tes terres, rentrer dans le silence, rentrer loin de toute l'activité que tu viens de vivre, puis de dire, c'est quoi le cycle avant que tout ça s'apaise? Ici, ça m'aide beaucoup à m'apaiser. C'est apaisant ici. Le territoire m'appelle. Et puis c'est ça, ça m'a pris du temps à dire non, parce que tu n'es pas obligé d'être constamment en représentation.
Starting point is 00:48:03 L'aide de la représentation t'empêche d'aller dans l'introspection de ton écriture. Parce que tu es toujours interrompu, tu es dans l'action, tu es dans le mouvement, tu es dans les modes, tu es dans le goût de la semaine. De m'éloigner de tout ça, d'abord ça me calme, et puis ça me donne la chance aussi de penser à ce qui s'en vient au niveau de l'écriture, comment je vais l'aborder. On n'arrête jamais de penser à ça. C'est fou, hein?
Starting point is 00:48:31 L'idée de la création est toujours là. C'est pas néfaste, c'est pas lourd, mais c'est quand même toujours présent. Il y a comme une phrase qui vient te chercher, il y a une impression, tout ça. Ou des musiques, ou des musiques qui t'habitent. Tu vis constamment avec la création qui va venir. T'es habité. Oui, habité. En rétrospective, à quoi est-ce que t'es heureux d'avoir dit non? Aller à la télévision quand on te demande autre chose que de chanter.
Starting point is 00:49:05 Faire des recettes. Aller à la télévision quand on te demande autre chose que de chanter. Faire des recettes. Bien, te raconter. Parce que c'est étrange. Il y a peu de place pour la chanson dans les médias, puis dans la télévision, même à la radio, c'est comme si ça n'avait pas son importance. Ça a été banalisé.
Starting point is 00:49:30 Ça se réduit tout le temps, tout le temps, tout le temps. Puis même nos chansons à la télévision, on va trouver que c'est trop long. Trois minutes, c'est long. Est-ce qu'on pourrait avoir la version écourtée de la chanson de trois minutes? Écourtée, donne-moi juste ton refrain, ça va être correct.
Starting point is 00:49:42 Mais c'est une réalité. C'est comme ça qu'on consomme la musique aujourd'hui avec les plateformes d'écho-tendance. C'est la grande tristesse. Si les 30 premières secondes ne m'accrochent pas, prochaine chanson. Exactement. Puis en plus, souvent, ça va être juste une chanson
Starting point is 00:49:54 sur tout un album. Je suis encore celui qui achète des CD pour avoir le concept au complet, pouvoir lire les paroles, les photos qui sont en écho avec la chanson, tout ça. Et puis dire non, dire non, dire non à des... de prendre tes chansons, par exemple,
Starting point is 00:50:14 pour en faire des commerciaux. Combien de fois qu'on a dit non à ça? Ma blonde a dit, écoute, dis-toi-le une fois, là, puis après, t'aurais pu te re-questionner. On dit non. Peu importe le montant, ça serait toujours non. On s'en fout, on a dit non,
Starting point is 00:50:30 on garde notre rôle. Mais un gros spectacle à Saint-Jean, par exemple, je suis sûr qu'on t'invite presque à chaque année. Oui, oui. Tu dis oui parfois, mais ça va te stresser, ça va te rendre nerveux dans les semaines précédentes. Même si t'en as fait des centaines de ces spectacles-là. Viens dire, il n'y a pas de petits atterrissages.
Starting point is 00:50:48 C'est sûr que c'est énervant. C'est sûr que tu y penses. Puis encore, parce que je dis souvent, on partage des chansons qu'on n'a pas faites qui ne sont pas de notre répertoire. Il y a tout ça où ça me rend nerveux. Puis on dirait qu'avec le temps, je n'ai pas envie d'être nerveux.
Starting point is 00:51:03 Je n'ai plus envie d'être nerveux. C'est ce que je trouve difficile des fois. Ça fait que c'est sûr que je vais y aller avec ce que je fais de mieux, avec mon spectacle, avec mes musiciens qui m'entourent. Les musiciens m'apportent beaucoup. Ils sont vraiment généreux. Ils regardent les conditions, ils sont favorables. Ils vont s'arranger pour que les pratiques soient faciles à faire. On a fait une tournée tellement simple, heureuse, les conditions sont favorables, ils vont s'arranger pour que les pratiques soient faciles à faire.
Starting point is 00:51:25 On a fait une tournée tellement simple, heureuse, beaucoup de partage. On arrivait tôt avant le spectacle pour pouvoir jouer ensemble, pour improviser, pour partager des musiques. Il y en a qui faisaient de la musique de film, l'autre qui est en train de faire un album
Starting point is 00:51:41 de guitare solo. Tout ça bouillonnait de créativité. Ça a été du vrai bonheur. Il y a une chanson sur ton plus récent album qui m'a fait pleurer. Je suis sûr que je ne suis pas le seul qui a pleuré en écoutant cette chanson-là. C'est « Tout près des trembles ».
Starting point is 00:51:57 Moi, j'aime tellement cette chanson-là. C'est une chanson au sujet pour ta mère? J'avais jamais composé de chansons pour ma mère. Et puis, mon père, oui, il y en a eu beaucoup. Sur le bord de la traque, la raffinerie. Mais ma mère, comme je dis dans la chanson, c'est elle qui a apporté la culture dans la maison.
Starting point is 00:52:20 C'est elle qui a fait en sorte qu'il y avait des livres. C'est elle qui écoutait Radio-Canada pour savoir s'il y avait des émissions qu'on ne pouvait pas découvrir ou entendre des choses qu'on n'entendait pas ailleurs. Et puis, ma mère était très, très catholique. C'est pour ça qu'à la fin de la chanson, je l'ai mis dans son contexte à elle, de sa croyance à elle, que le paradis, c'est la rencontre de ceux qui sont décédés, puis que
Starting point is 00:52:47 tu vas partager avec eux le plus beau de ce que tu as vécu, le plus grand moment de bonheur, puis ça va être encore magnifié, parce que je ne sais pas comment dire autrement. Mais c'est généreux que tu lui offres ce cadeau-là, alors que je devine que tu n'y crois pas nécessairement, toi, au paradis. Non, ça n'était pas
Starting point is 00:53:03 ma référence. Mais je respecte sa croyance, je trouve ça beau. Elle était convaincue qu'en mourant, c'est ça, elle était la communion des saints pour elle, c'était ça. Elle était pour voir tous ceux
Starting point is 00:53:18 qu'elle avait aimé et qui l'avaient aimé. Ça m'a fait du bien. Ça m'a fait du bien. Quand je dis t'entendre parler de toi, c'est une génération qui ne laissait rien. Ils ne nous laissent pas de témoignages écrits.
Starting point is 00:53:35 Ce n'est pas du monde d'écriture. Souvent, avec mes soeurs, on est ensemble et on essaie de racoler tous les morceaux. Le rapailler. Oui, le rapailler. Qu'est-ce que t'as vécu avec elle? C'est quoi qu'elle te dit? Ah oui, c'est ça qui s'est passé ta journée. T'as fait tel voyage
Starting point is 00:53:50 avec elle. Elle t'avait confié ça. Ma soeur a découvert un petit cahier de notes qu'elle nous a tous... Ma mère avait conservé des... Ma mère avait remis des pensées qu'elle écrivait ou qu'elle entendait à radio. C'était précieux de le partager en groupe. C'est tout ça. Et puis pour moi, c' à radio. C'était précieux, on le partageait en groupe.
Starting point is 00:54:06 Pour moi, c'était ça. C'était tout près des 30. C'est ta voix qui me manque, mais tout près des 30. Je voudrais t'entendre parler de toi. Parle-moi de comment tu as vécu cette période-là. Comment tu as vécu la guerre? Quand mon père partait, quand il se promenait et qu'il faisait des fausses couches à répétition, trop nerveuse,
Starting point is 00:54:22 il y avait bien des pages de sa vie qu'on connaissait pas tellement, tu sais. Puis que en parlant avec des tantes, en parlant avec mes soeurs, on a pu faire un portail de ma mère qui était plus complet, tu sais. Quand est-ce que tu penses à elle?
Starting point is 00:54:39 Bien, je chante sa chanson tous les soirs. Fait que... Non, je pense souvent à elle. Je pense souvent à ce qu'elle nous a laissé. C'est drôle, Mélanie Noël, la poétesse, elle disait « Ils vivent à l'intérieur de moi. » C'est un fait.
Starting point is 00:54:55 Nos parents vivent à l'intérieur de nous. Ils sont disparus, peut-être, mais ils sont toujours là. Je trouve qu'en vieillissant, on s'en aperçoit encore plus. C'est le genre de transmission de bien ou de doute. Je me sens plus prêt à deux autres,
Starting point is 00:55:16 même avec le temps qui passe. Moi, je suis rendu à quoi? À 71 ans. Il y en a plus en arrière de moi qu'en avant. Serge Bouchard disait qu'avec les années, le deuil s'enracine. Oui, absolument. Puis je vous dis, il faut être stupide pour ne pas voir sa mortalité.
Starting point is 00:55:36 Voir ce qui est mortel autour de nous. C'est de sentir, de voir le fait qu'on est mortel. Je trouve que dans la question qu'est-ce qu'on leur laisse, de voir à quel point on est mortel, je pense qu'on se donnerait moins d'importance et il y aurait plus de conscience de ce qui va nous suivre.
Starting point is 00:55:56 Ils te restent encore plusieurs années devant toi, mais à quoi tu veux les occuper ces années-là? Je ne sais pas si je vais avoir la santé. C'est ce que je me dis toujours. J'ai eu la santé de faire cette tournée-là. Tu m'as l'air très en santé présentement. Oui, oui, mais je fais attention. Moi, je vis comme un moine en tournée.
Starting point is 00:56:13 Je ne bois pas, je ne sors pas. Je fais attention à ce que je mange. Je fais mes vocalises, je fais mes exercices. Je suis dévoué à la chanson, au spectacle, à la rencontre avec les gens, avec tout ce que ça exige. Ça, je le fais. Mais je ne sais pas que... Jean-Louis Murat, il est à mon âge.
Starting point is 00:56:33 Oui, puis il nous a quittés hier au moment où on a rejeté cette entrevue. Exactement, il a 71 ans. Non, j'y pense beaucoup, mais je me vois écrire jusqu'à la fin de mes jours. Je ne suis plus capable de chanter, c'est ça. Je vais continuer d'écrire. J'ai aussi beaucoup d'intérêt pour la graveur.
Starting point is 00:56:50 Mon atelier déborde de ce temps-ci. Je n'ai pas eu le temps de faire du nettoyage et tout ça, mais j'ai hâte de retourner à la graveur aussi. Revenons en conclusion sur ce qu'on a évoqué au début de notre conversation. Michel Guivard, qui est ici à Saint-Venant,
Starting point is 00:57:06 il décide éventuellement de partir en Belgique, si je me souviens bien, parce qu'il avait trouvé l'amour là-bas. Si Michel Rivard était resté à Saint-Venant avec Richard Séguin et Serge Fiori, est-ce que l'album aurait été meilleur? Est-ce que l'album Fiori-Séguin-Rivard aurait été meilleur que l'album de Fiori-Séguin?
Starting point is 00:57:26 Si, si, si, si, si, si, si, si. Ça, c'est un des grands si de l'histoire de la chanson québécoise, quand même. Bien, il y avait des belles chansons. Michel avait déjà commencé à écrire Le Vent du fleuve, qui devait se retrouver sur cet album-là. Mais je te dirais que, oui,
Starting point is 00:57:42 ça aurait été différent parce qu'au départ, l'album devait être juste trois guitares et une contrebasse et trois voix. Mais je pense que ça aurait mal servi les chansons à Serge. Serge était... Bien, c'est Harmonium qui joue sur l'album. Oui, il a rappelé à peu près tous les membres d'Harmonium. C'est ça. C'est comme... C'est une signature d'Harmonium. Et puis, c'est...
Starting point is 00:58:03 Oui, l'album aurait été différent. Je pense que ça aurait été bon, parce que on faisait de belles chansons. Mais c'est ça. Ça aurait été un autre contexte. Imagine les trois guitares, trois voix, contrebasse. Bien, il n'est pas trop tard. Vous pourriez faire un album ensemble, tous les trois.
Starting point is 00:58:20 Vous êtes encore en bons termes. Oui, on est en bons termes. Je ne sais pas... Michel avance. Je pense qu'il est dans sa créativité et il nous apporte toujours des affaires nouvelles. Serge, il est proche de toute sa réalisation,
Starting point is 00:58:39 qu'est-ce qu'il a fait, puis tout ça. Moi, je penche toujours à mon prochain album. J'aimerais aussi voir de mon vivant le théâtre musical... De Roderick Walden. ...dédié à Thoreau. Parce que je trouve que ce personnage-là, dans l'histoire, je trouve, dans l'histoire philosophique, il occupe une place très, très importante
Starting point is 00:58:59 puis il nous répond à des questions vitales aujourd'hui. Thoreau a abordé la désobéissance civile, le refus de la guerre, l'émancipation des Afro-Américains. Tout ça... Le rapport à la nature. Le rapport à la nature.
Starting point is 00:59:15 Avec Warden, c'est Patrice Desbiens qui disait que chaque poème est une cabane devant un lac. Encore en référence à Thoreau. Il y a tellement de choses. C'est multiple ce qu'on pourrait faire avec Cthoro. C'est une réalisation. J'ai travaillé fort là-dessus.
Starting point is 00:59:31 J'ai travaillé beaucoup d'heures consacrées à ça. J'aime bien la réalisation. On l'a faite avec beaucoup de respect pour le personnage. J'espère un jour, j'aimerais savoir ça, qu'on puisse voir ça sur scène. Puis c'est un album qu'il faut écouter de A à Z.
Starting point is 00:59:50 On parlait tantôt de cette manière qu'on avait d'écouter seulement 30 secondes d'une chanson puis de passer à la suivante. Retour à Walden, il faut l'écouter de A à Z. Oui. Il y a beaucoup de monde qui m'ont dit, on est parti de Montréal. Bien, il y avait encore, je ne sais pas comment... Il n'y a plus de lecteur CD dans les voitures maintenant.
Starting point is 01:00:06 Mais il l'avait écouté. Il disait qu'on a fait le trajet avec Wadoun. C'est en venu jusqu'ici. Ça avait une cohérence. Richard, le titre de mon balado, c'est « Juste entre toi et moi ». Ma dernière question sera la suivante. Est-ce qu'il y a quelque chose que tu aimerais me dire
Starting point is 01:00:19 qui resterait juste entre toi et moi? Eh bien, oui, parce que j'ai accepté de faire cette rencontre-là. Merci d'avoir accepté. Oui, parce que je dis, t'es quelqu'un qui écoute nos albums avant de nous rencontrer. Il me semble que c'est la moindre des choses, mais oui,
Starting point is 01:00:38 je fais ça pour vous. Ensuite, t'es quelqu'un qui est venu voir nos spectacles. Ensuite de ça, il y a des critiques de nos spectacles que t'as faites que moi et mes musiciens, on a pris en considération et puis pour toutes ces raisons-là entre toi et moi c'était normal qu'on se rencontre pour moi, c'était pas normal
Starting point is 01:00:57 c'est un peu surréaliste de passer un après-midi avec Richard Séguin donc merci de nous avoir accueillis c'est un honneur juste entre toi et moi

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